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29/11/2001

CEDEAO : un sommet plein d’incertitudes

(MFI) Le sommet de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest se réunit les 20 et 21 décembre prochains à Dakar, au Sénégal, sur fond d’incertitudes internationales et régionales.

Les risques de récession mondiale aggravés par les attaques du 11 septembre, la baisse annoncée des cours des matières premières l’année prochaine, le passage à l’euro (la monnaie commune européenne) tout comme les problèmes politiques qui secouent plusieurs pays de la région pèseront fortement sur les débats. Ceux-ci seront officiellement axés sur l’intégration économique et la coopération sous toutes ses formes. La Cedeao (Ecowas en anglais), créée en 1975 à Lagos, regroupe en effet quinze pays – dont huit sont membres de la zone Franc – aux aspirations convergentes mais aux intérêts différents.
Les pays de la zone Franc – Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo – appartiennent aussi à l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), qui tiendra son propre sommet, également à Dakar, juste avant celui de la Cedeao. Ils sont surtout préoccupés par l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2002, de l’euro, auquel leur monnaie commune, le franc CFA – qui a une parité fixe avec le franc français – est ancrée. Malgré les garanties obtenues et les démentis concernant toute nouvelle dévaluation du CFA, la devise la plus forte de la région, ils se posent des questions concernant l’entrée dans « l’euroland » et les conséquences sur leur situation financière. Les troubles intérieurs en Côte d’Ivoire, qui a longtemps été leur locomotive économique, ne manquent pas non plus de perturber leurs efforts d’intégration en dépit des avancées substantielles effectuées.

Abdoulaye Wade favori pour remplacer Alpha O. Konaré

Avec leurs autres partenaires au sein de la Cedeao – Cap-Vert, Gambie, Ghana, Guinée, Liberia, Nigeria et Sierra Leone – ils doivent choisir un successeur à leur président, le Malien Alpha Oumar Konaré, qui dirige aussi l’Uemoa. Le chef d’Etat sénégalais, Abdoulaye Wade, est donné favori pour la présidence des deux organisations. Il en est de même pour le Ghanéen Mohamed Ibn Chambas, ancien secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, pour remplacer le Guinéen Lansana Kouyaté au poste de secrétaire exécutif de la Cedeao, également convoité par un candidat gambien.
La mission originelle de l’organisation était de promouvoir la coopération et le développement économiques, d’abolir à cette fin les restrictions au commerce, de supprimer les obstacles à la libre circulation des personnes, des services et des biens et d’harmoniser les politiques sectorielles régionales. L’objectif majeur étant à terme la constitution d’un vaste marché commun ouest-africain et la création d’une union monétaire pour 2004-2006. Mais les résultats obtenus ne sont pas à la hauteur des ambitions. Ainsi les pays ouest-africains de la zone Franc sont certes membres de la Cedeao, mais leur action d’intégration se déroule surtout au sein de l’Uemoa. La Cedeao dispose par ailleurs d’un Fonds de coopération et de développement destiné au financement de projets dans les pays membres les plus démunis, mais les ressources continuent à manquer.

Les axes Nouakchott-Lagos et Dakar-N’Djamena en cours de réalisation

Les conflits, en particulier celui qui oppose les pays du fleuve Mano – Sierra Leone, Liberia, Guinée – figureront en bonne place à l’ordre du jour du sommet, car l’organisation a progressivement acquis un rôle politique et une dimension militaire, notamment en se dotant d’une force d’interposition, l’ECOMOG, créée en avril 1990. Elle coopère de plus en plus avec les Nations unies et l’Union européenne, qui reconnaissent le rôle que peut jouer une telle organisation régionale dans le règlement des conflits par les Africains eux-mêmes. Les États membres souhaitent aussi mettre sur pied un Conseil de médiation et de sécurité composé de dix membres et qui fonctionnera comme l’actuel Conseil de sécurité des Nations Unies.
Selon des experts africains, la Cedeao se heurte toutefois à de nombreux obstacles : instabilité politique et mauvaise gouvernance, faiblesses des économies nationales, absence d’infrastructures fiables, non-application des décisions de la Communauté et paiement irrégulier des contributions financières.
Sur le plan économique, les résultats sont contrastés. Des progrès ont certes été accomplis au plan des infrastructures. Des routes comme les axes Nouakchott-Lagos et Dakar-N’Djamena sont en cours de réalisation et les télécommunications commencent à connaître un réel boom. Parmi les grands projets figurent aussi la construction d’un gazoduc ouest-africain qui permettra d’apporter du gaz nigérian aux voisins et l’établissement d’une union douanière entre les Etats membres.
Chambas, le candidat ghanéen au poste de secrétaire exécutif, a reconnu devant la presse ghanéenne que les conflits civils et les problèmes politiques ont détourné l’attention des dirigeants de leur tâche principale qui est l’intégration économique. Il a aussi préconisé une monnaie commune forte dans une zone qui a un panier de huit monnaies différentes, dont une seule, le franc CFA, est considérée comme solide. Cinq pays n’appartenant pas à l’Uemoa – Gambie, Nigeria, Sierra Leone, Guinée et Liberia – se sont engagés à harmoniser leurs monnaies en prélude à une monnaie commune.

Marie Joannidis





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