(MFI) Une série de mesures ont été prises par les pouvoirs publics camerounais pour combattre le fléau, après la mise en accusation du pays par l'organisation Transparency International. Elles laissent beaucoup d'observateurs perplexes.
En exprimant, son triple sentiment « d'étonnement et de surprise », « d'injustice », et malgré tout de « sérénité », le 27 octobre 1999, suite au rapport annuel de l'Ong Transparency International, publié la veille, et qui faisait du Cameroun le pays le plus corrompu du monde, (pour la deuxième fois consécutive), le Premier Ministre camerounais Peter Mafany Musongè renouvelait l'engagement de son gouvernement à poursuivre l' effort en matière de lutte contre la corruption.
Et de fait, en 1998, le gouvernement avait lancé une campagne officielle dans ce sens, relayée par les médias aussi bien privés qu'officiels. Encarts publicitaires dans les journaux, sous le slogan « la corruption tue la Nation », et une série d'enquête dans les éditions des journaux télévisés et radiodiffusé, avaient constitué l'essentiel de cette croisade, laquelle fut du reste brutalement interrompue, sans raisons officielles. En septembre 1999, deux décrets présidentiels limogeaient Mounchipou Seidou, et Pierre Désiré Engo, jusque là ministre des Postes et télécommunications, et directeur général de la Caisse nationale de prévoyance sociale. Quelques jours après, la justice ouvrait des procédures sur les deux personnalités déchues, pour « détournements de fonds publics ». Ce qui s'annonçait comme une tempête dans les milieux publics de la corruption n'a pourtant pas été prolongé par d'autres actions.
Du comité ad'hoc à l'Observatoire...
Décidé néanmoins à donner des gages à une opinion quelque peu sceptique sur la sincérité de l'ambition du pouvoir à combattre le fléau, le Premier Ministre avait créé, courant 1998, un Comité ad hoc de lutte contre la corruption, comprenant notamment plusieurs ministres.
« Au départ, les membres du gouvernement devaient passer devant le Comité pour exposer les stratégies en vigueur dans leur département ministériel pour lutter contre la corruption. Mais, très vite, on s'était aperçu que c'était ennuyeux et inefficace à la longue. C'est pourquoi il est né l'idée d'un observatoire de la corruption au sein du comité », explique un membre de la structure.
L'idée d'un observatoire, calqué sur le modèle français, capable d'enquêter, de recevoir des plaintes, et d'enclencher des actions publiques(saisine de la justice) été finalement abandonnée, au profit de la mise sur pied d'une structure moins ambitieuse, finalement dénommée « Observatoire national de lutte contre la corruption », qui attend de voir codifier ses missions par des textes de lois. A son actif déjà : la mise aux arrêts de deux médecins exerçant à Douala, pris en flagrant délit de corruption il y a un an. Et dans le même temps, le Premier Ministre a donné des instructions pour que les membres du gouvernement mettent en place des observatoires de la corruption au niveau de leurs départements ministériels respectifs. Mais comme le souligne Me Akéré Muna, bâtonnier de l'Ordre des avocats et membre du Comité ad hoc, « les poissons ne peuvent pas voter un budget pour l'achat des hameçons ». Métaphore expressive s'il en est...
Valentin Siméon Zinga