Bosnie
La victoire de tous les nationalistes
Les élections générales bosniaques de samedi dernier ont pris l'allure d'un véritable camouflet infligé à la communauté internationale. Les trois partis nationalistes - le SDS serbe, le HDZ croate et le SDA musulman - ont confirmé leur emprise sur leurs populations respectives, tandis que les formations modérées n'ont pas réussi à concrétiser une alternative politique à l'échelle de toute la Bosnie.
L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), organisatrice du scrutin, avait pourtant pris clairement parti dans la campagne, appelant les électeurs à voter «pour les changements» et «contre la corruption». Au final, cet interventionnisme s'est révélé contre-productif.
Durant les années de guerre et, surtout, depuis la paix de Dayton, les représentants internationaux en Bosnie ont cherché à susciter des alternatives à cette domination des formations nationalistes. Exemple le plus clair, le retournement de Biljana Plavsic, l'ancienne égérie de l'ultra nationalisme serbe, devenue une présidente «modérée» de la Republika Srpska -l'«entité» serbe qui constitue, avec la Fédération croato-bosniaque, l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Biljana Plavsic a été battue lors des élections présidentielle de septembre 1998 par l'ultra nationaliste Nikola Poplasen, démis de ses fonctions par la Haut représentant international quelques mois plus tard.
Le modéré Milorad Dodik se maintenait, pendant ce temps, à la charge de Premier ministre de la Republika Srpska, même s'il n'a jamais disposé de majorités parlementaires claires au sein du Parlement de cette entité. Candidat ouvertement soutenu par les USA, Milorad Dodik a mordu la poussière face à Mirko Sarovic, le candidat du SDS, le parti de l'ancien dirigeant Radovan Karadzic, recherché par la justice internationale.
Pas d'alternative au nationalisme
«La destitution de Nikola Poplasen et l'interdiction du Parti radical serbe ont été perçu comme des diktats internationaux, le SDS a mené campagne alors que planait sur lui la menace d'une interdiction. C'est comme si l'on avait tout fait pour convaincre les Serbes de serrer les rangs autour des dirigeants les plus nationalistes», analyse un diplomate français.
Les tentatives visant à favoriser l'émergence d'une alternative au nationalisme ont également fait chou blanc côté croate, où le Nouvelle Initiative croate de Kresimir Zubak est écrasée par le HDZ, qui s'est même offert le luxe de défier ouvertement la communauté internationale en convoquant les Croates de Bosnie-Herzégovine à un référendum d'«autodétermination».
Ce n'est que du côté musulman de la Fédération croato-bosniaque que le Parti social-démocrate parvient à menacer la domination du SDA de l'ancien président Alija Izetbegovic, mais sans pouvoir prétendre devenir le pivot d'une alternative au nationalisme à l'échelle de toute la Bosnie.
Les résultats de ces élections ont fait l'effet d'une véritable douche froide pour les intellectuels anti-nationalistes de Sarajevo, certains analysant une «fatalité» bosniaque: «la vie commune et la capacité de pardon sont des réalités sociologiques en Bosnie, mais aucun parti n'est capable de transformer ces valeurs en projet politique».
Le réveil risque d'être d'autant plus douloureux que ces résultats électoraux vont accélérer le mouvement de retrait de la Bosnie qui affecte déjà toutes les organisations internationales. Après les changements démocratiques intervenus en Croatie et en Serbie, la Bosnie risque de faire de plus en plus figure de «mauvais élève» de la classe balkanique, à quelques jours de l'important sommet du Pacte de stabilité de l'Europe du sud-est, le 23 novembre prochain à Zagreb.
Durant les années de guerre et, surtout, depuis la paix de Dayton, les représentants internationaux en Bosnie ont cherché à susciter des alternatives à cette domination des formations nationalistes. Exemple le plus clair, le retournement de Biljana Plavsic, l'ancienne égérie de l'ultra nationalisme serbe, devenue une présidente «modérée» de la Republika Srpska -l'«entité» serbe qui constitue, avec la Fédération croato-bosniaque, l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Biljana Plavsic a été battue lors des élections présidentielle de septembre 1998 par l'ultra nationaliste Nikola Poplasen, démis de ses fonctions par la Haut représentant international quelques mois plus tard.
Le modéré Milorad Dodik se maintenait, pendant ce temps, à la charge de Premier ministre de la Republika Srpska, même s'il n'a jamais disposé de majorités parlementaires claires au sein du Parlement de cette entité. Candidat ouvertement soutenu par les USA, Milorad Dodik a mordu la poussière face à Mirko Sarovic, le candidat du SDS, le parti de l'ancien dirigeant Radovan Karadzic, recherché par la justice internationale.
Pas d'alternative au nationalisme
«La destitution de Nikola Poplasen et l'interdiction du Parti radical serbe ont été perçu comme des diktats internationaux, le SDS a mené campagne alors que planait sur lui la menace d'une interdiction. C'est comme si l'on avait tout fait pour convaincre les Serbes de serrer les rangs autour des dirigeants les plus nationalistes», analyse un diplomate français.
Les tentatives visant à favoriser l'émergence d'une alternative au nationalisme ont également fait chou blanc côté croate, où le Nouvelle Initiative croate de Kresimir Zubak est écrasée par le HDZ, qui s'est même offert le luxe de défier ouvertement la communauté internationale en convoquant les Croates de Bosnie-Herzégovine à un référendum d'«autodétermination».
Ce n'est que du côté musulman de la Fédération croato-bosniaque que le Parti social-démocrate parvient à menacer la domination du SDA de l'ancien président Alija Izetbegovic, mais sans pouvoir prétendre devenir le pivot d'une alternative au nationalisme à l'échelle de toute la Bosnie.
Les résultats de ces élections ont fait l'effet d'une véritable douche froide pour les intellectuels anti-nationalistes de Sarajevo, certains analysant une «fatalité» bosniaque: «la vie commune et la capacité de pardon sont des réalités sociologiques en Bosnie, mais aucun parti n'est capable de transformer ces valeurs en projet politique».
Le réveil risque d'être d'autant plus douloureux que ces résultats électoraux vont accélérer le mouvement de retrait de la Bosnie qui affecte déjà toutes les organisations internationales. Après les changements démocratiques intervenus en Croatie et en Serbie, la Bosnie risque de faire de plus en plus figure de «mauvais élève» de la classe balkanique, à quelques jours de l'important sommet du Pacte de stabilité de l'Europe du sud-est, le 23 novembre prochain à Zagreb.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 17/11/2000