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07/11/2003
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La chronique de Gérard Dreyfus :
Le football africain fait son chemin, malgré les obstacles
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(MFI) Les éliminatoires du tournoi olympique de football témoignent que l’Afrique devra continuer de batailler pour voir reconnaître tous ses droits sur la scène internationale.
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Les faits se sont déroulés lors de la première journée de la seconde phase des éliminatoires olympiques : plusieurs sélections (-23 ans) ont dû opérer sans une partie de leurs joueurs professionnels, leurs clubs ayant refusé de les libérer, avec la bénédiction de la FIFA.
On ne peut pas gagner à tous les coups
Il y a quelques semaines, à Doha au Qatar, où se tenait une assemblée générale extraordinaire de la FIFA, cette dernière avait décidé de mettre un terme aux naturalisations footballistiques abusives. Elle pointait du doigt, en particulier, trois pays, Belgique, France, Grande-Bretagne qui, pour ne plus avoir de problèmes avec les va et vient intempestifs, sélectionnaient une fois dans une ou l’autre de leurs équipes de jeunes, un joueur africain ou originaire des Caraïbes, ce qui lui interdisait à tout jamais de rejoindre l’équipe nationale de son pays d’origine. Il s’agissait alors d’une victoire notamment pour l’Afrique, plus généralement pour les pays les moins favorisés de la planète.
Mais, partant du principe qu’on ne peut pas gagner à tous les coups, une défaite devait arriver. Elle n’a pas tardé à survenir. Prenant argument que les matches éliminatoires des Jeux Olympiques n’étaient pas inscrits à son calendrier, la FIFA a donné raison aux clubs qui refusaient de lâcher leurs joueurs. Le calendrier officiel comporte douze rencontres dans l’année, aucune n’apparaît aux dates retenues pour les J.O. ; il est vrai que ledit calendrier a été établi avant qu’on prenne connaissance de celui du tournoi olympique d’Athènes. Les clubs français ont profité de la faille pour s’y engouffrer, l’AS.Nancy-Lorraine en tête. L’ancien club de Michel Platini aurait dû se priver de trois joueurs, Pape Diakhaté (Sénégal), Moncef Zerka (Maroc) et François Zoko (Côte d’Ivoire). Ce qu’il n’a pas fait, appliquant les règlements à la lettre. Curieusement, les éliminatoires olympiques et le tournoi lui-même apparaissent des parias dans le calendrier. Ils relèvent du Comité international olympique, pas de nous, répondent les responsables du football international. Question : faut-il le supprimer ? C’est un autre débat. Les mauvaises langues diront que, comme les deux dernières éditions sont revenues au Nigeria et au Cameroun, il est peut-être temps de ne pas trop laisser au continent africain la bride sur le cou.
Confiance aux joueurs locaux
Bien sûr, on aimerait que les meilleurs puissent être présents à tous les rendez-vous. Mais il ne faut pas se leurrer : c’est quasiment impossible dans la mesure où les intérêts des clubs employeurs et des fédérations ne sont pas les mêmes, disons même qu’ils sont antinomiques dans le cas qui nous préoccupe. Changements de climat, longs voyages aériens, systématisation des retours approximatifs, ce sont là quelques-uns des reproches avancés par les clubs qui n’entendent pas libérer leurs joueurs au-delà de ce que leur imposent les règlements.
Battus sur un autre terrain à Doha, ils ne vont pas céder alors que la FIFA dit qu’ils sont dans leur bon droit. Reste, comme on ne cessera de le répéter, que le football africain ne peut pas uniquement vivre sur le retour de ses expatriés. Ces dernières années se sont multiplié les centres de formation locaux. Ont-ils sorti beaucoup de joueurs ? Ont-ils servi la cause nationale ou bien n’ont-ils été que la simple opportunité de transferts lucratifs ? Les clubs ont-ils eux aussi, choisi de développer une authentique politique de jeunes ? Apparemment ce sont les pays les moins nantis, ceux du Sahel, Mali et Burkina Faso plus spécifiquement, qui ont le plus œuvré dans ce sens. La bonne politique est une politique de jeunes. L’Afrique ne peut pas ne compter que sur ses professionnels dont certains, rappelons-le, n’ont jamais mis les pieds sur le continent, sont nés ailleurs et bénéficient de la double nationalité que leur confère leur lieu de naissance et la nationalité de leurs parents. Le vrai problème est bien celui-ci : une grande partie des sélections africaines, à partir des juniors, parfois des cadets, repose sur les « pros » alors que le football d’Afrique irait beaucoup mieux s’il s’appuyait sur des joueurs opérant régulièrement dans le pays. Encore faudrait-il qu’il y ait des compétitions cadettes et juniors !
De toute façon, avec ou sans les expatriés, les sélections olympiques sont sur un pied d’égalité avec leurs voisins. Quant au tournoi final, il a démontré que les sélections africaines, avec leurs deux médailles d’or consécutives, avaient franchi un grand pas. Tout simplement celui du haut niveau. Cadets, juniors, olympiques…le continent fait sûrement, même si sa rapidité ne correspond pas toujours à l’attente des supporteurs, son chemin. Qui tôt ou tard mènera une, voire deux sélections à s’illustrer dans l’épreuve majeure, la Coupe du monde.
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Gérard Dreyfus
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