(MFI) Plus de 100 millions d’enfants ne sont pas scolarisés dans le monde. Selon un rapport de l’Unesco, au moins 32 pays risquent de ne pas atteindre l’objectif de l’enseignement primaire universel d’ici à 2015. La situation de l’Afrique sub-saharienne reste particulièrement préoccupante.
En avril 2000, 164 pays se sont engagés en faveur de l’Education pour tous lors du Forum mondial sur l’éducation, réuni par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) à Dakar, au Sénégal. Plusieurs objectifs y avaient été fixés à l’horizon 2015 : la réalisation de l’enseignement primaire universel, l’élimination des disparités entre les sexes dans le primaire et le secondaire, l’amélioration de 50 % des niveaux d’alphabétisation. Dans un rapport de suivi, l’organisation internationale fait un premier bilan des progrès accomplis.
Les capacités d’accueil dans le primaire se sont considérablement accrues dans le monde au cours des dernières décennies. Les résultats diffèrent toutefois de façon importante suivant les régions. En dehors des pays développés et en transition qui ont d’ores et déjà réalisé la scolarisation universelle dans le primaire, l’Asie de l’Est, l’Océanie, l’Amérique latine et les Caraïbes se rapprochent désormais de cet objectif. Aujourd’hui, 95 % des enfants non scolarisés vivent en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et dans les Etats arabes : dans ces régions, explique le rapport, une forte croissance démographique n’a pas permis d’amélioration notable en la matière malgré l’augmentation des effectifs scolaires.
Scolarisation primaire universelle en 2015 : un véritable défi pour certains pays
Pour parvenir à l’enseignement primaire universel en 2015, il faudrait que les écoles des pays en développement accueillent environ 156 millions d’enfants de plus qu’en 1997, ce qui représente un accroissement de 27 %. Chaque année, 8,7 millions d’élèves supplémentaires en moyenne devraient ainsi être scolarisés. C’est en Afrique sub-saharienne que l’effort à fournir se révèle le plus important, relevant même du défi, puisque, comme le note le rapport, cette région « devra trouver plus de la moitié des places supplémentaires requises dans les écoles de la planète (c’est-à-dire scolariser plus de 88 millions d’enfants en plus d’ici 2015). Cela correspond à une augmentation de près de 150 % par rapport aux effectifs en 1997, ou à un accroissement annuel de 4,9 millions d’élèves – ce qui équivaut à tripler l’effort consenti durant la période 1990-1997. »
Au sein même de cette région, les situations sont très variables : certains pays, comme le Bénin et la Guinée-Bissau, ont déjà obtenu des progressions sensibles de leurs effectifs en primaire, d’autres même, tels l’Ouganda, le Malawi ou la Mauritanie, grâce à un doublement de leurs effectifs en cinq ans, approchent ou atteignent des taux brut de scolarisation de 100 %. Pour un certain nombre en revanche, Angola, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Niger ou Somalie, ce sont des efforts plus que décuplés qui seront nécessaires pour atteindre l’objectif fixé à Dakar.
8 à 15 milliards de dollars de plus par an
Aujourd’hui, 60 % des enfants non scolarisés sont des filles. Ainsi que le remarque le rapport, « c’est dans les régions ou pays ayant des taux de scolarisation relativement faibles que les disparités entre les sexes sont les plus accusées ». Effectivement, sur les 17 pays dont les taux de scolarisation des filles sont les plus bas au monde (6 à 8 filles scolarisées pour 10 garçons), trois sont des Etats arabes, tous les autres se situent en Afrique sub-saharienne (1).
Note optimiste, les auteurs du rapport estiment que « l’enseignement primaire universel est, sur le plan financier, chose faisable. » Les estimations des ressources supplémentaires nécessaires pour le réaliser varient entre 8 et 15 milliards de dollars par an, ce qui, soulignent-ils, « représente moins de 0,3 % du PNB total des pays en développement, 0,06 % du PNB total des pays développés et 0,05 % du PNB mondial ».
L’amélioration de 50 % des niveaux d’alphabétisation des adultes d’ici 2015 représente aussi un défi non négligeable. On compte aujourd’hui dans le monde encore plus de 550 millions de femmes et 300 millions d’hommes analphabètes. Pour atteindre l’objectif fixé à Dakar, il faudrait que le nombre d’adultes alphabètes augmente chaque année de 92 millions, ce qui représente une augmentation totale de 1,4 milliard. En Afrique sub-saharienne par exemple, il faudrait alphabétiser plus de 210 millions d’adultes d’ici 2015 (14 millions chaque année).
Catherine Le Palud
(1) Burkina Faso, Burundi, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Mozambique, Niger, République centrafricaine, Sénégal, Tchad, Togo.