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03/04/2003
« Pour aider à la démocratisation de l’Afrique, Internet doit d’abord être démocratisé »

(MFI) L’e-gouvernement, c’est l’ensemble des informations et services publics proposés sur leurs sites Internet par les gouvernements. Au Nord, l’offre est riche et facilite la vie des citoyens. Mais quid des pays en développement ?

Pour l’internaute européen ou nord-américain avisé, l’e-gouvernement fait déjà partie du décor technologique. Lorsqu’il remplit sa déclaration de revenus ou signale son changement d’adresse à la sécurité sociale via Internet, le Français, le Canadien ou le Suédois utilise, sans peut-être en connaître le nom, les services publics proposés par l’e-gouvernement de son pays. L’objectif est de rapprocher l’administration, les centres de pouvoirs et les institutions de la population. La situation est fondamentalement différente dans les pays en développement, et notamment en Afrique. Est-il prématuré de s’interroger sur l’impact que peuvent y avoir les nouvelles technologies sur la démocratie ?
Peut-être, si l’on considère avec lucidité les taux d’alphabétisation dans la plupart des pays du continent, ou la quasi absence d’infrastructures en matière d’électricité et de téléphonie. Une étude de la Cnuced, la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement, souligne par exemple que seul 1 habitant sur 118 dispose d’un accès à Internet. Et ces internautes sont majoritairement concentrés dans cinq pays : l’Afrique du Sud, l’Egypte, le Kenya, le Maroc et la Tunisie.
Non, si l’on juge les expériences et réalisations déjà couronnées de succès. Le Maroc, la Mauritanie et l’Afrique du Sud se classent ainsi entre la trentième et la quarantième positions (sur 196), dans le dernier classement mondial des Etats les plus avancés en matière de développement de leurs sites gouvernementaux, réalisé par la World Market Research Center.

Alphabétiser les populations avant d’entrer dans l’ère numérique

L’e-gouvernement africain fait, certes, ses premiers pas. Les sites des ministères et administrations sont plus des vitrines et des sources d’information limitées que des outils de services. L’étude démontre que les services en ligne sont quasi inexistants, idem pour les bases de données. Mais tous les experts s’accordent sur un point : Internet peut faire progresser la culture démocratique. « Oui, mais si, et seulement si le pouvoir politique et économique de ces pays le décide et finance des programmes d’alphabétisation ou de développement des réseaux électriques, téléphoniques, etc. », souligne Bernard Benhamou, maître de conférence à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et spécialiste de la question.
Les Etats africains se tournent prioritairement vers les fonds et missions du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du Programme international pour le développement de la communication (PIDC) de l’Unesco pour trouver des ressources financières et des experts. Mais des politiques, des grandes firmes, des fonctionnaires sont passés à l’acte de manière autonome.
En Afrique du Sud, un partenariat scellé entre Microsoft et l’Education nationale permet à 32 000 écoles de bénéficier gratuitement des logiciels de la firme américaine, et au ministère d’économiser dix millions de dollars par an ! « Les logiciels sont les premières pierres dans la construction de ponts technologiques pour que nos enfants maîtrisent Internet et l’informatique », assure Kader Asmal, ministre de l’Education.

L’Angola, la Tanzanie, le Maroc à l’heure de l’e-gouvernement

En Angola, l’Etat vient de lancer un grand programme de développement de la gouvernance électronique, le e-Gov, dont le but est de fournir des services à ses ressortissants. En Tanzanie, le gouvernement a mis en réseau son système de paiement des 280 000 fonctionnaires. Résultat : un traitement plus rapide et une transparence qui ont donné des résultats inattendus. Le système a permis de découvrir une foultitude d’emplois fictifs et, donc, de faire des économies en les supprimant…
Au Maroc, un projet de création de site d’orientation et d’information chargé de recueillir les plaintes des citoyens concernant les procédures administratives est bien avancé. Le ministre de la Modernisation du secteur public a annoncé la mise en place d’une plateforme d’échange d’informations entre les différents services publics.
Reste les handicaps structurels de l’Afrique. La faiblesse du réseau Internet ? Le spécialiste de l’accès au Web sans fil Alberto Escudero-Pascual balaie le problème. Au Pérou et au Nicaragua, il a piloté l’implantation d’un réseau visant à interconnecter les professionnels de santé dans des zones montagneuses et enclavées. Ce, en se reliant à Internet par satellite, et en construisant un réseau sans fil grâce aux ondes radio (VHF ou HF). « Ces projets pilotes sont des réussites, assure-t-il. Le coût d’équipement d’un site n’est que de 2 à 4 000 dollars. Cette solution est idéale pour connecter les régions les plus inaccessibles. L’avenir passe par la mise en place d’un réseau de relais satellite du signal dévolu à Internet. »

Simputer : l’ordinateur qui peut révolutionner Internet en Afrique

La réflexion s’oriente aussi vers l’atout que représente la communauté, en Afrique. A charge pour les ONG, comme le fait déjà Internews au travers de son programme GIPI (Global Internet Policy Initiative) dans quatorze pays, et notamment au Nigeria, d’acheminer du matériel dans les zones les plus reculées. Reste à financer la formation d’un référant par communauté, dont le rôle sera d’initier la population à l’informatique et à l’Internet. Ou de centraliser et de traiter ses demandes. L’organisation Planète Finance soutient financièrement ce type d’initiatives.
Enfin, le projet indien Simputer, contraction de « Simple Computer » nourrit l’espoir. « Le Simputer tient dans une main, il ne nécessite pas de connaissances en informatique et parle différentes langues, ce qui le rend accessible aux analphabètes, explique l’un de ses créateurs, Vinay Deshpande. Une prise de téléphone et son alimentation grâce à trois piles ordinaires permettent de le connecter à la Toile et règle le problème de l’électricité. Enfin, il ne coûtera que 200 euros environ. »
Le Simputer peut-il jouer, pour l’essor d’Internet en Afrique, le rôle que la radio a joué dans le développement des médias ? Va-t-il inciter les Etats à se pencher un peu plus sur l’opportunité que représente l’e-gouvernement ? Peut-être. Comme l’affirmait dès l’an 2000 Ibrahima N’Diaye, maire de Bamako, « pour devenir un outil au service de la démocratie, Internet doit de toute façon être préalablement démocratisé ».

Loïck Coriou et Alexandre Martin

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