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26/09/2003
Contre les mines et les armes à sous-munitions

(MFI) La mobilisation internationale contre les mines antipersonnel ne faiblit pas, alors que les trois quarts des pays de la planète ont signé le traité d’Ottawa (1997) les interdisant. La question des armes à sous-munitions, dont les dégâts sont similaires à ceux causés par les mines, est désormais également inscrite sur l’agenda des militants.

« Les mines, c’est la guerre après la guerre, ça interdit toute reconstruction. C’est ça l’insupportable », s’indigne le cinéaste Pierre Jolivet, réalisateur du film de la campagne 2003 de Handicap International. L’ONG française, membre du réseau International campaign to ban landmines (ICBL), a présenté, au début du mois de septembre à Paris, le rapport 2003 de l’Observatoire des mines, Vers un monde sans mines. Il en était de même, au même moment, dans 16 pays de par le monde. Car les 1 400 associations et ONG que compte le réseau mondial sont sûres d’une chose : le traité d’Ottawa interdisant la production, la vente et l’utilisation des mines antipersonnel resterait lettre morte si la pression n’était pas maintenue. « Il faut suivre l’application qu’en font les Etats signataires, sinon cela ne vaut rien », souligne Philippe Chabasse, co-directeur de Handicap International (HI).
La mobilisation politique continue donc, sous la houlette d’ICBL et de son Observatoire, afin d’obtenir l’adhésion de tous les pays de la planète au traité d’Ottawa (1997) et son application rigoureuse par les Etats parties. Près de 150 Etats ont aujourd’hui signé le traité – 12 d’entre eux ne l’ont pas encore ratifié – : l’interdiction concerne donc les ¾ de la planète, mais sur les 47 pays non-signataires, on compte quand même les Etats-Unis, la Chine et la Russie… Pour maintenir la pression, une manifestation militante a lieu le 4 octobre – dans 30 villes en France et au Luxembourg – sur le thème « Déminage après la guerre : une question de vie ou de mort ». Les fameuses pyramides de chaussures (le public est invité à venir déposer une ou des chaussures en tas dans un endroit précis) devraient à nouveau illustrer l’impossibilité de marcher qui frappe les victimes des mines antipersonnel qui, quand elles en réchappent, perdent souvent une ou les deux jambes…


Financements en hausse grâce au Japon

Le rapport présente les chiffres clés pour la période de mai 2002 à mai 2003. Plus de 80 pays sont aujourd’hui pollués et on estime de 15 à 20 000 en moyenne le nombre de nouvelles victimes par an. En 2002, ce chiffre a connu un léger recul (11 700 nouvelles victimes recensées), mais dans certains pays ce chiffre a augmenté. Par exemple au Cambodge, à la suite d’importants mouvements de population. Seules 15 % des victimes identifiées en 2002 appartenaient au personnel militaire. En outre, les victimes s’accumulent d’une année sur l’autre : cinq ou dix ans plus tard, les personnes handicapées ont toujours besoin d’aide.
L’augmentation en 2002 du financement des actions contre les mines a permis de multiplier sur le terrain les programmes – sensibilisation des populations, déminage et aide aux victimes. Mais cette augmentation est due pour moitié à un seul donateur, le Japon (à 49,4 millions de dollars), alors que dans le même temps certains autres donateurs ont réduit leur contribution (Etats-Unis moins 5,5 millions de dollars, Danemark moins 3,8 millions, Suède moins 2,6 millions et Royaume-Uni moins 1,4 million de dollars). La France, qui avait pour le triennum 2000-2002 un programme conséquent sous forme de Fonds de solidarité prioritaire, n’a pas épuisé tous les crédits, de sorte que le Fonds n’a pas pu être réapprovisionné sur 2003, et il n’est pas encore sûr qu’une ligne budgétaire soit ouverte sur 2004.


Les groupes rebelles aussi s’engagent

Depuis 1997, les progrès sont cependant notables. Il reste moins de 15 pays producteurs de mines antipersonnel (AP) contre environ 50 il y a encore dix ans. On a constaté un arrêt quasi total du commerce officiel. Depuis 1997, plus de 50 millions de mines AP ont été détruites ; même des pays non-signataires – la Russie par exemple – détruisent leurs stocks. Certes, il en reste encore plus de 200 millions (110 millions en Chine, 50 millions en Russie, 10,4 millions aux Etats-Unis ou 1 million en Grèce…). Un seul nouvel utilisateur, l’Irak, est venu s’ajouter à la liste des gouvernements posant des mines, et qui comprend notamment l’Inde, le Pakistan, le Népal et la Russie. Selon certaines allégations, le Burundi et le Soudan, pourtant signataires du traité d’Ottawa, ont disséminé des mines antipersonnel, ce que les deux gouvernements démentent.
Face aux autorités reconnues, qu’en est-il des groupes rebelles et autres guérilleros ? Devant la nécessité de convaincre ces acteurs non-étatiques de s’engager à renoncer aux mines AP, malgré leur incapacité juridique à signer un traité, certains membres de l’ICBL ont mis en place, en 2000, l’Appel de Genève : cette association humanitaire internationale a pour objectif d’amener les groupes non-étatiques à renoncer à l’utilisation des mines. Au 1er juin 2003, plus de vingt de ces mouvements ont signé l’Appel de Genève – dont, pour l’Afrique, des groupes actifs au Cabinda/Angola, au Soudan, au Sahara occidental/Maroc et en Somalie. Leurs engagements, écrits, sont déposés auprès des autorités du canton suisse.


Les « bombes cargo » couvrent une zone plus large

Tout en poursuivant le combat pour l’éradication complète des mines antipersonnel, Handicap International a décidé de s’engager, avec d’autres associations, dans une nouvelle bataille, celle contre les résidus explosifs de guerre et particulièrement contre les sous-munitions non-explosées. HI a donc rendu public, en même temps que le Landmine Monitor 2003, son premier rapport sur les systèmes d’armes à sous-munition. De quoi s’agit-il ? Une arme à sous-munitions est constituée d’un conteneur (qui pourra être largué par voie aérienne ou envoyé comme un obus par un mortier, un lance-roquette ou un véhicule blindé) rempli de petites bombes, les bomblets – le conteneur en porte d’un dizaine à plusieurs centaines.
Utilisées depuis longtemps, ces armes voient aujourd’hui leur emploi se généraliser : moins précises mais plus efficaces que les bombes uniques, ces « bombes cargo » couvrent une zone plus large. Elles ont été largement employées au Kosovo (1999), en Afghanistan (2001-2002) et en Irak (1991 et 2003). En raison du rapport coût/« efficacité » et de leur impact psychologique, ces systèmes équipent les armées d’un nombre croissant de pays.


La responsabilité des politiques et des militaires

Le problème est que certaines bomblets arrivent au sol sans exploser – certaines sous-munitions sont d’ailleurs même conçues pour n’exploser qu’avec retard. Selon les simulations en laboratoire des militaires, le pourcentage de ces ratés n’excèdent pas 2 à 5 %. Mais sur le terrain, les associations ont relevé des pourcentages de sous-munitions non explosées jusqu’à cinq fois supérieurs. De formes variées, intrigantes, ces bomblets attirent l’œil et la curiosité des enfants ou des récupérateurs de métal et provoquent les même drames que les mines antipersonnel.
« Sans même parler du bien-fondé de tel ou tel conflit, il est de la responsabilité des politiques et des militaires de ne pas utiliser tout et n’importe quoi. Il y a une responsabilité quant aux outils employés », a souligné Philippe Chabasse en présentant le rapport. Rien qu’à Bagdad, plus de 200 sites – dont certains présentent une densité de population élevée – pollués par ces sous-munitions ont été répertoriés en 2003. Pour en dépolluer un seul, des semaines de travail seront nécessaires… D’où l’importance d’élargir la mobilisation internationale.


Ariane Poissonnier

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Pour en savoir plus :

Handicap International
www.handicap-international.org


International campaign to ban landmines
www.icbl.org


Geneva Call (Appel de Genève)
www.genevacall.org

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