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08/05/2003
Les enseignants de plus en plus démotivés

(MFI) La baisse de la qualité de l’éducation en Afrique subsaharienne est étroitement liée au faible nombre d’enseignants. La demande en nouveaux professeurs continue donc à être très forte, mais les candidats sont peu nombreux.

Selon les statistiques de la population en âge d’être scolarisée, publiées en avril 1999 par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), en Afrique subsaharienne, le nombre des enseignants du primaire a augmenté de 16,9 %, et celui des enfants en âge d’être scolarisés de 16,2 % entre 1990 et 1995. Le même rapport indique que, dans le secondaire, on a noté une hausse du nombre de professeurs de 12 % et une augmentation de 13,8 % de celui des jeunes à scolariser.
En clair, à cette période, l’on observait déjà que, dans ces pays, d’une part, l’augmentation du nombre d’enseignants du primaire équivalait, en moyenne, à celle du nombre d’enfants à prendre en charge. Et, d’autre part, que la hausse du nombre de professeurs du secondaire était inférieure à celle du nombre d’enfants en âge de « fréquenter » dans le secondaire. Aujourd’hui, la situation se serait exacerbée, les écarts se seraient davantage creusés. Le ratio entre la population des enfants en âge de suivre l’enseignement primaire ou secondaire et les enseignants serait très élevé. Dans de nombreux pays, il atteindrait facilement 70 pour 1, soit 70 élèves pour un enseignant.

Des « salaires de misère »

A l’origine de ce phénomène, plusieurs facteurs, liés pour l’essentiel aux conditions de vie des enseignants. Celles-ci se sont considérablement dégradées. Le temps de travail dépasse parfois quarante heures par semaine. « C’est d’autant plus pénible que nous effectuons un travail intellectuel intense », affirme Louison, un enseignant syndicaliste camerounais. Et Maurice, un professeur de Libreville, d’expliquer : « Quarante heures de cours par semaine équivalent à au moins quatre-vingt heures de recherches.» Pour l’un comme pour l’autre, c’est énorme. En Afrique, en général, les heures d’enseignement sont nombreuses « parce que, expliquent de nombreux experts, les pouvoirs publics souhaitent optimiser le rendement des coûts élevés de la formation des enseignants aux plus hauts niveaux d’éducation ». La pénibilité de l’activité enseignante expliquerait donc le peu d’engouement manifesté, ces dernières années, pour la profession.
Autre facteur non moins négligeable : la faible rémunération. A cause du marasme économique qui mine, depuis la fin des années quatre-vingts, nombre de pays au Sud du Sahara, les salaires des professeurs de lycée et collège et ceux des maîtres d’école primaire n’ont cessé de décroître. « Les gouvernements nous imposent une charge de travail considérable ; mais le salaire, lui, diminue », observe Diouf, un enseignant sénégalais. Et Komlan, à Lomé, de renchérir : « Aujourd’hui, nous touchons des salaires de misère. » Pour tous, les bas salaires constituent un élément de démotivation. Certains jettent l’éponge au bout de quelques années de carrière. « L’enseignement est devenu pire que le sacerdoce », déclare Jean-Luc, un enseignant béninois, qui vient de déposer la craie. Aujourd’hui, il travaille comme courtier d’assurance. « Les commissions que je perçois en un mois représentent trois mois de salaire de prof », souligne-t-il. D’autres poursuivent leur carrière d’enseignant, mais exercent parallèlement une activité rémunératrice, pour arrondir leurs fins de mois.

Baisse de la qualité de l’éducation

L’une des conséquences directes de la dégradation généralisée des conditions de travail des enseignants est la multiplication des grèves dans l’Education nationale. Celles-ci seraient en nette augmentation. « Dans la plupart des pays, l’on enregistre au moins trois grèves nationales par trimestre », fait remarquer Mahamat. Et le syndicaliste tchadien d’ajouter : « Généralement, nous appelons à la grève pour demander aux pouvoirs publics d’améliorer notre condition ; comme ils sont sourds à nos revendications, nous sommes obligés de débrayer plusieurs fois dans l’année. » Les élèves sont les principales victimes de ces grèves à répétition. Les programmes scolaires ne sont pas bouclés. Les résultats aux examens et concours officiels sont catastrophiques.
« Les enfants des pauvres en souffrent énormément ; ceux des riches étudient dans les pays développés », regrette, la mort dans l’âme, Emile, syndicaliste congolais. « Mais nous n’avons pas le choix, la grève reste notre seule arme. » Depuis le début des années quatre-vingt-dix, de nombreux pontes et dirigeants africains préfèrent envoyer leurs rejetons en Europe et aux Etats-Unis, plutôt que de peser de tout leur poids chez eux pour que les conditions de vie et de travail des enseignants s’améliorent. Adoptée par une conférence intergouvernementale spéciale tenue à l’initiative conjointe de l’Unesco et de l’Organisation internationale du travail, la recommandation concernant la condition du personnel enseignant souligne en effet l’interdépendance entre celle-ci et la situation de l’éducation.

Gervais Nitcheu

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