(MFI) Que se passe-t-il dans la tête d’un enfant qui décrète qu’il n’aime pas l’école ? Dans son dernier ouvrage, la psychanalyste Christiane Olivier décrypte les mécanismes à l’origine de ce blocage et souligne que les parents contribuent pour beaucoup à l’adaptation de l’enfant à l’environnement scolaire.
Si certains spécialistes parlent du « métier d’élève », c’est pour mieux souligner que cela s’apprend. Or, cet apprentissage ne va pas de soi pour tous les enfants : certains ne parviennent pas à se conformer à ce que l’école attend d’eux. Qu’il s’agisse d’enfants trop craintifs, renfermés sur eux-mêmes, voire absents, ou au contraire instables, dissipés ou même violents, leur comportement est inadapté et ne leur permet pas de profiter pleinement de l’enseignement dispensé. De ce malaise naît le rejet de l’école.
Dans la plupart des cas pourtant, les capacités intellectuelles de l’enfant ne sont pas en cause : très souvent, il s’agit plutôt, selon Christiane Olivier, de problèmes d’ordre psychologique ou affectif. C’est pourquoi la psychanalyste insiste, dans son petit livre Il n’aime pas l’école, sur le rôle des parents dans la préparation de l’enfant à sa vie scolaire. Elle explique ainsi que l’éducation donnée à la maison et le type de relations que les parents tissent avec leur enfant influent considérablement sur sa capacité d’adaptation.
Ainsi, la séparation d’avec le cocon familial est particulièrement difficile à vivre pour un enfant surprotégé par ses parents qui lui ont évité toutes contraintes et frustrations en satisfaisant chacun de ses désirs. Il importe donc, conseille l’auteur, dès les premières années de l’enfant, d’encourager sa quête de l’autonomie : dès qu’il en est capable, le laisser par exemple s’habiller seul, manger sans aide et le faire participer à la vie familiale en lui donnant de petites responsabilités à sa portée.
Le désir de savoir naît à la maison
« Les parents qui jugent l’enfant « trop petit » pour les aider ne lui rendent pas service, estime Christiane Olivier. Ils le cantonnent dans la petite enfance, ce qui l’empêche de devenir par la suite un sujet éveillé en classe, faute d’initiative et de compréhension des choses : si l’enfant n’a pas l’habitude de se débrouiller seul, comment se débrouillerait-il au milieu de trente autres enfants ? » Il faut donc aussi que les parents acceptent de voir leur enfant grandir et l’aident en ce sens…
Ils ont également une influence considérable sur l’envie d’apprendre de leur enfant. « Le goût d’apprendre vient [des parents] alors que la façon d’apprendre vient de l’école, écrit Christiane Olivier. Aucune façon d’apprendre n’est adaptée à qui ne « veut » apprendre… » Or, ce désir de savoir et de comprendre, qui est souvent le préalable de l’épanouissement de l’enfant à l’école, se développe très tôt. Comment ? En l’intéressant au monde qui l’entoure dès son plus jeune âge : « Il faut lui expliquer toute chose aussi tôt que possible, avec des mots simples », indique la psychanalyste, et ne pas craindre d’aborder certains sujets qui peuvent sembler délicats, tels que la naissance ou la mort, sous prétexte que l’enfant est trop jeune. Car « plus il sait de choses, plus il se sent capable de maîtrise sur le monde […], plus il est mûr pour aller à l’école… »
Evitez de critiquer l’école devant votre enfant
La scolarité d’un enfant peut également être perturbée lorsque les parents, de façon inconsciente, reportent leurs propres frustrations d’écoliers. C’est ainsi que certains règlent leurs comptes avec l’institution scolaire par l’intermédiaire de leur enfant, ou attendent de celui-ci qu’il leur offre une revanche sur leurs propres échecs. Or, la confiance des parents dans l’école et la sérénité de leurs rapports avec les enseignants sont indispensables à l’épanouissement scolaire de l’enfant. Il est donc important de toujours parler de l’école en termes positifs devant lui. Lorsque des désaccords existent, il est préférable d’en discuter avec l’enseignant plutôt que d’en parler à son enfant.
Toute vie d’écolier a ses hauts et ses bas, sans qu’il faille s’affoler à la moindre baisse de régime… Certaines situations en revanche exigent la plus grande attention des parents, quand par exemple, un enfant qui débute bien une année scolaire, manifeste soudain une indifférence totale vis-à-vis de l’école, ne fournissant plus aucun effort. Ce type de blocage scolaire exprime souvent un malaise, un sentiment d’impuissance face à une situation qui le fait souffrir ; il peut s’agir d’un deuil ou de la maladie d’un proche, de conflits familiaux ou du divorce des parents… Il est alors important de prendre le temps de parler avec l’enfant, de répondre à ses questions sans éluder les problèmes et surtout d’éviter les mensonges. Car, prévient Christiane Olivier, « on peut enrayer la logique d’un enfant par nos mauvaises réponses de parents ». Des parents qui risquent alors d’être « bien innocemment à l’origine de la fermeture de l’enfant et de son manque de curiosité à l’école » . Une façon de rappeler que les problèmes scolaires ne sont pas que des problèmes d’école…
Il n’aime pas l’école, par Christiane Olivier, éditions Fayard.
Catherine Le Palud