par Cerise Maréchaud
Article publié le 18/12/2008 Dernière mise à jour le 19/12/2008 à 09:33 TU
Le site de l'OCP (Office chérifien des phosphates) dans la région de Khouribga, avec au loin les fumées industrielles.
( Photo : Cerise Maréchaud / RFI )
Financé par le Maroc (Caisse de dépôt et de gestion), la France (Caisse des dépôts et consignations) et l’Europe (Banque européenne d’investissement) à hauteur de 300 millions de dirhams (soit 26,5 millions d’euros), le Fonds capital carbone Maroc (FCCM) va pouvoir investir dans des projets marocains visant la réduction des gaz à effets de serre, en achetant leurs « crédits carbone » pour les revendre à des émetteurs de C02 de pays industrialisés, dans le cadre du protocole de Kyoto que le Maroc a ratifié.
« Le Maroc a une carte à jouer », assure Saïd Mouline, président du Centre marocain de production propre, créé en 2000, et conseiller Développement durable du mastodonte phosphatier OCP. Eolien, solaire, biomasse, déchets sont autant d’atouts sur lesquels le royaume, qui accueillait en avril 2007 le premier Forum Carbone Moyen-Orient/Afrique du Nord, peut miser pour encourager les projets éligibles Mécanisme pour un développement propre (MDP), homologation onusienne requise pour vendre ses crédits carbone.
Pour l’heure, sur quelque 1500 projets MDP dans le monde, seuls quatre sont marocains, à savoir : les parcs éoliens d’Essaouira et de Tétouan, le projet de récupération de biogaz de la décharge de L’Oulja à Salé, et un de production d’électricité par kits photovoltaïques dans le milieu rural. Une dizaine d’autres auront bientôt le feu vert de l’ONU, d’autres encore sont en cours de validation ou à l’étude au niveau marocain.
Bientôt, 70 millions d’euros de crédits carbone par an
« Au total, le Maroc a un portefeuille MDP potentiel de 52 projets, ce qui représente plus de 70 millions d’euros par an de crédits carbone », explique Ali Agoumi, expert en réchauffement climatique. « Mais ce n’est pas le tout de créer un fonds pour l’achat et la vente de crédits carbone, nuance-t-il, il faut accompagner les entreprises dans la procédure de certification préalable, qui est longue et complexe ». Or, si des structures MDP sont en place, la dynamique ne suit pas encore, faute d’un manque de transparence, de sensibilisation, d’incitations à investir dans les technologies de production propre.
Le Maroc semble, pourtant, avoir intégré l’enjeu du développement durable comme l’illustre, par exemple, au sein de sa nouvelle stratégie agricole Maroc Vert, la valorisation des énergies éolienne et solaire. Un Fonds de dépollution a également été créé pour aider les entreprises et, autre initiative, le carburant dans les réservoirs marocains, jusqu’ici très sale, devrait être changé début 2009 contre un autre, plus propre. De son côté, l’OCP, l’un des plus gros pollueurs industriels au Maroc, a décidé de ne plus déverser en mer des rejets chimiques au niveau de Safi et El Jadida et s’est lancé dans une vaste opération de reboisement. Quant à son centre de recherche Cerphos, il étudie la mise au point de technologies d’agro-carburant alternatives (à base de déchets de bois, jaropha, algues), qui ne fassent pas flamber les cours des céréales.
« La moitié de notre eau potable part à l’étranger »
De là à saluer une réelle politique environnementale marocaine, il y a un pas que scientifiques et militants verts ne franchissent pas. Selon eux, l’Etat a voté en 2003 des lois sur l’environnement mais traîne quant à leur mise en application. Trop de grands projets sont encore réalisés sans étude d’impact environnemental indépendante et rigoureuse. « Les médias non plus ne jouent pas leur rôle », reproche Ali Agoumi. « Il n’est pas logique de prévoir 150 000 nouveaux logements par an et 10 millions de touristes sans réellement investir dans le chauffe-eau solaire », estime Saïd Mouline, ni de continuer à construire d’immenses golfes dans des régions déjà en proie au stress hydrique. « Au Maroc, 80% de notre eau douce sert à l’agriculture, elle-même en grande partie exportée. Ca signifie que plus de la moitié de notre eau potable part à l’étranger ! », s’alarme Moundir Zniber.
Fondateur en 2008, côté jardin, du premier festival écolo, Pour un Maroc vert, Moundir Zniber dirige, côté cour, la société Maroc Dômes, une agence d’évènementiel fondée sur la technologie des dômes géodésiques (« structure d’efficacité énergétique par excellence »), -qui propose également du conseil en développement durable aux entreprises de plus en plus attirées par cette niche innovante, qu’elles soient filiales ‘vertes’ de grands groupes ou bien modestes PME. Eolien, assainissement, biomasse, compostage : en mai dernier, le magazine marocain Challenge Hebdo saluait l’émergence d’une « nouvelle génération d’entrepreneurs « écolos » ».
Pour en savoir plus :
Consulter le site du (art.2005) Front français de l'Environnement mondial
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15/02/2008 à 06:35 TU