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17/04/2003
Crevettes : la ruée vers l’or rose d’Afrique

(MFI) Le potentiel africain de crevettes attire les investisseurs. Fish Tunisie, Aquapesca au Mozambique, Crustamer et Sobep au Bénin, sans parler des multiples entreprises qui prospèrent à Madagascar : elles ne se contentent plus de la pêche mais créent des fermes aquacoles pour produire sur mesure et transformer sur place des crustacés adaptés aux marchés de l’exportation.

Environ 106 000 tonnes. Telle est la production africaine de crevettes. Une goutte d’eau dans l’océan que représente la production mondiale, évaluée à plus de 4 millions de tonnes. Le continent noir peut mieux faire. A condition de considérer cette ressource halieutique comme une véritable opportunité d’exportation. Or, sur les 29 pays africains qui produisent des crevettes, ceux qui pointent le bout du nez sur le marché mondial se comptent sur les doigts d’une main. Parmi eux, le Nigeria, numéro un africain, avec 20 500 tonnes annuelles, Madagascar qui commercialise bon an mal an 17 000 tonnes, et le Maroc dont la production atteint 13 000 tonnes.
L’essentiel de la production africaine provient de nappes d’eau naturelles : bras de mer, mangroves marécageuses salées… C’est le cas au Nigeria, au Sénégal, en Tanzanie et au Bénin. Le défi pour ces pays consiste à intensifier la production sans épuiser les ressources. Or plusieurs de ces nappes subissent des agressions liées au développement industriel, quand ce n’est pas l’effet d’une urbanisation débridée. Au Nigeria, les 600 000 hectares de mangrove sont menacés par des exploitations pétrolières et l’extension des villes environnantes. Les pêcheurs de crevettes installés aux alentours ont le plus grand mal à se faire entendre des autorités. Au Kenya, c’est une société minière qui menace de combler les mangroves pour les besoins de sa prospection. En outre, les pêcheurs eux-mêmes se livrent à une surexploitation des crevettes.

Préserver les ressources naturelles

Au Sénégal aussi : le préfet de la région de Fatick a dû prendre des mesures pour éviter que les crevettiers locaux ne scient la branche sur laquelle ils sont assis. Il a réduit la période annuelle de pêche et imposé des filets à mailles plus larges, afin d’épargner les toutes petites crevettes. Mais les pêcheurs contournent les règles de préservation. Beaucoup d’entre eux ne respectent ni les maillages réglementaires, ni les périodes de pêche. Résultat : on trouve, sur les marchés de Palmarin, Djinack ou Niodior, des crevettes qui n’ont pas encore atteint leur maturité. « Non seulement ces fraudeurs détruisent les ressources disponibles, mais ils mécontentent leurs propres clients », explique un agent de développement rural qui éprouve le plus grand mal à se faire entendre. A tel point que le gouvernement a fait appel à l’Union mondiale pour la conservation de la nature (UCN) pour sensibiliser les populations concernées. Reste à voir si cette campagne portera ses fruits.
Pour prendre sa place sur le marché international, l’Afrique doit compléter ses ressources naturelles par des produits issus de l’aquaculture. Seuls quelques pays y parviennent. Au Maroc, l’essentiel de la production est réalisée par 55 chalutiers spécialisés qui récoltent environ 7 000 tonnes par an pour une valeur de 26 à 27 millions d’euros. L’aquaculture commence seulement à émerger. Des sites privilégiés ont été identifiés : les estuaires de l’oued Tahadart et de Loukkos, la baie de Dakhla ainsi que les salines de Sidi Moussa. Quelques expériences de fermes industrielles ont commencé. Même situation en Tunisie, où la pêche en eaux côtières représente la quasi totalité des prises. L’élevage n’en est qu’à ses débuts.

Madagascar, champion d’Afrique de la crevette

En la matière, c’est surtout Madagascar qui a effectué le bond le plus spectaculaire. On y exploite des installations aquacoles à grande échelle et on ne recense pas moins de 1 700 bassins. Leur rendement moyen (4 tonnes par hectare) place même la Grande Ile parmi les producteurs les plus performants du monde. L'année dernière, l’aquaculture crevettière a rapporté 67 millions d’euros (450 milliards de francs malgaches). Le secret de cette expansion ? Une vigoureuse intervention de l’Etat, qui a facilité les aménagements de bassin et attiré des investisseurs. Une dizaine de fermes industrielles existent actuellement à Madagascar. D’autres implantations devraient suivre. L’Etat a déjà identifié plus de 15 000 hectares aménageables en bassins crevettiers. De quoi augmenter la production nationale d’au moins 54 000 tonnes. Un exploit, quand on sait qu’en 1994 encore le pays produisait à peine 500 tonnes d’or rose !
Le succès de Madagascar incite d’autres pays africains à investir dans cette filière. Au Sénégal, la coopération française finance une étude de faisabilité pour une écloserie pouvant produire 4 millions de larves par an. Un projet similaire est en cours au Bénin, où la production de crevettes connaît un développement spectaculaire : 333 tonnes exportées en 1995, près de 750 tonnes en 2002. En Guinée, c’est la Banque africaine de développement que le gouvernement a appelée à la rescousse. Les investisseurs privés ne sont pas en reste. Au Gabon, la société Amerger met la dernière main à un élevage qui devrait produire 2000 tonnes de crustacés par an. Au Mozambique, Aquapesca construira une ferme pilote de 20 hectares dans la région de Quelimane… La liste n’est pas exhaustive : les projets se multiplient d’autant plus que le marché est porteur et que les crevettes d’Afrique sont réputées de bonne qualité, à la différence des petites crevettes d’Asie. Les moyens industriels mis en place permettent désormais de traiter sur place les récoltes dans des conditions d’hygiène et de qualité qui satisfont les marchés internationaux, européens notamment. On n’est donc qu’au début de la ruée vers l’or rose d’Afrique.

Yolande S. Kouamé

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