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22/08/2002
Infrastructures : mieux vaut utiliser des bras que des machines

(MFI) Un sigle qui fera sans doute fureur d’ici quelques années : Tup-Himo, pour travaux d’utilité publique à haute intensité de main d’œuvre. Il s’agit d’ignorer volontairement les technologies pour faire travailler des bras, chaque fois que des sommes importantes sont investies dans de grands travaux. La théorie, qui a déjà fait ses preuves ailleurs, arrive en Afrique.

Comment garantir l’emploi à une population active qui croît au rythme vertigineux de 2,6 % par an, alors que les Etats n’ont plus les moyens d’embaucher et que les entreprises privées peinent à émerger ? La solution passe peut-être par de grands travaux qui privilégient la main d’œuvre au détriment de la technologie. L’Organisation internationale du travail (OIT) et la Banque mondiale, appuyées par les ONG, font la promotion de cette stratégie dont le nom de code est donc Tup-Himo, pour travaux d’utilité publique à haute intensité de main d’œuvre.
Ce modèle économique a fait ses preuves dans le passé. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, les Etats-Unis l’avaient mis en œuvre pour relever l’Europe affaiblie par plus de cinq ans de conflit. Au milieu des années quatre-vingt, Jacques Delors, alors président de la Commission européenne, l’avait exhumé pour faire face au chômage endémique sur le Vieux continent.


Créer 30 000 emplois par an

Au tour de l’Afrique d’en faire l’expérience. Plusieurs pays testent le concept : l’Algérie, Madagascar, le Burkina ou encore le Ghana. En Algérie, un programme pilote a été initié par la Banque mondiale, pour un montant de 55,5 millions de dollars. Les investissements concernent l’agriculture, les routes et l’hydraulique. Objectif : installer des équipements dans les villes et villages, mais surtout créer 30 000 emplois par an pendant au moins deux ans. A en croire le ministère du Travail et de la protection sociale, ce programme aurait été réalisé à hauteur de 65 %. « Les populations ciblées par le programme ont été en grande partie atteintes et en ont bénéficié », assure l’expert algérien Mohamed Thaminy.
Au Ghana, les efforts se sont principalement portés sur la construction routière. Le district de Sefwi Wiawso (ouest du pays) a servi de laboratoire. La Banque mondiale et le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) ont apporté une aide financière au projet, l’OIT fournissant l’aide technique. Pour 1 190 kilomètres de routes construites ou refaites, 1,4 million de dollars de salaires ont été versés. Perte de productivité ? Non, répondent en chœur les experts de la Banque mondiale, pour lesquels « les méthodes à haute intensité de main-d’œuvre coûtent un tiers de moins que les méthodes mécanisées ».


Travail contre vivres, une formule qui marche

A Madagascar, 70 milliards de francs malgaches (11 millions de dollars) de dépenses publiques d’investissement, réalisées sous forme de travaux à haute intensité de main d’œuvre, ont généré 35 000 emplois. Les spécialistes n’ont pas manqué de comparer cette performance à celles d’investissements antérieurs, qui ont plus misé sur les moyens techniques et le productivité des machines. Résultat : utiliser des bras coûte 2,5 fois moins cher que de faire appel à des équipements sophistiqués. « De plus, note un des économistes qui a suivi le projet, l’utilisation de machines sophistiquées se traduit par une forte dégradation des finances publiques et de la balance commerciale, puisqu’il faut faire venir ces équipements d’Europe, à grands frais. »
Les institutions de Bretton Woods, qui financent beaucoup d’infrastructures lourdes en Afrique (routes, ports, chemins de fer, équipements agricoles), n’ont de cesse de sensibiliser les gouvernements à cette réalité : au lieu d’entamer une course incertaine vers la technologie, pourquoi ne pas faire d’une pierre deux coups ? Même les organismes d’aide comme le Programme alimentaire mondial (PAM) s’y mettent. Au lieu de livrer des vivres à des populations amorphes, le PAM mobilise les villageois autour de différents travaux : construction de digues, creusement de puits, plantation d’arbustes anti-érosion. Bref, c’est « vivres contre travail ».
La technique ne déplaît pas aux organismes de coopération bilatérale. Ceux de la Suisse et de la Norvège, par exemple, approuvent. Pour généraliser la méthode dans toute l’Afrique, l’OIT forme les cadres administratifs à la méthode Himo. Des séminaires ont eu lieu en Guinée, au Burkina Faso, au Mali, et en Sierra Leone. Les pays qui, à l’instar de la Côte d’Ivoire, s’étaient tenus en marge du mouvement, prennent le train en marche : il est désormais évident que lors des passations de marchés publics et à l’occasion de tout investissement lourd, il faut tenir grand compte de la dimension emploi.


Yolande S. Kouamé

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