accueilradio  actualités  musique  langue française  presse  pro
radio
Liste des rubriques
MFI HEBDO: Education Liste des articles

17/06/2005
Un « plan Marshall » pour sauver les universités publiques africaines

(MFI) Des voix s’élèvent pour demander à l’Organisation des Nations unies (Onu) de lancer une « décennie de l’enseignement supérieur » en Afrique au sud du Sahara. Pour de nombreux experts en effet, seul un engagement international fort est susceptible de sortir les universités publiques de la crise dans laquelle, faute d’argent, elles sont empêtrées depuis plusieurs années.

Pour Georges Haddad, c’est une urgence : repenser l’université africaine dans son rôle socio-économique, en général, et dans ses méthodes de financement, en particulier. Le directeur de la Division de l’enseignement supérieur de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) pense que cela ne peut se faire que sous l’égide de l’Onu. « Même si, à la base, un travail sérieux de préparation doit être effectué au niveau de chaque pays africain, la communauté internationale a un rôle central à jouer dans la recherche des remèdes aux maux qui minent les universités publiques sur le continent, affirme-t-il. Le rôle de l’Onu pourrait consister à décréter une décennie de l’enseignement supérieur en Afrique ; l’occasion de passer en revue tous les problèmes de fond auxquels ces institutions sont confrontées, et de proposer des solutions viables contenues dans un engagement international, qui s’apparenterait à un plan Marshall. »

L’enseignement supérieur n’est pas un luxe pour l’Afrique

Cet engagement devrait consister notamment dans l’octroi, par les pays riches et les institutions financières internationales, de fonds aux Etats africains qui manifestent la ferme volonté de redresser leur enseignement supérieur. Gérés sous le contrôle de personnes ou de structures indépendantes, ces fonds devraient servir à financer la formation, la recherche et le développement. « L’idéal, c’est d’avoir en Afrique un enseignement supérieur efficace, c’est-à-dire un bien public de qualité à travers un service public de qualité, souligne Georges Haddad. Pour cela, la solidarité internationale envers l’Afrique doit être très forte. »
Une telle solidarité ne peut se manifester franchement qu’à deux conditions. D’abord, si, au plan international, l’on cesse de considérer l’enseignement supérieur comme un luxe pour les pays africains. Ensuite, si les institutions financières internationales recommencent à considérer cet ordre d’enseignement comme une priorité. « L’Afrique ne peut pas préparer son avenir sans un enseignement supérieur fort, soutient l’expert de l’Unesco. Si la communauté internationale ne se mobilise pas très rapidement, l’Afrique sera condamnée. »
La mobilisation internationale s’impose pour deux raisons. Nombre de pays en Afrique au sud du Sahara, ne présentant plus guère de garanties de stabilité politique, ont cessé d’être crédibles. Le déficit démocratique les fragilise. « A cause de cette fragilité, leurs gouvernements ne peuvent pas négocier avec succès de l’investissement lourd pour l’enseignement supérieur ; les investisseurs internationaux refusent de mettre de l’argent dans des équipements ultra-sophistiqués et coûteux comme des laboratoires, car ils ont peur de voir ces équipements partir en fumée à la suite d’une guerre civile ou d’un putsch », explique Georges Haddad. Deuxième raison : le manque d’intérêt des responsables africains pour l’enseignement supérieur dans leurs propres pays. Une bonne part d’entre eux s’investiraient peu dans la valorisation des universités publiques, parce que leurs enfants n’y seraient pas inscrits. « Ils envoient leurs enfants étudier dans les meilleures universités occidentales, grâce à l’argent destiné à équiper les universités d’Etat en Afrique », accuse un leader étudiant camerounais.

A l’université de Yaoundé I, il y a 660 lits pour 23 000 étudiants

Les universités publiques africaines sont malades. Elles souffrent de plusieurs maux dont le plus grave est le manque d’argent. C’est le principal enseignement que l’on peut tirer des périodes de forte tension traversées, ces derniers mois, par nombre d’établissements dans plusieurs pays. Au Cameroun, les étudiants des six universités d’Etat ont manifesté, en avril et mai, pour réclamer l’amélioration de leurs conditions de vie et d’études. Après la mort de deux étudiants, tués par la police à l’université de Buea, en zone anglophone, le président de la République Paul Biya a ordonné le déblocage de près de cinq milliards de francs Cfa au profit des universités. Une somme jugée dérisoire au regard de l’immensité des problèmes qui se posent. Par exemple, à l’université de Yaoundé I, il y a 660 lits pour 23 000 étudiants ; à Douala, la cité universitaire compte 330 lits pour 20 000 étudiants.
Le Cameroun n’est pas le seul théâtre de mouvements étudiants en Afrique depuis le début de l’année. Le Gabon, le Sénégal, le Bénin, la Guinée, la Côte d’Ivoire, pour ne citer que ces pays francophones, ont aussi été confrontés durement au mouvement d’humeur de la part des étudiants ou des enseignants-chercheurs. Dans tous ces Etats, les motifs des grèves se résumaient au manque d’argent. S’il y a en Afrique un moment où l’adage « l’argent, c’est le nerf de la guerre » prend tout son sens, c’est bien au cours de ces périodes d’agitation étudiante.

Gervais Nitcheu

retour

Qui sommes nous ?

Nos engagements

Les Filiales

RMC Moyen Orient

Radio Paris-Lisbonne

Delta RFI

RFI Sofia