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30/11/2000

Réfugiés : cinquante ans de conflits et de misère

(MFI) Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a poussé, en novembre, un nouveau cri d'alarme concernant les réfugiés et les déplacés, soulignant que l’accroissement incontrôlable des demandes d’asile dans les pays développés ne pourra diminuer que si la communauté internationale s’attaque aux racines des conflits et aide des millions de déracinés dans leurs propres régions.

Dans un livre de plus de 300 pages, intitulé Les réfugiés dans le monde : 50 ans d’action humanitaire, le HCR retrace les grands mouvements de réfugiés au cours des cinq dernières décennies, marquées par la multiplication des personnes déplacées dans leur pays et des réfugiés économiques poussés à l'exil par la pauvreté. Créé par une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies en décembre 1950, le HCR ne disposait que d’une équipe de 33 personnes et d’un budget de 300 000 dollars lorsqu’il ouvrit ses portes le 1er janvier 1951. Son mandat initial, qui devait se limiter à trois ans, consistait à aider la réinstallation d’un million de réfugiés déracinés en Europe par la seconde guerre mondiale.
Aujourd’hui, l’agence onusienne, dont le siège se trouve à Genève, est présente dans 120 pays, emploie 5000 personnes pour un budget annuel de près d’un milliard de dollars et procure une assistance à quelque 22,3 millions de personnes dans le monde. En 1999, l’Amérique du Nord, le Japon et les pays de l’Europe occidentale ont versé 97 % de toutes les contributions gouvernementales. Dans ce livre à la fois anniversaire et bilan, au moment où le monde développé ferme de plus en plus ses portes aux personnes déracinées, le HCR met en garde contre le danger de la militarisation des camps de réfugiés, l’intervention militaire et les cas de rapatriement forcé.

Assortir l’humanitaire de mesures politiques

La sécurité des réfugiés et déplacés mais aussi des travailleurs humanitaires constitue une des grandes préoccupations actuelles des organisations humanitaires. Sadako Ogata, haut commissaire de l’agence pendant la dernière décennie et qui doit céder la place fin décembre à l'ancien Premier ministre des Pays-Bas Ruud Lubbers, souligne dans la préface que ce 50è anniversaire ne devrait pas faire l’objet de célébrations, car la longévité du HCR illustre les insuffisances de la communauté internationale à prévenir et éliminer les calamités qui poussent les personnes à fuir leurs foyers et leur patrie. « L’action humanitaire n’a que peu de poids si elle n’est pas assortie de mesures stratégiques et politiques concrètes pour éradiquer les causes de conflits », écrit-elle, soulignant que l’action humanitaire ne suffit pas à résoudre des problèmes qui, fondamentalement, relèvent de la politique.
L’ouvrage affirme que les pays riches continueront de se heurter aux problèmes des réfugiés et de l’immigration clandestine, tant qu’ils ne s’attaqueront pas aux racines du mal. « Si la disparité entre les nations riches et les nations pauvres ne cesse pas d’augmenter, et si l’on n’encourage pas les pays en voie de développement à mettre en place, chez eux, les moyens de protection nécessaires pour enrayer les flots de personnes déplacées et assister ceux qui en ont besoin, alors ces derniers se tourneront, de plus en plus, vers les pays les plus aisés, leur seul espoir », estiment les auteurs.
Constatant que les modifications juridiques apportées par les pays industrialisés à leur système d’asile n’ont pour objectif que de contrôler l’immigration illégale – y compris les migrations économiques – le livre souligne que, ce faisant, les Etats passent à côté de certaines obligations vis-à-vis des personnes ayant un réel besoin de protection. « Les Etats industrialisés ont une responsabilité particulière en la matière. Non seulement ce sont eux qui ont rédigé, il y a cinquante ans, les instruments juridiques essentiels relatifs aux réfugiés ainsi qu’aux droits de l’homme, mais aussi et surtout, la façon dont ils accueillent les réfugiés déterminera, par effet d’exemple, la façon dont beaucoup d’autres Etats accueilleront des réfugiés dans les années à venir », ajoute-t-il.

Afrique-Yougoslavie : deux poids deux mesures

Le HCR qui, au début, s'occupait essentiellement de personnes réfugiées hors de leur pays, a dû se pencher sur le problème des déplacés de l'intérieur, et tout récemment sur le sort des migrants économiques à la recherche de l’eldorado. Ainsi l'ouvrage affirme qu'en dépit de toutes les ressources consacrées par les gouvernements – en particulier européens et américain – au contrôle des frontières, le durcissement des politiques de migration et d’asile ne résout en rien l’accroissement incontrôlé des entrées illégales. Bien au contraire, « avec la fermeture des voies d’accès habituelles, de plus en plus de réfugiés se tournent vers les trafiquants, compromettant ainsi leurs chances d’obtenir l’asile légal auprès de nombreux Etats », explique le livre, qui déplore l'image de « réfugié criminel » répandue dans l'opinion publique.
Le HCR évoque aussi la politique des deux poids et deux mesures : en 1999, il a reçu plus de 90 % des fonds sollicités pour ses opérations dans l’ex-Yougoslavie, tandis qu’environ 60 % seulement des besoins pour les programmes en Afrique étaient satisfaits. A titre d'exemple, la communauté internationale a dépensé environ 120 dollars par personne dans l’ex-Yougoslavie en 1999, soit trois fois plus que les 35 dollars par personne reçus pour les réfugiés de l’Afrique de l’Ouest. Le nombre des réfugiés africains a quadruplé depuis le début des années soixante, passant de 950 000 à quelque quatre millions de personnes, sans compter les millions de déplacés à l’intérieur de leur propre pays.

Marie Joannidis





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