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21/05/2003
La chronique de Gérard Dreyfus : Tour de France : une polémique sans victime

(MFI) Le Tour de France cycliste s’est payé une belle polémique. Avait-il l’obligation ou non d’inviter le porteur du maillot arc-en-ciel, autrement dit le champion du monde, l’Italien Mario Cipollini ? La réponse est non. Appelés à choisir les quatre dernières équipes autorisées à prendre le départ le 5 juillet à Paris, les organisateurs ont préféré une équipe française à la formation italienne du champion.

Les patrons du Tour de France se comportent comme des dictateurs. Ils font ce qu’ils veulent au mépris de la bienséance démocratique et du sport qu’ils prétendent défendre. Le moins qu’on puisse dire, c’est que les Italiens n’ont pas du tout goûté la plaisanterie : Mario Cipollini écarté du Tour comme un vulgaire gregario (équipier), le jour où, coïncidence, il bat le record de victoires d’étapes dans le Tour d’Italie. C’est une insulte à l’Italie, à Cipollini et à son maillot arc-en-ciel de champion du monde, l’un des plus recherchés dans le cyclisme professionnel. Une colère tout à fait recevable, s’il n’y avait une jolie collection de mais.
Et d’abord, Cipollini n’est pas né de la dernière pluie. On le connaît bien. Il est venu neuf fois sur la route du Tour. S’il y a remporté douze étapes, il n’est jamais allé au bout, désertant la course dès l’apparition des premières pentes. Son maillot aurait fait beau au départ, mais aurait disparu après huit jours de compétition.
Cette année, le Tour revêt un caractère exceptionnel : il célèbre son centième anniversaire et sa quatre-vingt-dixième édition. Peut-on s’étonner qu’il veuille tout à la fois fêter ses champions, sans distinction d’origine, comme il l’a toujours fait, et associer le plus grand nombre de coureurs français ? Ils seront entre trente-cinq et quarante, ce qui n’est pas considérable. Qui pourrait, raisonnablement, reprocher aux organisateurs un parti-pris légèrement cocardier en cette année pas comme les autres ?
Le Tour a tant fait pour le cyclisme mondial qu’on ne peut que réfuter d’emblée toute accusation de nationalisme étroit. C’est bien simple, si le Tour de France n’existait pas aujourd’hui, il est probable que le cyclisme tout entier serait moribond. Le Tour d’Italie, pas plus que le Tour d’Espagne, ne bénéficient ni de la même notoriété, ni du même impact médiatique. Le Tour est un véritable événement mondial.
Sportivement, la présence de Mario Cipollini ne s’imposait pas d’évidence. Ce n’est pas un crime de lèse-majesté de lui avoir fermé la porte. Et toutes les déclarations – « Je pensais faire partie du patrimoine, je pensais mériter le Tour » – dignes de la commedia del arte n’y changent rien. Dans son plaidoyer pro domo, l’Italien expose un argument qui mérite réflexion : « Ils jugent en fonction des équipes alors que le cyclisme est une affaire de champions ». A cette nuance essentielle que sans l’aide d’une très bonne équipe, il n’est pas vraiment pensable de gagner le Tour. Le cyclisme est à la fois sport individuel et sport d’équipe. Les organisateurs ont fait leur choix : laisser sur le bas-côté un champion, au demeurant sympathique, qui s’éclipsera dès que la route lui fera de l’ombre, au bénéfice d’une équipe qui se battra jusqu’au bout pour justifier sa présence.
La France a trop souvent préféré les champions des autres à ses propres champions pour qu’on vienne lui reprocher d’avoir fait jouer, pour une fois, la fibre nationale quand la balance était à l’équilibre. Il est arrivé que les Italiens, par le passé, boudent l’épreuve parce que cela les arrangeait. Non, Cipollini n’est pas une victime.


Gérard Dreyfus

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