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04/07/2002
Angola : les incertitudes de la reconstruction

(MFI) L’Angola, à peine sortie d’une guerre civile de 27 ans, la plus longue d’Afrique, cherche à consolider la paix intérieure et à renforcer son rôle de puissance régionale tant en Afrique australe que centrale. Les inconnues, notamment politiques, restent nombreuses. Et la catastrophe humanitaire réclame une mobilisation d'ampleur.

Paix et reconstruction sont les maîtres-mots à Luanda, trois mois après les accords du 4 avril qui ont mis fin au sanglant conflit entre les forces gouvernementales et l’Unita. Tant du côté du MPLA, le parti au pouvoir, que de l’ancienne opposition armée de l’Unita, on affirme que la guerre est bien finie et que la lutte politique commence. Mais dans quel contexte : l' économie angolaise, son agriculture et ses infrastructures sont en ruines. Beaucoup de routes sont encore minées ou impraticables, les ponts détruits. Et la situation humanitaire et sociale du pays est dans un état critique et nécessite argent et mobilisation de tous pour éviter des actes désespérés de banditisme dans un pays habitué à l’insécurité et à la circulation des armes. Les autorités multiplient les déclarations rassurantes et les visites dans les provinces longtemps délaissées. Tandis que l'état-major du MPLA réfléchit sur des nouvelles approches. Son secrétaire-général Joao Lourenco estime que l'ancien parti marxiste se trouve dans un « processus de rénovation continu », mais d'autres dirigeants demandent « plus de transparence » dans les décisions gouvernementales et affirment qu'il faut « s'occuper davantage du peuple. »

L'Unita doit refaire… son unité

Sur le plan politique, les anciens adversaires, toujours méfiants les uns des autres, savent qu’il faut d’abord réussir la paix avant de passer à la prochaine étape, c’est-à-dire la concurrence pacifique pour le pouvoir à travers des élections démocratiques. L’échéance électorale, la première depuis 1992, a déjà été fixée par le MPLA pour 2004, le Président dos Santos ayant annoncé l'an dernier qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat. Son parti ne s’est pas encore prononcé sur un candidat pour sa succession : la décision est repoussée à l’année prochaine.
L’Unita doit de son côté refaire son unité, entre dirigeants de l’intérieur, de l’extérieur et ceux qui s’étaient ralliés au gouvernement sous la houlette de l’Unita Renovada (Unita rénovée), ainsi que les députés, restés à Luanda tout en continuant à se réclamer du mouvement. Le MPLA et l'Unita sont de loin les forces dominantes parmi les quelque 200 partis et groupes politiques du pays… Le FNLA de Roberto Holden a, lui, beaucoup perdu de son importance, sauf dans certaines régions du nord.
Malgré les problèmes pressants de l'intérieur, les dirigeants de Luanda ne perdent pas de vue le rôle régional de l'Angola. Les forces armées angolaises (FAA) sont déjà présentes en RDC (République démocratique du Congo) et au Congo Brazzaville. Leur appui a été déterminant pour Kinshasa, d’abord aux côtés de Laurent Désiré Kabila puis de son fils Joseph. Elles ont permis le retour au pouvoir de Denis Sassou Nguesso à Brazzaville et protègent aussi bien le port pétrolier de Pointe-Noire que la capitale elle-même, comme cela a été le cas lors de la dernière attaque en juin contre l’aéroport de Brazzaville, par des partisans armés du révérend Ntoumi. Dans les deux cas, la préoccupation angolaise était avant tout sécuritaire : il fallait empêcher l’Unita d’utiliser ces pays comme bases arrières pour lancer des attaques contre le territoire national.


Des ambitions régionales qui s'appuient toujours sur les richesses du sous-sol

L'Angola présidera à partir du mois d’août la SADC (la Communauté de développement d’Afrique australe) où il se pose en rival de l’Afrique du Sud, le géant économique du continent, fort de sa victoire sur l’Unita et de ses richesses actuelles et potentielles. Ses réserves de pétrole en font déjà le deuxième producteur de l’Afrique subsaharienne après le Nigeria et le deuxième exportateur africain vers les Etats-Unis, au moment où ceux-ci cherchent à diversifier leurs approvisionnements pour se protéger contre la volatilité de la situation au Moyen-Orient et les pays du Golfe. Les grandes compagnies pétrolières se disputent depuis les années 90 l’offshore angolais, notamment le groupe franco-belge TotalFinaElf, deuxième partenaire de Luanda après l’américain Chevron.
Les diamants sont aussi devenus une source de revenus grandissants au fur et à mesure que le côté gouvernemental a récupéré les zones diamantifères occupées par l’Unita, soumise à un embargo international dans le cadre de la lutte contre les diamants « sales » qui financent les guerres en Afrique. Ces ressources vont faciliter à terme la reconstruction du pays mais ne sont pas facilement mobilisables pour répondre à l’ampleur du désastre humanitaire, qui est énorme.

Marie Joannidis


Le grand désordre humanitaire

(MFI) L'Angola comptait déjà quelque 4 millions de personnes déplacés de l’intérieur en raison de la guerre, soit le tiers d'une population estimée à 12 millions. Depuis avril dernier, une vague humaine de nouveaux déplacés est sortie de la brousse; elle compte plus de 85 000 soldats, cadres et employés civils de l'Unita et leurs familles, démobilisés dans quelque 35 cantonnements à travers ce vaste pays, ainsi que la population civile des anciennes zones rebelles. Leur nombre total est estimé à quelque 300 000 à 500 000 personnes, sans compter les milliers de réfugiés dans les pays voisins, Zambie et RDC en particulier.
Tout comme les autres nouveaux déplacés, les ex-combattants de l'Unita manquent de tout et d’abord de vivres et de médicaments que le gouvernement s’est engagé à fournir. Les autorités ont ainsi déjà dépensé 44 millions de dollars pour des importations d’urgence, du Brésil et de l’Afrique du Sud notamment. Mais elles ont fini par faire appel à l’aide international car l’afflux a dépassé leurs prévisions et les chiffres initialement annoncés par l’Unita (qui avait avancé le chiffre de 55 000 militaires).
Dans les centres nutritionnels de l’organisation humanitaire MSF France dans la province de Huambo (centre-sud du pays), un des anciens bastions de l’Unita fortement peuplé, les enfants dans un état critique viennent aussi bien de la brousse que des camps de cantonnement. Ils sont les plus vulnérables et leur taux de mortalité est élevé s’ils ne sont pas soignés à temps. MSF International dont des sections travaillent à travers les régions les plus touchées par la guerre s’était élevée début juin contre la lenteur de la réaction des Nations-Unies et du gouvernement face à ce nouveau drame humanitaire.
La mobilisation internationale commence toutefois – avec trois mois de retard. Le PAM (Programme alimentaire mondial des Nations-Unies) a lancé fin juin un appel urgent pour pouvoir nourrir 1,5 millions de personnes, soit 500 000 de plus que le million de déplacés dont il s’occupait jusqu'ici, demandant 241 millions de dollars pour les 18 prochains mois. Les États-Unis vont fournir cette année 75 millions de dollars pour l’aide humanitaire à travers les organisations de l’ONU et les ONG, y compris pour le déminage. L’Union européenne a annoncé une nouvelle aide d’urgence de 120 millions d’euros sans en préciser les modalités. Les bailleurs de fonds comme la Norvège, qui a déjà envoyé vivres et médicaments, ou la France qui étudie la question commencent aussi à réagir sur le plan bilatéral, plusieurs pays africains dont la Côte d’Ivoire ayant déjà fait un geste.
Les autorités angolaises, accusées par des ONG comme le Global Witness (britannique) de corruption et de détournements des fonds publics – accusations reprises par la presse indépendante et par certains parlementaires de l’opposition non armée – et dont les noms ont été citées dans des enquêtes judiciaires en France et en Suisse, doivent améliorer cette image, s’ils veulent bénéficier d’aides à la reconstruction après les secours d’urgence. « Le peuple attend beaucoup de nous », admet Joao Lourenço, le secrétaire-général du MPLA, qui affirme que les accusations de corruption sont « injustifiées » et que l’Angola a longtemps été obligé de dépenser de l’argent afin d’acheter des armes pour sa défense. « Nous pensons cette fois que la paix va durer », affirme-t-il. De leur côté les responsables de l’Unita affirment tout ignorer des comptes alimentés pendant des années par les diamants de contrebande…

M. J.




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