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11/10/2002
Afrique : comment sortir du cercle vicieux de la pauvreté ?

(MFI) Des experts de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), mais aussi de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international cherchent à nouveau des remèdes à la pauvreté qui frappe des dizaines de millions de personnes à travers le continent.

Le FMI a décidé d’assouplir les règles de conditionnalité des prêts qu’il accorde en demandant aux pays bénéficiaires d’élaborer eux-mêmes, dans la mesure du possible, leurs programmes de réforme. La Banque mondiale a réitéré son plaidoyer en faveur d’une augmentation de l’aide publique au développement (APD) et les pays riches ont fait un pas de plus pour financer la réduction de la dette des pays pauvres, même si cela est encore jugé insuffisant par les Africains. Dans une étude publiée fin septembre et intitulée De l’ajustement à la réduction de la pauvreté : qu’y a-t-il de nouveau ?, la Cnuced préconise, elle, une approche plus audacieuse de la part de la communauté internationale.
Les experts de la Cnuced ont étudié le cas de 27 pays africains ayant appliqué une stratégie de réduction de la pauvreté : ils ont estimé qu’après deux décennies de programmes d’ajustement structurel, « la pauvreté a augmenté, la croissance est le plus souvent lente et erratique, les crises rurales se sont aggravées et la désindustrialisation a mis à mal les perspectives de croissance ». Ils se sont certes félicités du fait que la réduction de la pauvreté soit depuis deux ans l’objectif fondamental des programmes des institutions financières internationales. Mais ils ont souligné que toute nouvelle initiative doit s’accompagner de ressources extérieures adéquates, de mesures de réduction de la dette et d’une amélioration de l’accès aux marchés pour avoir quelque chance de réussir.

La croissance ne profite pas automatiquement aux pauvres…

La Cnuced critique l’approche fondée sur les « Documents de stratégie de réduction de la pauvreté » (DSRP), qui réaffirme la nécessité de réformes structurelles visant à accélérer l’intégration de l’Afrique dans l’économie mondiale par la libéralisation, la déréglementation et la privatisation, éléments présentés comme essentiels pour une croissance soutenue et rapide. Etant donné que la croissance ne profite pas automatiquement aux pauvres, la nouvelle approche insiste davantage sur la fourniture de services publics d’éducation primaire et de soins de santé. Elle met également l’accent sur le principe de « responsabilisation », via une large consultation de la société civile et des pauvres, afin d’éviter les « dérapages » dans l’exécution des programmes.
Cette responsabilisation semble toutefois se limiter à la conception de filets de sécurité. Pour les économistes de l’organisation, l’inflation n’est pas le principal problème dans la plupart des pays africains, et les politiques macroéconomiques devraient être articulées sur un objectif de croissance. « Lorsqu’il y a des arbitrages à effectuer entre des domaines prioritaires et des domaines non prioritaires de dépenses publiques, il faut procéder à une analyse approfondie du point de vue des incidences globales sur la croissance », disent-ils. Dans ce contexte, ils notent que les analyses d’impact social ne font pas encore partie intégrante des DSRP.

Renforcer le sens de la responsabilité politique

L’expérience en Afrique devrait inciter à la plus grande prudence, estime la Cnuced qui préconise plutôt des réformes progressives adaptées aux capacités institutionnelles, une régulation et une gestion efficaces des mouvements de capitaux, et une protection limitée dans le temps de certaines industries devant permettre d’engager un développement soutenu du secteur industriel. Pour l’organisation, un accroissement des dépenses publiques à tous les niveaux reste le moyen le plus sûr de réduire les inégalités de revenus.
La Cnuced émet par ailleurs des réserves quant à l’insistance des bailleurs de fonds sur l’amélioration de la gouvernance en tant que préalable à une croissance soutenue. « Imposer une norme institutionnelle commune à des pays dont les situations varient sera certainement contre-productif », estiment les auteurs de l’étude. Pour eux, l’idée selon laquelle lutter contre la corruption en réduisant les ressources et les responsabilités gouvernementales va entraîner les améliorations souhaitées est totalement fallacieuse. « Ce qu’il faut, affirment-ils, ce n’est pas une administration gouvernementale plus petite, mais une administration gouvernementale de qualité. » La Cnuced recommande une réduction considérable de cette « conditionnalité politique » afin de simplifier la mise en place de mesures adéquates à chaque pays et d’y renforcer le sens de la responsabilité politique. A cela doivent s’ajouter un appui international financier plus substantiel, l’amélioration de l’accès aux marchés des pays développés et une réduction plus importante de la dette qui continue à peser sur les économies africaines.

Peuples amers face à des dirigeants accrochés au pouvoir

Si les analyses de la Cnuced rejoignent celles de nombreux dirigeants africains, sur le terrain, les opinions publiques et la société civile sont moins optimistes. Les Africains sont certes conscients du problème de la dette, de la concurrence déloyale des pays riches et de l’aide au développement qui diminue. Mais ils sont de plus en plus amers face à des dirigeants engagés dans des luttes pour le pouvoir dégénérant en conflits civils, qui font revivre les vieux démons ethniques ou qui se remplissent les poches. De même, ils assistent impuissants au pillage des richesses de leur continent qui attirent les convoitises étrangères et dont ne profite qu’une élite.
Car les hordes d’affamés ou de réfugiés, sans parler des victimes des combats ou du sida, sont bien loin des considérations stratégiques qui agitent les enceintes internationales du développement. Ils attendent, comme on peut le constater sur place, le respect de la dignité humaine qui passe par un environnement pacifique dans lequel ils peuvent se nourrir, avoir de l’eau potable et de l’électricité, se soigner et travailler. Car si dans les pays riches le nombre des exclus des bienfaits de la mondialisation ne cesse de croître, dans les pays pauvres, surtout en Afrique, ils forment la majorité.

Marie Joannidis

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