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18/07/2002
Union africaine : les luttes d’influence ont commencé

La nouvelle Union africaine (UA) qui a remplacé l’OUA est désormais sur les rails. Mais son lancement le 9 juillet à Durban en Afrique du Sud, au-delà de l’unité de façade, a été déjà marqué par les luttes d’influence entre pays membres.

Le président sud africain Thabo Mbeki, à la tête de la plus puissante économie du continent, a réalisé ses ambitions. Il est devenu le premier président en exercice de la nouvelle union sur laquelle il entend bien imprimer sa marque pendant un an, d’ici le prochain sommet prévu à Maputo au Mozambique en 2003. Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, parrain de cette union qu’il a voulue et soutenue à coups de pétrodollars, faute d’obtenir les États-Unis d’Afrique dont il rêvait, a certes joué les vedettes à Durban avec son style flamboyant. Mais Mbeki et Kadhafi n’ont pas réussi à raccourcir à six mois comme ils le souhaitaient le mandat de l’ivoirien Amara Essy, le secrétaire général de l’OUA, soutenu par de nombreux francophones, et devenu le « président par intérim » de la Commission africaine pour un an, avant l’élection d’un président en titre.
« Cela a été très dur », a convenu Amara Essy à la fin du sommet, soulignant que la tâche qui l’attendait était immense et qu’il fallait à tout prix assurer le financement des instances de la nouvelle Union, pour éviter de retomber dans les faiblesses de l’OUA : celle-ci a souvent été dans l’incapacité d’agir efficacement faute de moyens adéquats en raison notamment des arriérés impayés de ses membres. Le colonel Kadhafi dont le pays a déposé une série d’amendements à l’Acte constitutif de l’Union africaine a toutefois réussi à faire adopter par ses pairs le principe de la convocation d’une session extraordinaire de la conférence dans six mois pour l’examen de ces amendements.
Les décisions finales officiellement adoptées font état de cette session, qualifiée par Thabo Mbeki de « sommet extraordinaire » alors que d’autres participants à Durban ont parlé de simple réunion consacrée aux amendements libyens… La Libye qui a déjà construit à Syrte des bâtiments imposants susceptibles d’accueillir toutes les instances de l’Union, pourrait à présent se rabattre sur le Parlement africain prévu par l’Acte constitutif de l’Union, selon des sources informées africaines.
Rappelons que l’Union africaine a été dotée d’institutions analogues à celles de l’Union européenne (UE), notamment une Conférence de l’Union, organe suprême au niveau des chefs d’État et de gouvernement, ainsi qu’un Conseil exécutif au niveau ministériel, une Commission exécutive, un Conseil de sécurité et une Cour de justice. Un parlement est également envisagé mais il n’aura qu’un rôle consultatif qui devra être précisé par la suite. Le texte constitutif prévoit aussi la création de nouvelles institutions financières y compris un Fonds monétaire africain et une Banque africaine d’investissements.


Des instances très convoitées

La lutte s’annonce déjà âpre pour certaines de ces instances. Ainsi au moins une dizaine de pays sont sur les rangs pour les cinq sièges du Conseil de paix et de sécurité (un par région géographique) qui doit remplacer le Comité de l’OUA pour la prévention et la gestion des conflits. Si l’Afrique du Sud et le Gabon sont donnés comme favoris en Afrique australe et centrale, plusieurs pays se disputent les autres places. Le Sénégal entend rivaliser avec le Nigeria en Afrique de l’ouest, tandis que le Kenya, la Tanzanie et l’Éthiopie sont sur les rangs en Afrique de l’est, l’ Égypte, l’Algérie et la Libye étant intéressées par le poste réservé à l’Afrique du nord. Contrairement au Conseil de sécurité de l’ONU, il n’y aura pas de membres permanents mais des représentants élus pour trois ans.
La proposition du colonel Kadhafi de création d’une armée africaine unique a en revanche été « poliment enterrée », selon certains délégués présents à Durban, puisque son étude a été renvoyée à un groupe d’experts chargé de soumettre des propositions sur une politique de défense et de sécurité commune au sommet de Maputo. « Nous avons besoin de forces africaines de maintien de la paix susceptibles d’intervenir sur le terrain en cas de conflits ou pour les prévenir et non pas d’une armée unique, ce qui serait irréalisable », a souligné en privé un ministre francophone d’Afrique centrale.


Le Nepad, l’union… et quelques divergences

Le NEPAD, le Nouveau partenariat pour le développement économique de l’Afrique, qui a la vocation de mobiliser les ressources et les capacités africaines et de susciter l’intérêt des bailleurs de fonds, est au cœur de cette nouvelle Union africaine qui veut assurer la bonne gouvernance politique et économique ainsi que la transparence. Mais là aussi les avis divergent, en particulier en ce qui concerne le principe « de contrôle par les pairs », officiellement appelé Mécanisme africain d’évaluation entre les pairs (MAEP). Certains voulaient qu’il soit inscrit dans les statuts et donc obligatoire mais le communiqué final laisse entendre qu’il devra être « consenti » puisqu’il appelle tous les États membres à y adhérer.
Après des discussions serrées, les chefs d’État et de gouvernement ont décidé d’augmenter les membres du comité de mise en œuvre du Nepad qui passent de 15 à 20, soit un membre supplémentaire par région. Plusieurs candidats se disputent cette place qui intéresse notamment la RDC en Afrique centrale. Le Nepad (New Partnership for African Development) .a été le résultat de la fusion entre le Plan du Millénium (MAP, Millenium African Plan) lancé notamment par Thabo Mbeki et le plan « Omega » du chef d’État sénégalais Abdoulaye Wade. La fusion a été réalisée avec l’aide de la CEA (Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique) pour aboutir à la Nouvelle Initiative Africaine, adoptée par le sommet de l’OUA à Lusaka en 2001. Certains à Durban, comme le président Obasanjo, ont estimé que la mise en œuvre devait être assurée par des instances de l’Union africaine, sans la participation d’organismes comme la CEA qui dépend des Nations-Unies. D’autres toutefois estiment nécessaire la présence d’un organe indépendant qui possède également une grande expertise en matière économique. Pour le moment, une des priorités est la mobilisation des opinions publiques africaines pour mieux faire connaître le Nepad et ses objectifs.
Certains dossiers politiques comme celui de Madagascar ont également révélé des divergences d’approche. Le sommet a maintenu la suspension temporaire de ce pays en raison des circonstances qui ont entouré l’arrivée au pouvoir de Marc Ravalomana, alors que des pays comme le Sénégal souhaitaient que l’Union africaine appelle à des élections législatives démocratiques et transparentes – puisqu’il avait effectivement assumé la présidence et que son rival Didier Ratsiraka avait quitté le pays. Autre exemple des divergences : le sommet n’a pas réussi à se mettre d’accord sur un texte concernant la défunte OUA, entre ceux qui voulaient la féliciter pour les tâches accomplies et ceux qui voulaient tourner la page et exalter « la Nouvelle Union africaine » dont les membres sont pourtant les mêmes.


Marie Joannidis

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