Petits pays, grands talents
(MFI) Le talent n’a pas de frontières, les footballeurs professionnels africains viennent de nombreux pays du continent. Mais dans le présent comme le passé, certains sont ressortissants de nations qui jouent un rôle mineur dans les compétitions internationales. Voici quelques cas qui illustrent assez bien ce phénomène.
George Weah et le Liberia : la greffe n’a jamais réellement pris
(MFI) Désigné comme meilleur footballeur professionnel dans les années 90 avec le Ballon d’or du bi-hebdomadaire France Football, le Libérien George Weah n’a jamais connu de grand succès avec la sélection nationale de son pays. Pourtant, dans les années 1990, le Liberia avait nombre de joueurs de bon niveau évoluant en Europe. Weah, considéré comme le « grand frère », a essayé de les rassembler et les mobiliser pour la cause nationale.
L’ancien joueur de Monaco, Paris Saint-Germain et Milan AC sortait même fréquemment son carnet de chèques pour payer l’intendance de la Lone Star (le nom de la sélection). Mais la greffe n’a jamais réellement pris et l’équipe n’a jamais pu réunir des joueurs de qualité à tous les postes. Ainsi, Weah joua parfois en défense centrale ou en milieu de terrain. On peut toutefois remarquer que c’est avec Weah que le Liberia a obtenu deux fois, en 1996 et 2002, une place pour la phase finale de la Coupe d’Afrique des nations. Auparavant, son pays ne jouait que les seconds rôles dans la Coupe Amilcar Cabral de la zone 2 du Conseil supérieur du sport en Afrique.
Mohamed Kallon et la Sierra Leone : le prochain horizon est la CAN 2008
(MFI) Meilleur buteur du championnat de France avec ses dix buts à Monaco, à l’issue de la 21ème journée, Mohamed Kallon est la principale vedette des Leone Stars (la sélection nationale) dont il est le capitaine. En dehors de Kallon, ils sont une dizaine de footballeurs évoluant comme professionnels à des niveaux divers en Europe. Paul Kpaka, qui est un attaquant de 23 ans évoluant dans le championnat de Belgique avec le club de Genk, est considéré comme un espoir. Mais les professionnels sierra-léonais n’ont pas su qualifier leur équipe nationale lors des préliminaires contre les Congolais. Si bien qu’ils n’ont pas joué avec la sélection en 2004. Kallon et ses co-équipiers devront attendre la fin 2006 pour espérer rejouer en compétition avec la sélection. La Sierra Leone n’a participé qu’à deux éditions de la CAN, en 1994 et 1996 ; Kallon n’était âgé que de 15 ans en 1994. Comme le Liberia, la compétition de prédilection de la Sierra Leone était le tournoi de football de la Zone 2.
Les Tchadiens Toko et Ndoram n’ont pas de successeurs en Europe
(MFI) Nambatingue Toko et Japhet Ndoram ont été, dans les années 1970-1980 et 1990, deux remarquables attaquants dans le championnat de France. Toko à l’OGC Nice et au PSG dans le rôle de buteur et Ndoram au FC Nantes, avec un registre plus varié, celui de constructeur et de réalisateur. Ils n’ont pas cependant su faire grand-chose pour la sélection nationale de leur pays. Toko (né en 1952) a joué dans les années 1970-1980, à un moment où la guerre sévissait dans son pays. A la fin des hostilités, son benjamin Ndoram (qui a vu le jour en 1966) n’a pas su faire profiter les « Sao » de ses talents. Ces deux footballeurs n’ont pas de successeur à leur hauteur. Il est vrai que le football tchadien n’a pas été riche en professionnels évoluant en Europe, notamment en France où en dehors de Toko et de Ndoram, on ne relève que Al Habo Senoussi qui joua surtout en D2 avec Rennes à la fin des années 1980. Le seul footballeur tchadien recensé parmi les professionnels pour la présente saison est Mahamat Hissein qui joue dans le club de Gueugnon.
Eusebio, le stratège du Portugal des années 1960 venait du Mozambique
(MFI) Eusebio Da Silva Ferreira n’a jamais porté les couleurs de son pays d’origine, le Mozambique. Il a revêtu celles du pays colonisateur, le Portugal, dans les années 1960-1970. Mais cet attaquant racé et félin, qu’on appelait le « Pelé européen » en référence au joueur brésilien qui était son contemporain, a beaucoup fait pour la promotion du football sur le continent. De nombreux jeunes Africains ont été surnommés Eusebio, un hommage à la grande star qui a évolué avec d’autres enfants du Mozambique, notamment Mario Coluna, capitaine de la sélection du Portugal, 3ème à la Coupe du monde en 1966 en Angleterre. Lors de l’indépendance, ce dernier a rejoint le pays natal pour aider au développement du football mozambicain. En dépit de trois participations à la CAN (1986, 1996 et 1998), le Mozambique n’a plus révélé de footballeur du talent d’Eusebio ou Coluna. Comme dans le passé, la destination naturelle des professionnels mozambicains est le Portugal. Dans le championnat d’élite du Portugal 2004-2005, on relève deux joueurs peu connus : De Sousa Fonseca à Setubal et Mukana Paito au Sporting du Portugal.
Kouassi Guesdet
La petite confrérie des goals africains de l’élite française
(MFI) Deux titulaires avec le Sénégalais Tony Sylva à Lille et le Franco-Camerounais Charles Itandje à Lens, des remplaçants de choix comme les Ivoiriens Gérard Gnanhouan (Sochaux) et Daniel Yeboah (Bastia) : il n’y a jamais eu autant de gardiens de but originaires d’Afrique noire dans l’élite française. Le choix des clubs français se portant dans un premier temps sur les attaquants, les premiers professionnels africains sont pratiquement tous des buteurs. Puis vinrent les défenseurs. Les gardiens de but viendront bien après et l’effet du Guyanais Bernard Lama, premier gardien de couleur de haut niveau dans les buts de l’équipe de France de football n’y est sans doute pas étranger.
Le premier gardien issu d’Afrique subsaharienne dans l’élite française, Joseph-Antoine Bell, est arrivé à Marseille en 1985 à l’âge de …31 ans. Le goal camerounais, qui a joué jusqu’à 39 ans à l’OM, puis à Bordeaux et Saint-Etienne, a fait des émules. D’abord son rival en sélection, Jacques Songo’o, gardien du FC Metz. Puis vint le héros de la CAN 92, l’Ivoirien Alain Gouaméné trimballé dans de petits clubs (Angers et Lorient) alors qu’on lui faisait miroiter Lyon.
Révélé lors des JO de Sydney, avec l’équipe olympique du Cameroun lauréate de la compétition, Idriss Kanemi n’a pas eu la confiance de l’entraîneur du club du Havre. Aujourd’hui, il est titulaire indiscutable à l’Espanol de Barcelone.
Si Sylva et Gnanhouan sont titulaires dans les sélections du Sénégal et de Côte d’Ivoire, Itandje a choisi de jouer pour la France si on faisait appel à lui. Pourtant, il a longtemps hésité avant de dire non au pays de ses parents, lui qui est né en France. « J’ai réfléchi six mois et dit non. (..) Entre les déplacements pour les matches éliminatoires ou la Coupe d’Afrique, qui se dispute tous les deux ans en janvier, j’aurais vite fait d’être en difficulté dans mon club. Cette décision est très difficile à vivre. (…). Il faut du courage pour aller contre la volonté du club qui vous emploie », se justifiait-il récemment dans le quotidien parisien Libération.
K. G.
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