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05/03/2004
La chronique de Gérard Dreyfus :
Au bonheur de la défaite


La déconvenue des Lions de la Teranga lors des quarts de finale de la dernière Coupe d’Afrique des nations n’est pas passée inaperçue. Parce qu’en l’espace de quatre années le Sénégal s’était taillé une jolie réputation dans l’épreuve (quart de finaliste en 2000 et finaliste en 2002) et plus encore lors de la phase finale de la dernière Coupe du monde. Même si on savait que l’esprit de conquête n’était plus très présent, on pensait que l’aventure se prolongerait. Il est vrai qu’affronter le pays organisateur en quart de finale n’est jamais un cadeau. Mais, laissons à d’autres – ils s’en chargent très bien – le soin d’alimenter la polémique, pour convenir que le malheur des Lions se révèle plutôt une bonne affaire pour le reste du sport sénégalais.

Le football budgétivore

Car dans le domaine du sport, comme dans les autres domaines de l’activité humaine dépendant de l’Etat, il faut faire des choix, rendre des arbitrages, doper financièrement les uns, écarter les autres des mannes budgétaires. Et le Sénégal, en cette année 2004, avait choisi de miser à fond la carte football, octroyant 1 milliard 544 millions de francs CFA pour le déplacement en Tunisie, contre 400 millions pour les Jeux Olympiques d’Athènes et 330 millions pour les autres épreuves internationales. Pas de quoi faire des folies ni entasser médailles sur médailles. Pas de quoi non plus étonner quand on sait que partout où le football est roi, les autres disciplines sont réduites à la portion congrue. Elles sont tellement nombreuses que les ministères de tutelle ne savent plus trop de quels côtés ouvrir les cordons de la bourse.
Au Sénégal, vingt-cinq d’entre elles disposeront cette année d’un passeport pour une gloire hypothétique, athlétisme et basket-ball en particulier. En réalité, l’échec des Lions de la Teranga est plutôt une bonne affaire pour le sport sénégalais, dans la mesure où l’argent affecté à l’équipe a été très loin d’avoir été dépensé dans sa totalité (primes réduites). L’économie opérée s’élèverait grosso-modo à la moitié du coût envisagé de l’opération. On parle de 800 millions. De là à penser que les fédérations sportives du pays ont rigolé un bon coup quand Jawhar Mnari a désillusionné Pape Malick Diop et ses camarades à Tunis, il y a un pas qu’il vaut mieux éviter de franchir. Souvent un dirigeant de fédération est autant supporteur de son équipe de foot que de son propre sport, quand ce n’est pas plus ! Et tous, au Sénégal, ont d’abord pensé à l’élimination prématurée avant de penser à leur cassette.


Le malheur des uns…

Le malheur des « footeux » fera donc cette année le bonheur de presque tous les autres – il y a aussi une hiérarchie des priorités dans les autres disciplines – avec pour objectif majeur d’aller gagner quelque chose. Le sport ne se conçoit guère sans la nécessité de victoires (il en va dit-on, de l’intérêt national, presque du sens civique). On peut naturellement se prendre à rêver, imaginer que le football finira bien un jour par laisser la paix aux autres sports en ne monopolisant pas à son seul profit les mannes de l’Etat. Au Sénégal, cela fait une dizaine d’années qu’on joue aux arbitrages budgétaires…toujours en faveur du foot. Même quand les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. On peut toujours se dire que si Athènes se passe bien, il y aura peut-être quelques changements d’attitude dans le futur. Restons réalistes. La position du football est si dominante que personne n’envisage de ne pas se donner les moyens de réussir. Mais le sport n’est pas une science exacte. L’argent conditionne une certaine forme de réussite, mais ne la garantit pas.
L’Etat fait ce qu’il peut avec les moyens qui sont les siens. S’il faisait moins pour le football, il aurait toute la population sur le dos. Car rien n’est trop beau quand son équipe gagne. Et rien n’est plus miséreux qu’un sportif qui perd. Le public est impitoyable ; à commencer par les journalistes. En Tunisie, ils étaient cinq dizaines à accompagner les Lions chez les Aigles de Carthage. Pour les autres sports, soit ils se défilent, soit les entreprises de presse qui les emploient ne voient pas la nécessité d’investir…inutilement, puisque le retour sur investissement (inserts publicitaires, accroissement des ventes) risque de se révéler inexistant.


Gérard Dreyfus

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