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Etats-Unis

Les Noirs et le Parti républicain<br>

A l'approche de l'élection présidentielle, la plupart des sondages notent que la majorité de l'électorat afro-américain votera en faveur du candidat démocrate. Cependant, de plus en plus de jeunes adultes noirs se disent conservateurs, ce qui s'est traduit notamment par une hausse de la représentation afro-américaine à la Convention républicaine nationale.
Cette année, mais cela dépendra également de leur taux de participation, le suffrage des Afro-américains risque de faire pencher la balance en faveur du camp démocrate ou du camp républicain. Toutefois, c'est un fait connu, les Noirs américains votent traditionnellement en faveur du Parti démocrate. En 1992 et 1996, les républicains George Bush et Bob Dole n'avaient obtenu respectivement que 11 et 12 % du vote noir. En 1996, les suffrages des Noirs furent décisifs pour le candidat Bill Clinton. Selon le Joint Center for Political and Economic Studies, un institut de recherche sur les minorités des Etats-Unis basé à Washington, les Noirs ont représenté 17,1 % des votes en faveur de Clinton. Cela signifie qu'un électeur de Clinton sur six était Afro-américain. On mesure l'importance de ces votes en les analysant au niveau des Etats. En Louisiane, 52 % des votes pour Clinton provenaient des électeurs noirs.

Ces pourcentages étaient de 40 % en Géorgie, de plus de 30 % dans le Maryland, et de 25 % dans l'Illinois. Le Parti républicain (GOP, Grand Old Party), ne peut pas ignorer ces chiffres. S'il veut gagner en novembre, il lui faudra drainer une partie importante du vote noir dans certains Etats où la bataille promet d'être rude : la Floride, l'Illinois, le Michigan, la Louisiane, l'Ohio, le New Jersey, le Missouri, la Pennsylvanie, et le Tennessee, entre autres, Etats où Bill Clinton est arrivé en tête en 1996. Le candidat George Bush Jr. a fait des efforts en vue de séduire les Afro-américains. Dans le discours tout d'abord, en se revendiquant d'un « conservatisme à visage humain » (compassionate conservatism). Le gouverneur du Texas a fait le tour des églises noires, dont l'influence est énorme dans la communauté, de certaines cités défavorisées, des écoles à majorité noire, etc. Il s'est également adressé à des organisations de défense des droits civiques, comme l'Association nationale pour la promotion des personnes de couleur (NAACP), et le Congrès pour l'égalité raciale (CORE). Dans son Etat, George Bush Jr. compte 8,6 % d'Afro-américains au sein d'une administration de quelque 3 000 personnes. Certains d'entre eux occupent des fonctions particulièrement importantes comme celles de directeur du budget ou de commandant adjoint de la Garde nationale du Texas.

Au niveau du parti, le GOP possède cette année plus de représentants noirs qu'en 1996. Lors de la Convention républicaine nationale, qui s'est tenue à la fin du mois de juillet à Philadelphie, il y avait 85 délégués afro-américains, soit 4,1 % du total des délégués, contre 52 en 1996. Le GOP est toutefois loin de son record de 1992, avec 107 délégués noirs américains. Cependant, le problème du Parti républicain est qu'il lui manque des personnalités charismatiques susceptibles d'attirer le vote des Noirs. Certes, l'ex-commandant en chef des armées, le général Colin Powell, était bien à la Convention, mais son influence au sein de la communauté afro-américaine est très limitée. N'est pas Jesse Jackson qui veut. De récents sondages montrent que le comportement électoral des Afro-américains n'est pas près de changer. Selon le Joint Center for Political and Economic Studies, le candidat démocrate Al Gore devrait bénéficier d'environ 90 % de leurs votes en novembre. Cependant, l'institut de recherche signale un changement d'orientation idéologique chez les jeunes adultes noirs. Si seulement 8,3 % des Noirs américains se disent républicains, 31,6 % des jeunes adultes afro-américains âgés de 18 à 35 ans s'affirment conservateurs.

Ces derniers rejoignent les positions du GOP sur de nombreux points : la nécessité de réprimer durement la criminalité et le trafic de drogue, l'idée d'une privatisation du système de sécurité sociale, la réforme des conditions d'attribution de l'aide sociale, l'abandon progressif des mesures d'«action affirmative» en faveur des minorités, etc. Il est toutefois peu probable que ces nouvelles tendances politiques au sein de la communauté noire aient une incidence sur son vote à la présidentielle. En revanche, si elles s'enracinent durablement, elles pourraient s'avérer déterminantes dans des consultations à venir, en particulier lors des élections à la Chambre des représentants.



par Philippe  TRIAY

Article publié le 19/09/2000