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Proche-Orient

Camp David : après l'échec

Yasser Arafat et Ehoud Barak se sont séparés sans accord. Bill Clinton constate que les « deux parties sont incapables de conclure un accord à ce stade ». Les trois hommes s'engagent à poursuivre les efforts pour parvenir à la paix. Mais les réalités du terrain risquent de prendre rapidement le dessus.
Quatorze jours de négociations dans le huis clos de Camp David n'auront donc pas permis de parvenir à un accord, dans le lieu même où, vingt-deux ans auparavant, Menahem Begin et Anouar el Sadate avaient, en treize jours, surmonté leurs désaccords. Les traits tirés, le président Clinton a lui-même annoncé l'échec aux journalistes. S'appuyant sur la déclaration tripartite des trois leaders, le chef de l'exécutif américain s'est voulu malgré tout optimiste sur les perspectives de reprise des négociations dans les semaines à venir.

Bill Clinton a rendu un hommage appuyé à Ehoud Barak pour son «courage particulier» laissant entendre que les efforts de Yasser Arafat sur la question de Jérusalem n'ont pas été à la hauteur de ceux du premier ministre israélien. Sans surprise, Palestiniens et Israéliens se rejettent la
responsabilité de l'échec des pourparlers, mais en des termes très mesurés. Dans leur déclaration commune, Israéliens et Palestiniens s'engagent à éviter les «actions unilatérales» pouvant compromettre les négociations. On songe évidemment à la promesse de Yasser Arafat de proclamer l'Etat palestinien en cas d'échec des négociations de Camp David. A présent, le coordinateur américain pour le Proche-Orient, Dennis Ross, est attendu dans la région pour poursuivre les contacts. En somme, chacun rentre chez soi avec la promesse de se revoir dès que possible.

Pourtant, à peine rentrés chez eux, Barak et Arafat vont être entraînés dans une logique inéluctable : justifier la fermeté dont ils ont fait preuve face à l'adversaire tout en minimisant les concessions qu'ils ont pu être amenés à faire au cours des négociations. Du reste, selon la règle fixée d'emblée, «il n'y a d'accord sur rien tant qu'il n'y a pas d'accord sur tout ». En d'autres termes, les avancées enregistrées à Camp David sont bien fragiles et ne peuvent en aucun cas être tenues pour des acquis liant les négociateurs pour la suite des discussions.

Dans l'opinion publique, on assiste paradoxalement à un certain soulagement, tant du côté israélien que du côté palestinien devant l'échec des négociations. «Ne pas conclure un accord vaut mieux qu'en signer un qui soit préjudiciable aux Palestiniens, ce qui mènerait à un nouveau conflit», a dit la députée palestinienne Hanane Achraoui, pourtant de tendance modérée. Les islamistes du Hamas sont plus directs : «Il n'y a pas d'autre choix que la résistance, ce qui a été pris par la force doit être repris par la force», a déclaré son guide spirituel Cheikh Ahmed Yassine. En Israël, la droite et les colons sont pour leur part bien décidés à capitaliser sur cet échec. Ehoud Barak regagne son pays sans majorité parlementaire et à la tête d'un un gouvernement en partie démissionnaire.

Durant deux semaines, les «durs» israéliens et palestiniens ont redouté à chaque instant l'annonce d'un accord et les concessions qu'il aurait impliqué. Ils sont bien décidés à faire en sorte qu'une reprise du dialogue et la signature d'un accord s'avère impossible. Les violences que chacun redoute désormais en Cisjordanie et à Gaza pourraient bien leur donner raison. La bonne volonté des négociateurs ne semble pas devoir être mise en doute. Mais quels éléments nouveaux pourraient bien apporter Arafat et Barak qui n'aient été abordés durant ces quinze jours à Camp David ? D'autant qu'à l'approche des élections américaines de novembre, Bill Clinton, qui ne se représente pas, perd chaque jour un peu de sa puissance et de son influence.

Les précédents incitent à la prudence : à la mi-janvier, Ehoud Barak et le ministre syrien des affaires étrangères Farouk al Chareh ont interrompu leurs pourparlers menés aux Etats-Unis à Shepherdstown, sous l'égide de Bill Clinton sans résultats. Ils se sont séparés sur la promesse de les reprendre sous deux semaines. Mais de retour chez eux, ils ont fait des déclarations de fermeté à destination de leur opinion intérieure qui ont eu pour effet de casser la dynamique de la négociation. A ce jour, les négociations israélo-syriennes sont toujours au point mort.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 26/07/2000