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10/12/2004
Or brun : des cours sous influence

(MFI) Comme ceux du pétrole, les cours mondiaux du cacao restent tributaires des aléas du marché et de l’insécurité dans les pays producteurs : ainsi les violences en Côte d’Ivoire, numéro un mondial, se sont immédiatement répercutées sur le prix de la fève de cacao, qui a fluctué ces derniers mois au gré de la situation à Abidjan.

Selon l’Organisation internationale du cacao (ICCO), le cours de la fève, qui était en deçà de 1 400 dollars par tonne à la fin du mois de juin 2004, atteignait 1 742 dollars le 3 décembre. Certes, on est encore loin des sommets atteints à la fin des années soixante-dix. A l’époque, rappelle la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced), alors que la production était jusque-là concentrée au Ghana, au Nigeria, en Côte d’Ivoire et au Brésil, les cours internationaux avaient connu une forte hausse qui a encouragé des pays comme l’Indonésie et la Malaisie à s’engager dans le cacao. Ils dépassaient même par moment les 3 500 dollars par tonne. Mais une forte baisse a été ensuite enregistrée dans les années quatre-vingt. Malgré une reprise lors de la dernière décennie du siècle, les cours n’ont jamais retrouvé le niveau record de 1977, année où la Côte d’Ivoire a ravi au Ghana la place de premier producteur mondial.
La fève, souvent appelée « or brun » même si ce pactole ne profite pas toujours aux petits producteurs, est cultivée principalement en Afrique de l’Ouest, en Amérique latine et en Asie. Les huit plus grands pays producteurs de cacao sont à présent, dans l’ordre décroissant, la Côte d’Ivoire, le Ghana, l’Indonésie, le Nigeria, le Brésil, le Cameroun, l’Equateur et la Malaisie, représentant ensemble 90 % de la production mondiale. La production mondiale de fèves de cacao, troisième matière première la plus échangée dans le monde, s’élève à près de 3 millions de tonnes par an, représentant plus de 4 milliards de dollars de chiffre d’affaires.


Un parasite détruit systématiquement une partie des récoltes indonésiennes

En tête donc, et de loin, la Côte d’Ivoire dont la dernière récolte s’est élevée à 1,45 million de tonnes, soit près de 45 % du marché mondial. Elle est suivie par le Ghana (12 % du marché), qui devrait réaliser sa meilleure récolte depuis quarante ans, mais qui profite aussi de la contrebande de fèves venues de son voisin ivoirien. L’Indonésie (10 %) rêve de détrôner Abidjan d’ici 2010, prévoyant une augmentation considérable de ses surfaces cacaoyères, qui s’étendent actuellement sur 700 000 hectares. Mais un parasite persistant détruit systématiquement une partie de ses récoltes. Le Brésil et Nigeria (5 à 6 % chacun) complètent le tableau des principaux producteurs.
Pour le moment, la Côte d’Ivoire ne semble pas avoir vraiment souffert de la dernière crise politique, la récolte ayant été faite avant la reprise des violences début novembre 2004. D’autant que les principaux ports d’exportation, Abidjan et San Pedro, ont été rouverts après une période de fermeture. « La multiplication des barrages et de contrôles militaires sur les voies d’acheminement ont toutefois ralenti le processus et peuvent créer des incertitudes », souligne un expert du secteur. Les petits producteurs ivoiriens s’estiment pour leur part lésés par les cours auxquels on achète leurs fèves. Les autorités ont d’ailleurs, à un moment, envisagé la possibilité de rétablir un mécanisme de stabilisation des cours, à l’image de la « Caistab », la caisse de stabilisation démantelée en 1999.


Prise de contrôle de la filière par les grands groupes broyeurs mondiaux

Si le cacao est largement produit dans les pays en développement, ses dérivés sont principalement consommés dans les pays industrialisés, les acheteurs étant essentiellement l’industrie chocolatière. Une poignée de multinationales contrôle ainsi à présent la transformation des fèves et la confection de chocolat. Pour Bruno Losch, expert mondialement reconnu de l’Institut de recherche agronomique Cirad, la libéralisation complète de la filière cacaoyère ivoirienne à la fin des années quatre-vingt-dix, sous l’influence de la doctrine libérale du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, est venue clore un processus de restructuration du marché mondial engagé au cours des années quatre-vingt.
La Côte d’Ivoire était, selon lui, le dernier obstacle à la domination de grandes firmes multinationales spécialisées dans le broyage des fèves. Les sociétés ivoiriennes issues de la privatisation avaient besoin d’alliances internationales et les grands broyeurs mondiaux recherchaient une garantie de leurs approvisionnements. Ces deux facteurs se sont traduits par un renforcement des processus d’intégration verticale, qui a notamment eu pour conséquence le développement de la transformation sur place en Côte d’Ivoire.
Cependant les sociétés ivoiriennes, déstabilisées par leur croissance trop rapide et par les perturbations politiques qui ont suivi le coup d’Etat de la fin de 1999, ont connu des ennuis financiers, ce qui a facilité la prise du contrôle de la filière par les grands broyeurs mondiaux. Ces derniers suivent de près l’évolution politique en Côte d’Ivoire, et certains groupes ont, par précaution, augmenté leurs activités de transformation en dehors du pays, notamment au Ghana voisin.


Marie Joannidis

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