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Zimbabwe

Crise ouverte au Zimbabwe

A l'approche d'une élection législative que pourrait bien perdre le parti au pouvoir, le Zimbabwe traverse sa plus grave crise depuis l'indépendance. Une crise qui a débuté fin février par les premières occupations de propriétés de fermiers blancs qui détiennent toujours la majorité des meilleures terres du pays, alors même que leur récupération était la principale revendication de la lutte pour l'indépendance. Mais cette confrontation, parfois très violente, pourrait faire tâche d'huile dans les pays voisins, à commencer par l'Afrique du sud.

Confronté pour la première fois à une opposition déterminée, le président Mugabe joue son va-tout en s'attaquant aux quelques milliers de fermiers blancs que compte le pays. A première vue l'initiative paraît défendable: des anciens combattants zimbabwéens de la guerre contre l'ancien régime raciste occupent plus d'un millier d'exploitations, sur environ 4000, dans l'ex-Rhodésie.
Mais ces "vétérans" n'en sont pas forcément. Certains sont même de jeunes chômeurs recrutés à la hâte par le parti au pouvoir. Et surtout, ils bénéficient du soutien appuyé d'un chef de l'Etat en mal de popularité. Critiqué de toute part pour sa gestion, Robert Mugabe a depuis longtemps fait de l'expropriation des propriétaires blancs un argument électoral. Mais ses promesses ne suffisent plus à convaincre ses compatriotes de plus en plus nombreux à rejoindre l'opposition et son leader, le syndicaliste Morgan Tsvangirai. Celui-ci bénéficie également du soutien de la minorité blanche zimbabwéenne (et de la Grande Bretagne) et a toutes les chances de remporter les prochaines élections. Le chef de l'Etat joue ainsi sa dernière carte en orchestrant cette redistribution foncière improvisée. Or, les dérapages qui ont en résulté, avec la mort d'au moins deux fermiers blancs et de huit militants de l'opposition menacent durablement la stabilité du pays.
De son coté le gouvernement britannique a interrompu, il y a une dizaine d'années, le soutien financier à la redistribution des meilleurs terres, et pose désormais différentes conditions politiques à sa reprise. Ce que rejette catégoriquement Harare, qui ne cesse de rappeler que la question de la reforme agraire fait partie de l'héritage colonial.

Décidée lors d'un entretien Mugabe-Cook, au Caire lors du sommet Afrique-Europe, une réunion s'est tenue à Londres le 27 avril, entre le Royaume Uni et le Zimbabwe. Elle devait relancer le processus de redistribution des terres, mais aussi remettre sur le tapis la question de la démocratisation du régime actuel. Finalement, après huit heures de discussions "très franches", les deux parties se sont séparées sur constat d'échec: la délégation du Zimbabwe refusant de s'engager à mettre un terme aux occupations de terre ainsi que toute ingérence britannique dans les affaires de politique intérieure. De son côté la Grande Bretagne a confirmé avoir mis en place un plan d'évacuation de ses 25.000 ressortissants vivant au Zimbabwe, si la situation continuait de s'aggraver.



par Christophe CHAMPIN et  Elio COMARIN

Article publié le 03/05/2000