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Bassin du Niger

Sauver le fleuve pour la survie de 110 millions d’individus

par Dominique Raizon (avec AFP)

Article publié le 29/05/2008 Dernière mise à jour le 29/05/2008 à 08:08 TU

Les présidents des neuf Etats du bassin du Niger se sont réunis à la fin du mois dernier à Niamey pour examiner un important programme financier censé sauver le fleuve en péril et susceptible de garantir la survie des populations riveraines. Le programme d'investissement de « sauvetage » du fleuve, d'un coût estimé à quelque 5,5 milliards d'euros sur les 20 prochaines années, sera accompagné d’une Charte de l'eau de l'Autorité du bassin du Niger (ABN), pour réglementer la gestion des ressources du bassin.

Le bassin du Niger peut devenir « un grenier pour l'Afrique » si les investissements adéquats sont réalisés© e.chabasseur

Le bassin du Niger peut devenir « un grenier pour l'Afrique » si les investissements adéquats sont réalisés
© e.chabasseur

Au programme : reboiser les berges du fleuve, récupérer les plaines dégradées et désensabler le bassin moyen comprenant la boucle du Niger au Mali, le nord-est du bassin au Burkina Faso et la rive droite du fleuve au Niger, en amont de Niamey. Seuls 19% des fonds du programme sont cependant acquis, « le reste sera mobilisé lors d'une table ronde des bailleurs de fonds dans deux mois », avait déclaré Seyni Seydou, responsable de la lutte contre l'ensablement du Niger, à la fin du mois d'avril dernier.

Depuis trois décennies, l'Autorité du bassin du Niger s'inquiète de la mort lente du fleuve, le troisième d'Afrique avec ses quelque quatre mille deux cents kilomètres de longueur et un bassin couvrant  plus de deux millions de km², soit le tiers de la superficie totale de l'Afrique de l'ouest.

La navigation et la reproduction des poissons sont quasi impossibles en raison des faibles débits et des plantes aquatiques nuisibles qui colonisent ses eaux : baisse de la pluviométrie, ensablement, pression démographique, végétaux flottants, déchets industriels et techniques de production inadaptées mettent en péril l'existence de ce cours d'eau, affirme l'Autorité. Des étiages sévères -voire des arrêts d'écoulement- ont été observés dès les années 1980, en territoires nigérien et malien.

« Un grenier pour l'Afrique »

L'extrême pauvreté de ses riverains et des Etats, font que seulement 20% des potentialités agricoles du bassin sont exploités, d'après l'ABN.(Photo : AFP)

L'extrême pauvreté de ses riverains et des Etats, font que seulement 20% des potentialités agricoles du bassin sont exploités, d'après l'ABN.
(Photo : AFP)

Ces contraintes, conjuguées à l'extrême pauvreté des riverains et des Etats, font que seulement 20% des potentialités agricoles du bassin (estimées à 2 500 000 hectares) sont exploités, d'après l'ABN.

Bien qu'irrigués par le fleuve ou ses affluents, le Mali, le Niger, le Tchad et le Burkina Faso continuent d'être confrontés à des crises alimentaires et des conflits inter-communautaires autour des rares points d'eau.

Pour le ministre nigérien de l'Hydraulique, Tassiou Aminou, le sort du bassin du Niger n'est toutefois pas encore scellé et il peut devenir « un grenier pour l'Afrique » si les investissements adéquats sont réalisés. Toutefois, les experts de l'ABN redoutent le pire pour les années à venir : avec l'afflux massif de « réfugiés écologiques », le bassin sera soumis à une occupation sauvage et à une surexploitation de ses ressources … « A moins d'inverser vite la tendance, la population du bassin doublera d'ici à 2025 du fait de la forte croissance démographique de 3% par an », préviennent-ils.

« Si elle perd son eau, il ne restera plus d'Afrique »

Aujourd'hui pourtant, en raison du manque d'argent, l'ABN créée en 1980, est impuissante à relever ces défis et les actions isolées des Etats sont inefficaces pour sortir le fleuve de l'agonie. A l'initiative de l'ancien président français Jacques Chirac, les chefs d'Etat de l'ABN s'étaient réunis en 2004, à Paris, en vue de « mieux harmoniser et coordonner » les politiques nationales de développement du bassin. « L'Afrique a perdu beaucoup (...), , avait alors averti le président nigérien Mamadou Tandja, mais si elle perd son eau, il ne restera plus d'Afrique ».

Depuis deux ans, la Banque africaine de développement s'est imposée comme chef de file des partenaires de l'ABN, avec une contribution de 37 millions d'euros pour financer le programme de lutte contre l'ensablement du bassin.