(MFI) Si la coopération française a connu ces derniers temps une réorganisation importante, l'Afrique reste un partenaire privilégié et bénéficie d'une aide renouvelée pour mieux lutter contre la pauvreté. L'éducation et la santé sont parmi les priorités, tout comme la consolidation de l'État de droit ou encore l'introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication afin de réduire le « fossé numérique » entre pays riches et pauvres. Revue de détail de quelques-uns de ces chantiers...Nouvelles technologies : des interventions multiformes
Encouragées par les Français, qui insistent sur l'importance d'une "mondialisation équilibrée", l'Union européenne finance plusieurs projets dans le domaine des technologies de l'information, et de son côté l'Organisation internationale de la Francophonie a fait du développement de l'accès à l'Internet une de ses priorités. De nombreuses actions sont déjà engagées ou soutenues par la Coopération française tant sur le plan bilatéral que multilatéral autour des objectifs contenus dans le Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI).
Ces actions ont représenté pour la France en 1999 un effort budgétaire global d'environ 100 millions de francs, répartis pour moitié entre divers programmes multilatéraux (Fonds francophone des Inforoutes, projets de la Banque Mondiale ou de l'Unesco) et plusieurs projets de coopération bilatéraux, dont le Programme de promotion des technologies de l'information et de la communication en Afrique (Procooptic). Celui-ci répond aux demandes d'appui des partenaires et vise à promouvoir l'internet en Afrique, tout en renforçant la présence de contenus et de services en français sur le Web (la Toile). Il a été mis au point après une large consultation entre le ministère français des Affaires étrangères et d'autres partenaires comme l'Institut de recherche pour le développement (ex-Orstom).
Les projets retenus concernent des domaines variés, comprenant l'observation et l'expérimentation des TIC (Technologies de l'information et de la Communication) dans les domaines de la formation à distance, de la décentralisation administrative ou de l'éducation.
Parmi eux figure le projet Africanti, en partenariat entre organismes de recherche européens et africains, qui procède notamment à une évaluation des besoins et des conditions du développement du commerce électronique en Afrique de l'Ouest (Sénégal, Guinée, Mali) afin d' améliorer les échanges commerciaux. Une des responsables du projet, Annie Chéneau-Loquay, insiste sur la nécessité d'envisager l'informatisation dans ces pays dans un cadre plus large tenant compte de l'importance du secteur informel, très dynamique et qui s'est mis très vite à l'heure d'internet et du téléphone portable, du moins dans les villes.
Santé : favoriser une mobilisation internationale
Pour la France, la coopération dans le domaine de la santé occupe désormais une place croissante dans le "concert des nations", puisqu'elle est régulièrement abordée dans des enceintes où elle n'avait pas autrefois droit de cité : comme les réunions du G8 ou du Conseil de sécurité des Nations Unies. Cette mobilisation internationale prend sa source, selon les responsables français, dans la prise de conscience que les nouveaux défis à relever supposent davantage de moyens financiers et un renforcement de la coordination. La gravité de la pandémie du Sida, les problèmes de sécurité alimentaire, les risques liés aux maladies émergentes, l'inégalité à tous les niveaux dans l'accès aux soins ont réveillé les consciences, soulignent-ils.
Paris estime aussi que cette mobilisation s'appuie sur la conviction que le sort individuel des États est de plus en plus lié aux décisions prises au plan international, la surveillance et la lutte contre les maladies transmissibles étant l'exemple type d'un bien public mondial.
L'accès de tous à l'éducation et à la santé est un objectif prioritaire pour lutter efficacement contre la pauvreté et les inégalités, et pour permettre aux pays en développement de s'engager sur le sentier de la croissance durable, souligne le Quai d'Orsay, qui rappelle son engagement en faveur d'un fonds mondial pour le Sida, lequel a fini par voir le jour. Ce Fonds de solidarité prioritaire (FSP) intervient dans 61 pays, en majorité africains, y compris dans le domaine de la santé, et ce à plusieurs niveaux : aide directe aux pays, comme par exemple au Mali l'année dernière, aide inter-états (lutte contre le Sida en Afrique de l'est), soutien aux infrastructures de santé (programme d'appui au développement des mutuelles pour le financement de la santé). Le FSP s'associe également à des organisations multilatérales comme l'OMS dans l'initiative "Faire reculer le paludisme" ou pour renforcer la surveillance des maladies transmissibles et l'alerte aux épidémies.
Coopération institutionnelle : réussir l'harmonisation du droit des affaires
Sur le plan institutionnel, le ministère des Affaires étrangères soutient activement l'Organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA) destiné à favoriser les échanges commerciaux en Afrique occidentale et centrale (Zone Franc). La France contribue au fonds de capitalisation ouvert auprès du PNUD pour financer les dépenses de fonctionnement des institutions de l'OHADA – 40 millions de francs versés en plusieurs tranches sur la période 1997-1999 – et participe au fonctionnement des institutions.
Elle a ainsi fourni une expertise juridique pour l'élaboration des actes uniformes, un soutien à de nombreux séminaires de sensibilisation et de formation de la communauté des juristes et des opérateurs économiques africains et étrangers, et a donné un appui documentaire à travers l'aide à l'édition de multiples ouvrages consacrés à l'OHADA. Des spécialistes français du droit des affaires fournissent aussi des conseils aux juges de la CCJA (Cour commune de justice et d'arbitrage).
Cet appui, complété par celui d'autres bailleurs de fonds, a permis à l'organisation régionale de promulguer des textes juridiques communs qui embrassent un large champ du droit des affaires (droit commercial, des sociétés, voies d'exécution, arbitrage) et la mise en place d'une haute juridiction régionale dotée de compétences supranationales et d'un centre régional de formation des magistrats destiné à constituer rapidement un vivier d'experts-juristes du droit des affaires africains. L'organisation doit toutefois encore prouver qu'elle est capable de garantir le cadre juridique apte à attirer les investissements et susciter des initiatives privées des agents économiques.
Marie Joannidis