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03/02/2006
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Paix : l’aide post-conflit, une nécessité internationale
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(MFI) L’aide post-conflit est devenue une partie intégrante des programmes de développement dans le monde et en Afrique. La Banque Mondiale y joue un rôle clé en liaison avec les organisations de l’ONU et les bailleurs de fonds bilatéraux.
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Cette nouvelle forme d’aide répond à la multiplication des conflits locaux ou régionaux, notamment en Afrique, après la fin de la guerre froide. La Banque Mondiale avait reconnu l’importance de la reconstruction de pays sortant d’une guerre sanglante en créant, en juillet 1997, une unité « post-conflit » pour les aider directement tout en mobilisant les autres bailleurs de fonds multilatéraux ou bilatéraux. La guerre en Bosnie-Herzégovine avait servi de catalyseur à cette aide « post-conflit », mais l’Afrique n’était pas en reste : génocide au Rwanda, impuissance de la communauté internationale face à la tragédie somalienne et à la situation au Sud-Soudan, conflits en Angola, au Libéria, en RDC, ou en Sierra Leone avaient mis en évidence la nécessité d’agir rapidement « en amont et en aval », selon les experts de la Banque Mondiale.
A la fin de l’année 2000, le Haut Commissariat de l’Onu pour les réfugiés (HCR) avait poussé un véritable cri d’alarme, parlant d’une politique de deux poids deux mesures. En 1999, il avait ainsi reçu plus de 90 % des fonds sollicités pour ses opérations dans l’ex-Yougoslavie (au Kosovo notamment), tandis qu’environ 60 % seulement des besoins pour les programmes en Afrique étaient satisfaits. Ainsi la communauté internationale avait-elle dépensé environ 120 dollars par personne dans l’ex-Yougoslavie en 1999, soit trois fois plus que les 35 dollars par personne reçus pour les réfugiés de l’Afrique de l’Ouest. Le HCR avait aussi reproché aux bailleurs de fonds de négliger la reconstruction des pays ravagés par la guerre, une fois la paix rétablie, ce qui pouvait entraîner une recrudescence des conflits, faute d’engagements suffisants de la communauté internationale. L’organisme mettait notamment l’accent sur la nécessité d’opérations de déminage, puisque celles-ci déterminent les progrès dans la remise en ordre du réseau routier, le retour des réfugiés et la relance de l’agriculture.
Prévention des conflits et reconstruction : des nécessités pour le développement
Des études récentes de la Banque ont démontré que les guerres civiles ont contribué à l’épanouissement, après les conflits, des trafics d’armes, de drogue et de matières premières, et dans certains cas à la prolifération des organisations terroristes. Beaucoup de pays pauvres dans le monde se retrouvaient donc enfermés dans un tragique cercle vicieux, où la pauvreté engendre les conflits et où les conflits causent la pauvreté. Reconnaissant que la guerre constitue un échec du processus de développement, la Banque Mondiale considère la prévention des conflits et la reconstruction comme des objectifs centraux de sa mission de réduction de la pauvreté. Kofi Annan, le secrétaire général des Nations Unies, appelait de son côté à la fin de 2005 à une collaboration plus étroite entre l’Onu et les organisations régionales pour renforcer les capacités dans le domaine de la paix et de la sécurité.
Dès 1997, la Banque Mondial a donc établi un Fonds Post-Conflit (Post Conflict Fund – PCF) pour aider les pays touchés par les conflits à mener à bien leur transition vers la paix et la croissance économique. A titre d’exemple, parmi les projets récents figure le financement d’un programme de 454 millions de dollars en République démocratique du Congo pour améliorer la sécurité alimentaire, rétablir les services sociaux de base et les infrastructures, et renforcer la capacité du gouvernement à formuler et à mettre en place son programme de développement. Un programme régional supplémentaire de 500 millions de dollars appuie les actions de démobilisation et de réintégration des ex-combattants dans les neuf pays de la sous-région des Grands Lacs d’Afrique centrale. L’action de la Banque en RDC dans ce domaine a été parfois critiquée pour les lenteurs administratives qui retardent les déboursements de cette aide, pourtant considérée comme urgente.
Au Rwanda, la Banque a fourni un appui au retour des populations déplacées, et en Ethiopie un soutien aux programmes de destruction des mines antipersonnelles. En Sierra Leone où plus de deux millions de personnes, soit un tiers de la population, étaient déplacées, la Banque et la communauté internationale ont fourni une aide à la fois pour la démobilisation et pour une reprise graduelle des activités économiques. L’aide post-conflit a permis de reprendre l’aide au développement.
Le Libéria de son côté a bénéficié à partir d’avril 2003 de toute une série de soutiens financiers, dont 34 millions de dollars de la part de la Banque Mondiale, notamment pour des programmes d’assistance technique dans la période de transition devant mener aux élections, tenues en décembre 2005.
L’Angola a également reçu des fonds post-conflit à l’issue de la guerre civile, en 2002. Mais en raison de ses ressources en pétrole et en diamants, et aussi du manque de transparence dans sa gestion financière, ses dirigeants n’avaient pas réussi, trois après, à convaincre les pays donateurs à reprendre l’aide au développement. Un cas de figure différent du Soudan : malgré la poursuite du conflit au Darfour, les bailleurs de fonds réunis en avril 2005 à Oslo ont promis 4,5 milliards de dollars pour aider à consolider l’accord de paix entre Karthoum et le Sud Soudan et mettre en œuvre le programme de réconciliation nationale.
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Marie Joannidis
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