accueilradio  actualités  musique  langue française  presse  pro
radio
Liste des rubriques
MFI HEBDO: Politique Diplomatie Liste des articles

18/03/2005
Togo : les enjeux pour la France

(MFI) C’est le nouveau casse-tête pour la politique française en Afrique, déjà malmenée à propos de la Côte d’Ivoire. Autour de la succession mouvementée du général Eyadéma, les critiques ont fusé de toutes parts, relayées par les médias africains et les ONG qui reprochent à Paris à la fois d’en faire trop et pas assez, et de ne pas réussir à rompre avec un passé d’amitiés particulières et de réseaux.

Le message de condoléances du président français Jacques Chirac à l’annonce de la mort de Gnassingbe Eyadema, le 5 février 2005, après un règne sans partage de 38 ans, parlant d’ «un ami de la France » et d’un « ami personnel », a suffi pour mettre le feu aux poudres. La France a ensuite été accusée de rester en retrait et de se montrer bien prudente après le coup de force du fils du président défunt, Faure Gnassingbe. On tient cependant à souligner à Paris que la France s’est clairement prononcée pour la légalité constitutionnelle et le respect des règles démocratiques et qu’elle s’est immédiatement rangée, avec ses partenaires de l’Union européenne, derrière la CEDEAO et l’Union africaine, tout en oeuvrant « discrètement » pour désamorcer la crise.

« On nous a fait un procès d’intention »

La crise de succession togolaise a mobilisé la communauté internationale, notamment en Afrique, mais aussi jusqu’aux Etats-Unis. On rappellera que les instances africaines, Cedeao en tête, ont réussi à obtenir la démission, le 25 février, de Faure Gnassingbé, sans toutefois l’écarter des futures élections, toujours programmées le 24 avril, où il est candidat pour le Rassemblement du peuple Togolais (RPT, parti présidentiel fondé par son père). Le chef de la diplomatie française, Michel Barnier, venu représenter son pays aux obsèques d’Eyadema a résumé à Lomé la position officielle de Paris. « Le Président Eyadéma tenait une place importante, non seulement pour le Togo mais pour l’Afrique ; donc sa disparition est un événement important, et aujourd’hui c’est tout naturellement le deuil et par ma présence la France voulait dire au peuple du Togo que nous étions toujours et que nous resterions dans cet élan de solidarité et d’amitié », a-t-il déclaré sur Radio France Internationale. « Cette disparition a ouvert il y a quelques semaines une période de transition et depuis le début de cette période de transition nous avons été aux côtés de la Cedeao (qui) a fait des efforts pour que celle-ci se passe dans le respect de la constitution et aboutisse à des élections présidentielles et des élections législatives démocratiques. C’est d’ailleurs une condition – la bonne transition démocratique – pour que l’Union européenne reprenne totalement ses relations avec le Togo, comme nous-mêmes nous le souhaitons », a-t-il ajouté.
Pour bien montrer que la France ne prenait pas position, le conseiller Afrique du président français Jacques Chirac, Michel de Bonnecorse, a rencontré à Lomé, quarante huit heures avant les obsèques, plusieurs responsables de l’opposition togolaise, au moment où celle-ci se cherchait un candidat unique pour s’opposer à Faure Gnassingbe. De sources diplomatiques à Paris, on estime que le jeu reste ouvert, en observant que l’Union des forces de changement (UFC), le principal parti d’opposition dirigé par Gilchrist Olympio (inéligible selon les termes de la constitution, qui n’a pas été réformée sur ce point), est populaire à Lomé et dans une partie du sud du pays, mais que le parti présidentiel domine dans le nord, l’opposition modérée, représentée notamment par Edem Kodjo, n’ayant pas jusqu’à présent une grande assise populaire.
« Comme en Côte d’Ivoire où nous étions les seuls à intervenir pour éviter une guerre civile, on nous a immédiatement fait un procès d’intention à Lomé », entend-on déplorer à Paris, où l’on tient à préciser à propos de l’amitié personnelle nouée entre Jacques Chirac et Gnassingbe Eyadema remonte à l’époque où ils s’étaient connus sur le terrain, pendant la guerre d’Algérie. On rappelle aussi que l’ancien chef d’Etat togolais a non seulement joué les médiateurs – notamment en Guinée, en Sierra Leone et en Côte d’Ivoire avant les accord de Marcoussis, mais qu’il a aussi présidé la Cedeao (1998-1999) et l’OUA (2000-2001) avec l’accord de ses pairs africains. Il était donc un interlocuteur peu contournable.
On réfute également les critiques émises à propos des visites réciproques entre les deux présidents, lesquelles ont pu être interprétées comme un soutien inconditionnel au régime togolais. Le président Chirac s’était rendu à Lomé en juillet 1999 pour une visite qui, selon Paris, avait contribué à la conclusion d’un accord-cadre entre les partis d’opposition et la majorité présidentielle ; et Gnassingbe Eyadema était venu plusieurs fois en visite privée en France, avant de participer au sommet franco-africain de Paris, en 2003. Sans omettre de souligner qu’il n’y avait pas à l’encontre des dirigeants togolais de sanctions personnelles, comme c’est le cas pour le président Robert Mugabe et son entourage au Zimbabwe.
Par ailleurs, si Paris s’est toujours alignée officiellement sur les positions de l’Union européenne, on a souvent reproché à la France de jouer sa propre partie dans un cadre bilatéral. Il est vrai qu’elle n’a jamais caché son peu de goût pour la campagne orchestrée par l’opposition togolaise et par les ONG contre le régime togolais auprès de certains membres de l’Union européenne… alors que le dialogue et la persuasion auraient pu permettre des avancées politiques jugées plus notables. La France, selon les mêmes sources, préfère des sanctions individuelles aux mesures qui frappent un pays tout entier et pénalisent des populations déjà pauvres ; et elle est très soucieuse d’assurer la stabilité dans cette région de l’Afrique.

Marie Joannidis


La coopération franco-togolaise et la position européenne

La communauté française ne compte plus au Togo que quelque 2 000 personnes, dont 60 % de bi-nationaux. On parle aussi d’une quinzaine de coopérants militaires français présents au moment de la mort d’Eyadema, sans compter la présence temporaire de militaires de l’opération Licorne en Côte d’Ivoire. Sur le plan économique, la France est restée l’un des principaux partenaires commerciaux du Togo avec 169 millions d’euros d’exportations en 2003 contre 10 millions d’importations, se faisant toutefois dépasser par la Chine, devenue le premier fournisseur du pays.
La coopération bilatérale, interrompue entre 1993 et 1994, puis de novembre 1998 à août 1999, a repris progressivement et a porté, toujours en 2003, sur 4,35 millions d’euros, dont 1,37 millions pour l’assistance technique en personnel. Cette coopération s’est notamment exercée dans les domaines de la santé, l’appui aux petits opérateurs économiques, l’éducation et à travers le fonds social de développement pour la coopération de proximité et le financement de micro-projets participatifs. En 2004, la priorité a été donnée à la lutte contre le HIV/SIDA et l’appui à la sécurité civile (sapeurs pompiers notamment). Important opérateur de la coopération française, l’Agence française de développement (AFD) a de son côté privilégié depuis 2003 une approche d’intégration régionale, en améliorant les dessertes des pays sahéliens.
Parallèlement, depuis 1998 Paris inscrit son action au Togo dans le cadre de l’Union européenne, en facilitant notamment les consultations dans le cadre UE-ACP. L’aide européenne a été formellement suspendue en 1998, à l’exception du volet humanitaire, les Européens n’étant satisfaits par aucun des scrutins présidentiels ou législatifs qui se sont tenus depuis cette année. La reprise de l’aide a cependant été envisagée dès avril 2004, les autorités de Lomé ayant pris 22 engagements concrets allant dans le sens de la démocratisation, du respect des droits de l’homme, de la liberté de la presse et du dialogue avec l’opposition. En novembre, le représentant de l’Union européenne avait annoncé une reprise partielle de la coopération avec le Togo, précisant que seules des élections législatives libres et justes permettraient le retour à un soutien total de Bruxelles.

M. J.




retour

Qui sommes nous ?

Nos engagements

Les Filiales

RMC Moyen Orient

Radio Paris-Lisbonne

Delta RFI

RFI Sofia