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04/02/2003
France-Afrique : République centrafricaine : fragiles dialogues

(MFI) Avec deux tentatives avérées de coup d’Etat – 28 mai 2001 et 25 octobre 2002 – depuis sa réélection en septembre 1999, le président Ange-Félix Patassé n’a pas réussi à rétablir des rapports politiques et sociaux apaisés en République centrafricaine (RCA). Ce pays de 3,8 millions d’habitants est plus que jamais exposé aux ondes de choc régionales.

La rébellion issue de la tentative de putsch d’octobre 2002 contrôlait toujours, à la mi-janvier 2003, d’importantes portions du territoire centrafricain, complètement coupées de la capitale. Cette tentative a été revendiquée par l’ancien chef d’état-major, le général François Bozizé. Dans son rapport au Conseil de sécurité présenté en début d’année, Kofi Annan indique que la présence d’une rébellion armée au nord de la RCA, conjuguée aux privations diverses pour les populations locales ou déplacées, constituent « des éléments de déstabilisation majeure ».
Le dernier des coups d’Etat manqués illustre le difficile dialogue entre un pouvoir qui tend à s’isoler et une opposition qui peine à maintenir sa cohésion, dans un pays dont la situation économique, plus préoccupante que jamais, génère tensions et grèves à répétition. Mais il illustre également combien la Centrafrique reste tributaire des luttes d’influence sur l’échiquier régional, et des luttes tout court qui font rage chez ses voisins, en guerre depuis de longues années à l’exception du Cameroun : le Tchad au nord, le Soudan à l’est et les deux Congo au sud.

Les troupes libyennes et du MLC sauvent par deux fois le régime de M. Patassé

Malgré la signature en 1998 du Pacte de réconciliation nationale, par lequel autorités, partis politiques et responsables civils s’engagaient « à appliquer la bonne gouvernance, excluant le népotisme, le clanisme (…) et les détournements », et « à faciliter le règlement de tous les différends (…) par le dialogue », le climat socio-politique est resté délétère à Bangui. En avril 2000, une motion de censure déposée par l’opposition parlementaire est rejetée ; à la fin de cette même année, des manifestations de fonctionnaires réclamant leurs arriérés de salaires tournent à la contestation du régime. Les indices économiques de ce pays enclavé – classé par le Pnud au 165è rang sur 173 en matière de développement humain – sont, malgré les efforts du gouvernement, mauvais : des finances publiques exsangues, une dette extérieure frôlant les 800 millions de dollars, des filières café, coton et bois approximativement gérées…
Cran supplémentaire dans la désagrégation civile, la RCA est le théâtre, le 28 mai 2001, d’une tentative de coup d’Etat dans laquelle est impliqué l’ancien président André Kolingba. A la demande d’Ange-Félix Patassé, dans le cadre de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (Comessa ou CEN-SAD) dont la RCA est membre, des troupes libyennes interviennent. Et des forces du Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba traversent le fleuve Oubangui. Lors de la tentative de coup d’Etat du 25 octobre 2002, menée cette fois par les forces du général Bozizé venues du Tchad, ce sont à nouveau les troupes libyennes et congolaises qui défendent le régime de M. Patassé. Les exactions du MLC – environ 1 500 hommes, accusés de s’être « payés » sur la population civile et d’avoir commis des viols – suscitent la réprobation générale.
L’intervention libyenne, même si elle est loin d’être dénuée d’arrière-pensées – il ne déplaisait pas au colonel Kadhafi de prendre le Tchad d’Idriss Déby, auquel il s’oppose via la rébellion du MDJT dans l’Ennedi, à revers au sud – a eu le mérite de s’inscrire dans le cadre sous-régional de la Comessa. Celle des troupes de Jean-Pierre Bemba, en revanche, joue sur un registre beaucoup plus personnel : le patron du MLC est largement redevable à Ange-Félix Patassé de n’avoir pas été pris à revers à partir de la Centrafrique du temps de Laurent-Désiré Kabila, et la RCA demeure aujourd’hui la seule voie « d’import-export » praticable pour toute la zone sous son contrôle.
Si la date du départ du MLC, d’abord annoncé pour début novembre puis pour le 15 février, reste aléatoire, la force de la Comessa, elle, s’est retirée fin décembre 2002. Le retrait libyen coïncide avec l’arrivée des soldats de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) : des contingent congolais et gabonais, déjà, sont sur place depuis quelques semaines. Leurs missions : assurer la protection du président Patassé, restructurer l’armée centrafricaine et, surtout, surveiller la frontière Centrafrique-Tchad.

Sous l’effet de la médiation d’Omar Bongo

Les partisans de François Bozizé ont en effet, souligne Kofi Annan, « compromis la relative stabilité et la décrispation progressive des rapports entre le Tchad et la Centrafrique » lorsqu’ils ont attaqué Bangui en octobre dernier. Une décrispation qui était en cours, notamment sous l’effet de la médiation du chef de l’Etat gabonais, Omar Bongo. Les tensions avaient éclaté en novembre 2001, lorsque le général Bozizé, démis de ses fonctions à Bangui, s’était enfui au Tchad avec ses hommes. Depuis lors, les voisins se sont accusés mutuellement de violations des frontières et il y a eu des affrontements. En outre, la présence en RCA de Martin Komtan Madji, que N’Djamena soupçonne d’être Abdoulaye Miskine, ex-chef rebelle tchadien, a contribué à l’escalade.
Réuni le 2 octobre 2002 à Libreville, un sommet extraordinaire de la Cemac avait décidé de déployer, dans un délai d’un mois, 300 soldats en RCA. Le sommet recommandait à N’Djamena d’expulser M. Bozizé, et à Bangui de faire de même avec M. Madji. Le 13 octobre, le Togo acceptait d’accorder l’asile à M. Madji (il y arrivera finalement début novembre) et la France, qui appuie la médiation de la Cemac et « s’attache à participer à l’application de ses recommandations », accueillait François Bozizé. Retardé par les combats d’octobre, le déploiement des soldats de la Cemac, auquel la France apporte un important soutien logistique et financier, a débuté en décembre.

Enfin le dialogue national, réclamé de longue date par l’opposition

Ce qui n’a pas empêché le président Patassé de lancer, le 31 décembre, un « appel urgent et formel à la France pour qu’elle soit présente militairement aux côtés de l’armée centrafricaine et de la force de la Cemac, pour nous aider à rétablir notre intégrité territoriale (…) comme elle le fait actuellement en Côte d’Ivoire » ; le président a aussi affirmé qu’une présence française permettrait à la Centrafrique d’exploiter les zones riches en pétrole du nord du pays. Une intervention ne se justifie pas dans l’état actuel des choses pour Paris, qui s’en tient à son « principe simple de soutien aux médiations africaines » et d’appui au dialogue national. La RCA compte moins de 1400 Français immatriculés.
Un mois après l’attaque de Bangui, le président Patassé avait lancé un appel au dialogue national – réclamé de longue date par l’opposition – et la Coordination du dialogue national (CDN) a vu le jour fin décembre, sous la responsabilité de Mgr Paulin Pomodimo, président de la Conférence épiscopale. Le Conseil de sécurité de l’Onu encourageait début janvier les autorités centrafricaines « à créer les conditions d’un dialogue global et sans exclusive ». Les date et lieu de ce dialogue inter-centrafricain sont en discussion. Des législatives doivent normalement avoir lieu en décembre prochain. Une commission mixte Tchad-RCA devait, elle, se réunir en février à Libreville.

Ariane Poissonnier


Les missions de paix

Mission interafricaine de surveillance des accords de Bangui (Misab). Après les trois mutineries de 1996, le 19è sommet France-Afrique de Ouagadougou a mandaté le Tchad, le Gabon, le Mali et le Burkina Faso, ainsi que le Sénégal et le Togo pour une mission de médiation à Bangui. Celle-ci désigne un comité international de suivi, dirigé par le Malien Amadou Toumani Touré. Les négociations aboutissent aux Accords de Bangui, le 25 janvier 1997, consacrant la naissance de la Misab. Missions : surveiller l’application des accords, participer au désarmement des unités rebelles et assurer la sécurité dans la capitale. Le Conseil de sécurité, en août 1997, approuve la poursuite de l’action de la Misab.
Mission des Nations unies en RCA (Minurca). La Minurca, créée par la résolution 1159, succède à la Misab le 15 avril 1998. Son mandat consiste notamment à maintenir et renforcer la sécurité, la stabilité et la liberté de circulation à Bangui ; à protéger les installations clés ; à superviser le stockage d’armes. Elle est composée de 1350 hommes commandés par le général gabonais Ratanga (qui dirige aujourd’hui la force de la Cemac à Bangui). La France fournit la logistique. Le Conseil de sécurité a par la suite inclus dans le mandat de la Minurca le soutien à l’organisation des élections législatives puis des présidentielles ; elle reste en place jusqu’au 15 janvier 2000.
Bureau des Nations unies pour la consolidation de la paix en RCA (Bonuca). Le Bonuca, qui a succédé à la Minurca en janvier 2000, a d’abord été établi pour un an. Sa mission principale est d’appuyer les efforts du gouvernement pour consolider la paix et la réconciliation nationale, renforcer les institutions démocratiques et faciliter la mobilisation sur le plan international d’un soutien politique et de ressources pour la reconstruction et le redressement économique. Son mandat a été renouvelé.

A. P.




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