par Dominique Raizon (avec AFP)
Article publié le 22/01/2008 Dernière mise à jour le 28/02/2008 à 14:01 TU
Le 17 janvier 2007, la revue indépendante Prescrire organisait un débat à Paris : Monique Debauche, psychiatre belge, a noté que le volume de vente des antidépresseurs a été multiplié par deux en France en 10 ans, alors que ces médicaments peuvent s’avérer « anxiolytiques (…) et inutiles, la plupart des états dépressifs s'améliorant spontanément en quelques semaines ». Elle a expliqué cette « dérive du marché des psychotropes » par la forte demande des patients, « habitués à penser leur souffrance en termes de maladie curable par un médicament », ainsi que par la formation des médecins « centrés sur le médicament » et, surtout, par l'influence des firmes pharmaceutiques, « omniprésentes » dans la formation et l'information des soignants.
La psychiatre a dénoncé, à cet égard, des études cliniques « construites comme des supports promotionnels », avec un discours « façonné par la logique marchande ». Barbara Mintzes, chercheur canadienne en santé publique, a abondé en ce sens en évoquant le façonnage » de maladies, qui vise « à élargir la définition d'une maladie pour augmenter la quantité de traitements vendus », s’insurgeant contre la tendance à élargir le marché des psychotropes en direction des enfants pour l'hyperactivité, la dépression et les troubles bipolaires, en dépit de leur manque d'efficacité et de l'importance des effets secondaires.
Taux de suicide chez les jeunes
De facto, un pharmacologue, Gilles Mignot, a constaté la « panne de l'innovation » et l'absence de « progrès thérapeutique » au cours des cinq dernières années dans le domaine des médicaments psychotropes. Parmi les médicaments qui « n'apportent rien de positif pour les patients », il a cité des antidépresseurs augmentant le taux de suicide chez les jeunes et des neuroleptiques entraînant une surmortalité d'origine cardiovasculaire chez les personnes âgées.
Le mardi précédent, la revue de défense des consommateurs Que Choisir avait proposé de limiter les dépenses de promotion des laboratoires pharmaceutiques, considérant que la prescription est « trop largement influencée par l'industrie pharmaceutique ».
« La dépression, considérée autrefois comme une pathologie aigüe, est aujourd'hui appréhendée comme une affection chronique qui démarre sur des sujets de plus en plus jeunes. »
22/01/2008 par Joëlle Marcellot