|
|
18/10/2002
|
Commerce : les foires africaines séduisent
|
(MFI) Véritables baromètres de la vie des affaires, les foires, salons et expositions donnent la mesure de l’intérêt que les investisseurs portent au continent noir, un marché que l’on dit peu solvable mais qui compte néanmoins plusieurs centaines de millions d’acheteurs potentiels.
|
Qui connaît Brazafric, sur le continent ? Cette société brésilienne, qui fabrique des moulins à café, ne se fait aucune illusion sur sa notoriété. Pour acquérir une réputation en Afrique de l’Est, Brazafric a loué un stand à la foire internationale d’Ouganda qui vient de fermer ses portes. Santa Maria, autre entreprise brésilienne spécialisée dans l’équipement de la maison, a fait le même calcul. Tout comme des firmes grecques et norvégiennes, qui ont voulu profiter de cette énorme vitrine constituée par 550 exposants venus de 32 pays, et devant laquelle ont déambulé 200 000 visiteurs. Bilan : des contacts avancés avec des distributeurs locaux intéressés.
Botswana, Malawi, Maroc, Sénégal, Burkina Faso, Tanzanie, Kenya, Afrique du Sud… Quel pays africain n’a pas aujourd’hui sa foire internationale ? En plus des manifestations généralistes destinées à attirer des hommes d’affaires de tous horizons, on assiste à la multiplication des salons spécialisés : le cuir à Ouagadougou et Casablanca, le textile au Cap, l’horticulture à Harare, le livre à Alger et Bulwayo. Les foires, salons et expositions donnent la mesure de l’intérêt que les investisseurs portent au continent noir, un marché que l’on dit peu solvable mais qui compte néanmoins plusieurs centaines de millions d’acheteurs potentiels.
Réunions multi ou bi-latérales
Ce sont les pays émergents et les petits pays occidentaux qui accordent le plus d’importance aux shows commerciaux africains. Exemple : les exportateurs de la région canadienne de l’Ontario. Intéressés par l’Afrique australe, ils sont « abonnés » aux principales manifestations commerciales en Afrique du Sud. « Cela permet aux sociétés ontariennes de faire valoir leurs produits, services et expertises auprès des entreprises africaines. De plus, de tels liens internationaux laissent entrevoir de nouveaux investissements dans notre pays et sont susceptibles de créer des emplois de part et d’autre », explique un ministre de la province de l’Ontario.
Autre exemple : les Emirats arabes unis. Grâce à une fréquentation assidue de Dar Es Salaam international trade fair, des fabricants de pneus, de matériel électrique, de matériaux de construction des Emirats ont fait une entrée impressionnante sur les marchés de Tanzanie, d’Ouganda, du Burundi, du Rwanda et du Congo. Une percée qui n’a pas laissé inertes les concurrents pakistanais, indiens et européens qui dominaient le marché. Résultat : ils ont aussi accru leur participation à la foire de Zanzibar, qui attire chaque année 1000 entreprises.
Certains pays n’hésitent pas à organiser des « foires bilatérales », limitées à leurs propres hommes d’affaires et ceux d’un pays partenaire, à l’abri des concurrents. C’est le cas du Japon, qui a institué une foire entre l’Archipel et les pays de la South africa development community (SADC). C’est aussi le cas de la Chine, qui a créé une foire sino-mauricienne. Il est vrai que les échanges entre ces deux pays ont atteint 600 millions de dollars l’année dernière.
Favoriser les exportations africaines
Pour autant, les foires africaines ne sont pas au service exclusif des hommes d’affaires étrangers. Elles donnent aussi l’occasion aux entreprises locales de se faire connaître, aussi bien des clients nationaux que d’éventuels importateurs venus d’ailleurs. Ainsi, c’est à l’occasion de la dernière foire internationale de Lagos que des congélateurs et réfrigérateurs made in Nigeria ont fait leur apparition sur le marché local. Dan Ultimate Industries (DUI), basée à Ibadan, a dévoilé une gamme d’une douzaine d’appareils vendus sensiblement moins chers que ceux importés. « Surtout, ils ne connaîtront pas de problèmes de pièces détachées », souligne Idowu Asaju, le directeur général de DUI, qui compte bien trouver des distributeurs dans les pays voisins.
En Afrique australe, il n’est plus une foire régionale où les industriels sud-africains ne tiennent stand : banquiers, assureurs, fabricants de textiles, de chaussures sont sur tous les fronts. Autre grand pays industriel africain, l’Egypte écume les manifestations commerciales du continent noir. Ses points forts : les appareils de transformation textile, la pharmacie et l’équipement médical.
Des professionnels des salons apparaissent
Pour accélérer les échanges entre entreprises africaines, des shows commerciaux sous-régionaux ont vu le jour, sous la houlette des Cedeao, Comesa, SADC et même OUA. Certes, les discours officiels y prennent souvent plus de place que le langage des affaires, et les tracasseries administratives « douchent » parfois l’enthousiasme des exposants. Comme à la dernière foire commerciale de l’OUA, organisée au Caire il y a quelques mois. Les autorités locales avaient tout simplement décidé de… taxer les marchandises devant être exposées. Motif : « Les exposants ne prennent pas seulement des commandes, ils vendent également sur place. Cela ne doit pas se faire au détriment des finances publiques égyptiennes. » Résultat : des stocks saisis, des stands vides pendant plusieurs jours, un imbroglio politico-juridique, une prolongation de la foire et pour finir, la lassitude des exposants et des visiteurs.
Il n’empêche, ces couacs ne freinent pas l’essor des foires. Preuve de leur vigueur : à côté des organismes officiels (chambres de commerces, organisations professionnelles, ministères du commerce), on voit apparaître les premières sociétés privées africaines spécialisées dans l’organisation de foires et salons. A l’instar de Exhibition managements services (EMS) basée en Afrique du Sud. De leur côté, les géants européens du secteur commencent à se pencher sur ce marché naissant, décidément prometteur.
|
Yolande S. Kouamé
|
|
|