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30/05/2002
Sommet de l’Union africaine – Durban 2002 (8) : L’Union en 7 questions

(MFI) Le nouveau traité instituant l’Union africaine abroge la Charte de l’OUA, adoptée en 1963 à Addis-Abeba, mais il intègre les autres instruments juridiques existants tels que le Traité d’Abuja de 1991 créant la Communauté économique africaine, ou encore la Déclaration du Caire sur le mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits.

1 – Pourquoi une nouvelle organisation interafricaine ?

C’est lors du Sommet extraordinaire de Syrte (Libye) que l’organisation de l’unité africaine a décidé la création d’une nouvelle organisation appelée à la remplacer (déclaration de Syrte). L’acte constitutif de la nouvelle organisation a été adopté à Lomé, en juillet 2000. L’initiative de Syrte s’est donnée pour objectif d’accélérer le processus d’intégration prévu par le traité d’Abuja, qui se fondait sur un programme étendu sur une période de 34 ans. Il s’agit donc clairement d’aller plus vite sur le chemin de l’unité africaine. Il s’agit aussi d’un véritable changement de perspective : au delà des principes consacrés par le droit international, l’Acte constitutif est porteur d’un programme politique, économique et social pour l’Afrique, avec en particulier la définition d’une politique commune de défense, la participation populaire aux affaires de l’Union, le droit d’intervenir directement dans un pays membre coupable de crimes contre l’humanité, le droit d’intervenir pour rétablir la paix et la sécurité dans un Etat membre à sa demande, l’égalité entre l’homme et la femme. Aux yeux des Etats africains eux mêmes, il s’agit là d’une nouvelle école de pensée qui n’existait ni dans la Charte de l’OUA, ni dans le traité d’Abuja.

2 – Quelles sont les conditions de la réussite de cette nouvelle entreprise ?

Les analyses qui prévalent au sein de l’OUA sont sans concession et traduisent le nouvel état d’esprit qui se répand en Afrique. Rien ne pourra être fait si les Etats africains restent en conflit entre eux-mêmes ou en leur sein. Ils sont à des niveaux de démocraties très inégaux et un immense effort doit être fait à cet égard. Des pandémies, telles que le VIH/SIDA ravagent le continent et leur éradication est une tâche prioritaire.
Par ailleurs, la part de l’Afrique dans le commerce mondial est insignifiante et l’Union africaine, tout en recherchant l’unité politique, devra renforcer le tissu économique du continent « pour constituer une force de marché respectable » (réflexion collective sur l’Union africaine, Addis Abeba, 2001). L’accent devra aussi être mis tout particulièrement sur le secteur privé.
La nouvelle organisation devra enfin être dotée de ressources budgétaires nouvelles. L’enveloppe de 30 millions de dollars actuellement allouée à l’OUA ne sera pas suffisante et de nouvelles modalités de financement devront être définies.


3 – Quelles différence entre l’Union africaine et l’actuelle Organisation de l’unité Africaine (OUA) ?

L’Union africaine ne devra pas être une simple version remaniée de l’OUA. Il s’agira d’une union des peuples et non d’une union des Etats et le parlement devra, par exemple, y jouer un rôle majeur. Les Etats membres devront consentir à transférer à l’Union certaines de leurs prérogatives. Des politiques communes devront se mettre en place dans des domaines prioritaires tels que le renforcement de la paix et de la sécurité continentale, l’intégration des économies africaines, la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux, la sécurité alimentaire, la lutte contre la pauvreté, la coordination des différentes initiatives dans le domaine du développement, notamment le commerce, l’environnement, la lutte contre les pandémies ou encore la dette extérieure. Les méthodes de travail devront changer et la popularisation de l’Union africaine à travers le continent devra mobiliser des acteurs aussi divers que le secteur privé, la société civile, les universités ou encore les communautés économiques régionales.

4 – Quels seront les rapports de l’Union africaine avec ces communautés régionales ?

Même si les textes restent pour l’instant muets sur ce point, il est clair que l’Union africaine encouragera les regroupements régionaux, mais qu’elle aura également vocation à les fédérer en son sein. Le protocole sur les relations entre l’OUA et les communautés économiques régionales reste en vigueur mais il conviendra d’aller beaucoup plus loin et, à terme, d’intégrer les groupements régionaux au sein de la nouvelle Union.

5 – L’Union africaine s’inspire-t-elle- de certains précédents ?

Signe des temps, non seulement les promoteurs de la nouvelle organisation n’écartent pas l’idée de s’inspirer des modèles d’intégration d’autres ensembles économiques régionaux, mais ils la revendiquent, citant notamment l’Union européenne, l’ASEAN, le MERCOSUR ou le NAFTA. Dans les faits, c’est incontestablement l’Union européenne qui les inspire le plus directement et ils ne craignent pas de comparer le président Kadhafi – à qui revient la paternité de l’idée mise en avant à la conférence de Syrte - aux fondateurs de la Communauté européenne, notamment Jean Monnet.

6 – Quelles seront les nouvelles institutions de l’Union africaine ?

Le modèle de l’Union européenne est ici très présent.


A/ La Conférence : elle est composés des chefs d’Etat et de gouvernement et se réunit en session ordinaire une fois par an. Organe suprême de l’Union, elle dispose de compétences très importantes aussi bien pour le fonctionnement de l’Union (dont elle adopte le budget, dont elle nomme les membres de la Cour de Justice et dont elle arrête les sanctions) que pour la mise en œuvre des politiques communes. C’est elle qui autorise l’Union à intervenir dans un Etat membre dans des circonstances graves, telles que les crimes de guerre, le génocide, les crimes contre l’Humanité.

B/ Le Conseil exécutif : il est composé des ministres des affaires étrangères ou de tous les autres ministres désignés par les Etats membres. Responsable devant la Conférence, il se réunit au moins deux fois par an et il coordonne les politiques des Etats membres dans les domaines d’intérêt commun.

C/ Le Comité des représentants permanents : il est composé des représentants permanents accrédités auprès de l’Union. Il se réunit chaque fois que de besoin et il constitue en quelque sorte un organe consultatif, tant auprès du Conseil exécutif que de la Commission.

D/ La Commission : c’est l’organe le plus original de l’Union africaine dont elle sera le véritable exécutif, agissant sous le contrôle de la Conférence et du conseil, sachant qu’à terme elle serait soumise également au contrôle du Parlement panafricain. Les membres seront nommés avant tout à raison de leurs compétences, de leur expérience et de leur leadership. Elus par la Conférence, ses membres pourraient être au nombre de 7, au moins dans un premier temps. Il ne s’agirait pas d’un secrétariat général élargi, mais d’un véritable organe collégial avec un président (et un vice-président chargé d’un portefeuille comme les autres commissaires). Il existerait aussi 6 départements : développement économique, coopération et intégration ; questions de genre, affaires sociales ; science et technologie ; administration et finance ; information, communication et mobilisation des ressources ; affaires politiques.

E/ La Cour de Justice : son statut est à l’étude.

F/ Le Parlement panafricain : son rôle devrait aller croissant mais sa composition fait encore l’objet d’un débat. L’acte constitutif de Lomé ayant prévu, conformément à une certaine tradition, qu’il serait composé de 5 parlementaires par pays, cette disposition paraît peu réaliste et fait l’objet de nombreuses critiques, étant donné la disproportion des Etats africains entre eux, du Nigeria avec plus de cent millions d’habitants à Sao Tomé avec quelques centaines de milliers. Nul doute que l’acte constitutif ne doive être modifié sur ce point.


7 – Quel est l’agenda de l’Union africaine ?

L’Union africaine devrait être mise en place lors du sommet de l'OUA à Durban, en juillet prochain.

Jean-Pierre Colin
(Centre d'études des relations internationales, université de Reims)


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