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06/12/2002
Les élections au Kenya (1) : Vive la démocratie !

(MFI) Les élections générales kenyanes du 27 décembre 2002 marquent la fin d’une ère : celle de 24 ans de pouvoir sans partage du président Daniel Arap Moi, contraint de laisser sa place en vertu des dernières lois électorales.

« Historique » est le qualificatif le plus employé pour désigner cette consultation électorale qui doit désigner un nouveau président, les députés de 210 circonscriptions, et les conseillers municipaux du Kenya. Jamais campagne n’aura autant mobilisé les foules depuis le rétablissement du pluripartisme en 1992. La perspective d’une victoire de l’opposition – les sondages lui donnaient 60 % de votes favorables - est sans nulle doute à l’origine de cette nouvelle passion des Kenyans pour la politique. Chacun a trouvé sa place dans cet exercice démocratique, qui pour l’instant a su limiter les incidents violents : l’homme de la rue assume sa liberté de choix, les journalistes leur liberté de commentaires, la Commission électorale s’attache à encourager le sens civique et la responsabilité des candidats… qui ne ménagent ni moyens ni efforts pour atteindre les électeurs des endroits les plus reculés du Kenya.

Uhuru, du jeune avec des vieux ?

Dix candidats briguent la magistrature suprême. Cependant, la bataille se joue entre deux hommes : Uhuru Kenyatta, représentant le parti au pouvoir depuis 24 ans, la KANU, et Mwai Kibathi, désigné par la NARC, une alliance de 15 partis de l’opposition. Le premier n’a aucune expérience politique : homme d’affaires, élevé au rang de directeur du Bureau du Tourisme du Kenya par Daniel Arap Moi, où il n’a guère brillé par sa gestion, il a été intronisé comme dauphin par le président en octobre dernier, avec le profil d’ « un homme que l’on peut guider ». Il est le troisième fils de Jomo Kenyatta, le père de l’indépendance du Kenya et premier chef d’Etat.
Jusque là, son parcours politique a été peu convaincant : en 1997, avec un score ridicule, il avait fait perdre le siège de député à son parti dans sa circonscription. Cette fois Uhuru Kenyatta a mené une campagne « à l’américaine » : flanqué de son épouse, et utilisant des hélicoptères pour rencontrer ses électeurs. Son mentor, ébranlé par une avalanche de démissions et de défections de ses ministres en faveur de la NARC, a distribué à la va-vite promotions et dons : une maladresse interprétée aussitôt comme un signe d’épuisement du « Mzee » (« le Vieux »). Autre erreur tactique : tout au long de sa campagne, Uhuru s’est présenté entouré des dinosaures de la KANU, fidèles de Daniel Arap Moi, offrant ainsi une photo de famille des personnages les plus corrompus du régime. L’image était tellement négative que la famille Kenyatta est intervenue pour réclamer un peu de discrétion afin de ne pas compromettre la candidature de son rejeton.

L’opposition pour une fois unie

Côté opposition, si le choix de Mwai Kibaki a été violemment contesté au début par les différentes tendances de la NARC, celui-ci s’avère judicieux. Mwai Kibaki est un opposant de longue date, après avoir occupé le poste de vice-président de Daniel Arap Moi pendant 12 ans. A la tête du Parti démocratique, il est arrivé troisième aux élections de 1992 et deuxième en 1997. Il est soutenu par Raila Odinga, fils du défunt Jaramogi Odinga Oginga, opposant acharné de Daniel Arap Moi depuis les années 1960. Celui-ci pourrait bien être son Premier ministre dans le cadre de la nouvelle constitution, que les partis d’opposition se sont engagés à appliquer dans les 100 jours après les élections. L’âge de l’ancien vice-président, 71 ans, rebute certains électeurs qui pourraient lui préférer la jeunesse de Uhuru Kenyatta. Son entourage n’est pas non plus celui que les Kenyans pouvaient espérer pour un changement en profondeur. Un grand nombre des dignitaires des partis qui composent la NARC ont trempé dans des scandales financiers ou ont longtemps clamé leur fidélité au tout-puissant président Moi. Les ralliements de dernière heure des déçus de la KANU ont renforcé l’idée d’une possible continuité des « bonnes vieilles pratiques » de l’ancien régime après les élections.
Quoiqu’il en soit, l’opposition a fait montre d’une certaine maturité : contre toute attente, l’union, annoncée en juillet dernier, a tenu. La tactique qui a consisté à désigner un candidat de l’ethnie kikuyu, l’ethnie majoritaire du Kenya (26 % de la population), à opposer à un autre Kikuyu, Kenyatta, est habile. La déception liée à cette nomination a conduit à un éclatement partiel de l’opposition : Simon Nyachae du Ford People et James Orengo du SDP (Parti Social Démocrate) mènent une campagne au nom de leur parti. Seul le premier pourrait ravir une part conséquente des votes en faveur de Kibaki.

Marion Urban


* Le Kenya compte 10,4 millions d’électeurs pour une population de 31 millions d’habitants



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