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05/09/2003
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Afrique de l’ouest : le difficile chemin de la paix
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La situation de l’Afrique de l’Ouest, mise à mal par les conflits civils au Libéria, en Sierra Leone et en Côte d’Ivoire, reste précaire malgré les accords de paix conclus dans les trois pays avec l’aide de la communauté internationale et les efforts de la Cedeao.
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Le retour à la stabilité dans cette sous-région naguère paisible demeure tributaire du désarmement et de la réinsertion des miliciens armés, souvent très jeunes, qui ont foisonné tant du côté gouvernemental que des rébellions, et de l’arrêt de la prolifération des armes légères. Ce trafic favorise non seulement les affrontements politiques ou ethniques mais aussi les réseaux criminels qui font aussi bien la contrebande des armes que de la drogue, des diamants, du bois ou d’autres matières premières.
Lutte contre la pauvreté et la malgouvernance
En 2001, à l’occasion d’une conférence internationale sur le commerce illicite des armes légères, les Nations-unies avaient souligné qu’aucune région ou pays du monde n’était à l’abri des conséquences terribles de leur prolifération, les estimant à quelque 7 millions en Afrique de l’ouest.
Une mission du Conseil de sécurité de l’Onu qui s’est rendue au début de l’été dans cette région a affirmé que la communauté internationale devait s’attaquer tout d’abord aux problèmes de la pauvreté, de la mauvaise gouvernance, de la prolifération des armés légères et des mouvements transfrontières des mercenaires, si elle voulait éliminer les causes de conflit. Elle a aussi mis l’accent sur la nécessité de consacrer plus de moyens et de ressources pour résoudre d’autres problèmes persistants, tels que le non-respect des droits de l’homme, le mauvais traitement des réfugiés, l’utilisation d’enfants soldats et le manque d’accès à l’aide humanitaire, préconisant un renforcement de l’appui à la Cedeao et aux initiatives sous-régionales.
Si la Sierra Leone a paru plus stable que lors de la précédente mission du Conseil de sécurité en 2000, la situation s’est, selon les experts de l’Onu, « gravement détériorée » dans plusieurs autres pays. Ils ont notamment cité la Côte d’Ivoire, en proie aux difficultés liées à l’application de l’accord de paix Linas-Marcoussis, la Guinée Bissau, du fait du report des élections législatives et des menaces contre les libertés démocratiques et, bien sûr, le Libéria, où les humanitaires, arrivés en nombre à Monrovia après le départ du président Charles Taylor et l’accord officiel conclu à Accra au Ghana, estiment que la situation est encore loin d’être sécurisée dans le reste du pays.
Une force de stabilisation des Nations-Unies doit prendre à partir du 1er octobre prochain le relais des troupes envoyées au Liberia par la Cedeao. Celles-ci ont bénéficié d’un soutien américain, bref et minimum, bien que les États-Unis (qui ont tout fait pour obtenir le départ de Charles Taylor) aient fait une démonstration de force en dépêchant des bateaux de guerre au large de Monrovia. Début septembre, près de 15 jours après l’accord de paix d’Accra, plus de 50 000 civils, déjà déplacés par une guerre de 14 ans, fuyaient les combats dans le centre du pays et se dirigeaient vers la capitale Monrovia, à 109 km plus au sud. Mohamed Ibn Chambas, le secrétaire exécutif ghanéen de la Cedeao, a demandé fin août au Conseil de sécurité de l’Onu que tout soit fait pour arrêter d’urgence la prolifération des armes légères en Afrique de l’Ouest, soulignant que nulle part ailleurs qu’au Libéria et dans les pays de l’Union du fleuve Mano, les conséquences néfastes n’ont été plus évidentes.
La Côte d’Ivoire, où deux militaires français du dispositif Licorne ont été tués par des éléments des anciens rebelles des Forces nouvelles, a pour sa part été secouée fin août par une affaire de « complot » après une tentative de coup déjouée par la France, attribuée notamment au sergent-chef Ibrahim Coulibaly, dit « I.B. ».
Côte d’Ivoire : situation sécuritaire en amélioration
L’Onu a constaté dans un rapport publié le 13 août que la situation sécuritaire s’est améliorée en Côte d’Ivoire, mais a mis l’accent sur certains facteurs préoccupants, notamment des achats d’armes aussi bien par le gouvernement que par les forces rebelles. L’organisation internationale a aussi évoqué l’activité de milices armées à Abidjan opposées aux accords de paix et les barrages maintenus sur certains axes routiers dans le nord par des éléments incontrôlés des Forces nouvelles. Elle a aussi fait état de la présence persistante de mercenaires libériens dans l’ouest.
Certains observateurs à Abidjan redoutent aussi une montée dans le sud du pays des sentiments anti-français, malgré les gages de soutien donnés par Paris à Laurent Gbagbo avec la dernière affaire de complot, mais également anti-burkinabe et anti-maliens, considérés comme proches des rebelles du nord et accusés de profiter de la situation pour faire du commerce illicite.
La Guinée voisine continue quant à elle à recevoir de nouveaux réfugiés libériens fuyant toujours les combats dans le nord de leur pays. Ce pays a pour le moment échappé aux soubresauts violents qui ont secoué la Sierra Leone, le Libéria et la Côte d’Ivoire. Mais l’incertitude demeure quant à son avenir politique et la succession éventuelle du général Lansana Conté, sérieusement malade, selon les dernières informations.
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Marie Joannidis
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