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Défense européenne

L'Europe se dote d'une défense commune

Pour la première fois dans son histoire, l'Union européenne s'est formellement dotée à Bruxelles d'une force de réaction rapide de 100 000 hommes, 400 avions de combat et 100 bâtiments de guerre.
Cette décision, acquise dès décembre 1999, a été aussitôt saluée de manière très différente par les deux « partenaires naturels » de l'Europe, à savoir les Etats-Unis (avec lesquels elle constitue l'OTAN) et la Russie, qui n'est plus dotée de sa propre alliance (le Pacte de Varsovie) depuis la disparition de l'Union soviétique, en 1990.

Washington a fait savoir, par la voix de Madeleine Albright, que cette force allait dans le sens d'un « véritable partenariat » entre l'UE et l'Alliance atlantique. «Notre sécurité sera également améliorée si l'Union européenne réussit dans son objectif d'établir une force de réaction rapide », a-t-elle précisé, avant d'ajouter que les Etats-Unis « ainsi que les autres membres de l'Alliance travaillent étroitement avec l'UE pour le succès de cette initiative ». Ce qui semble indiquer que Washington accepte désormais un certain degré d'autonomie de cet embryon de défense commune européenne, à condition toutefois que cette force « apporte un complément appréciable aux efforts et aux capacités de l'OTAN » et « permettra d'améliorer la capacité de l'Europe à agir d'une manière qui renforce européenne et transatlantique ».

De son côté le président russe Vladimir Poutine a souhaité que cette force soit constituée « dans la transparence et la clarté ». « Nous n'avons pas l'intention de la bloquer, d'interférer avec elle ou de l'encourager, a-t-il précisé. Tout ce qui est fait vise à maintenir la stabilité en Europe et dans le monde. Nous sommes parfaitement en accord avec cette approche sur les questions les plus sensibles ». Autant dire que la Russie surveillera de très près cette force d'intervention, notamment lorsqu'elle sera appelée à se positionner dans l'un des pays « sensibles » du moment, à commencer par ceux de la péninsule balkanique. Cela concerne en priorité la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo (qui demeure, notamment aux yeux de l'Europe, une province serbe) : deux régions où la présence de l'OTAN « continue d'être indispensable » selon son secrétaire général George Robertson.

Un réservoir de 100 000 hommes

Cette force devrait être en mesure, d'ici 2003, d'être déployée en 60 jours dans une opération de type Kosovo, et de rester sur le terrain plus d'un an. Pour cela, selon différents experts un réservoir de 100 000 hommes était nécessaire, pour répondre aux différents scénarios envisagés : mission légère de type humanitaire après une catastrophe naturelle ou évacuation de ressortissants, opération lourde de rétablissement armé de la paix (comme au Kosovo) ou maintien de la paix pour éviter le déclenchement d'une crise majeure (comme à la veille de la guerre serbo-croate en 1991).

Pour atteindre cet objectif - et parallèlement acquérir une certaine autonomie opérationnelle vis-à-vis de l'OTAN - l'UE devrait privilégier deux secteurs stratégiques : le renseignement et le transport de troupes. Les Quinze disposent déjà de capacités d'interprétation d'images grâce au centre satellitaire de Torrejon (en Espagne), et, en matière de transport stratégique, sept pays (dont la France, l'Allemagne, la Grande Bretagne, l'Italie et l'Espagne) se sont engagés en juillet dernier dans le programme de construction d'un avion européen de transport militaire : l'Airbus A400M.

Enfin, quinze pays tiers européens ont proposé dès mardi 21 novembre aux Quinze de l'UE d'apporter des contributions supplémentaires, représentant plusieurs milliers d'hommes, à cette force d'intervention. Il s'agirait notamment de la Norvège, de la Roumanie, de la Slovaquie, de la Hongrie de la Tchéquie, ainsi que de la Turquie (membre de l'OTAN et candidate à l'UE).



par Elio  Comarin

Article publié le 08/12/2000