Insécurité
50 ans de banlieues
Violences, émeutes, vandalisme, incendies, bavures policières, mortsà Crise des banlieues, mal de vivre : la banlieue est accusée de tous les maux, surtout depuis le début des années 1980, date des premières émeutes urbaines, qui ont conduit les gouvernements successifs à se pencher, enfin, sur le problème des villes et sur la dégradation de certains quartiers.
Au sens étymologique du terme, la banlieue est l'ensemble des agglomérations qui entourent une grande ville et qui dépendent d'elle pour plusieurs fonctions. La banlieue, ce sont d'abord des villes, plus ou moins importantes, qui ceinturent les grandes métropoles. Mais, cette définition large de la banlieue a peu à peu été réduite. Ainsi, la banlieue est aujourd'hui considérée comme « un ensemble d'immeubles, voire de quartiers, qui, au sein d'une commune, présente des caractéristiques liées à des difficultés sociales importantes ». L'origine de la banlieue remonte au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Au sortir de cette guerre, le paysage des grandes agglomérations de France est particulièrement sinistré. 500 000 logements ont été détruits, autant sont dégradés. Le nombre d'immeubles vétustes est estimé à trois millions et demi. Une personne sur deux est considérée comme mal logée. Surpopulation des logements et inconfort sont le lot de millions de Français. Les réfugiés qui regagnent les villes peuplent les hôtels et les abris de fortune. Rien qu'à Paris, ce sont plus de 40 % des habitants qui vivent dans des immeubles insalubres.
Dès 1945, devant l'ampleur du problème, le gouvernement entreprend la transformation de casernes, d'usines, d'entrepôts, de fortins pour aboutir à la création de 100 000 habitations provisoires. Il institue également le droit de réquisition des demeures inoccupées au bénéfice des sans-abris. Le 28 octobre 1946, est votée la loi sur le dédommagement des sinistrés. Les dommages causés aux biens immobiliers pour faits de guerre donnent droit à l'indemnisation totale et à une reconstruction à l'identique. Si l'intention est noble et généreuse, l'effet en est pervers : aucune idée nouvelle, aucun plan d'ensemble, aucune conception nouvelle de l'habitat n'en sortent. « Je n'ai pas de politique de reconstruction, je pare au plus pressé », admettait le ministre de la Reconstruction, François Billoux.
La colère de l'abbé Pierre
Des hommes ont des idées. Ainsi les « Castors », ouvriers, employés et même fonctionnaires se regroupent en coopératives pour acheter des terrains et y construire eux-mêmes leurs logements pendant les heures de loisirs et les vacances. D'autres choisissent la colère comme l'Abbé Pierre. En 1954, plusieurs mal-logés dont un enfant meurent de froid. Or, l'Assemblée nationale vient de reporter la discussion sur la mise en £uvre de cités d'urgence d'un coût d'un milliard de l'époque. La révolte à la radio de l'Abbé Pierre avec ses compagnons d'Emmaüs provoque un sursaut salutaire en faveur de centaines de mal-logés.
Des idées, Le Corbusier n'en manque pas. Son unité d'habitation prévue pour 1 600 personnes est bien conçue, les appartements en duplex sont grands et bien équipés, mais ses détracteurs lui reprochent le manque d'épanouissement de la famille, « cellule essentielle de la société ». Ses constructions feront quand même recette, notamment à Marseille, avec la fameuse Cité radieuse. Dans ce début des années 50, la construction a du mal à progresser, faute de crédits. Il faudra attendre 1956, pour atteindre 240 000 logements par an.
Mais, ce que les responsables n'avaient pas prévu, c'est l'arrivée en France de milliers de travailleurs émigrés venus, du même coup, grossir la masse des sans-abris. On assiste, parallèlement, à la désertification des campagnes ; l'exode rural faisant fortement augmenter la population urbaine. C'était sans compter aussi sur la fin de la guerre d'Algérie en 1962, et l'arrivée en métropole d'un million de réfugiés.
Bref, il était urgent de construire en quantité des logements. Le plus possible, et sans perdre de temps. On adopte donc la préfabrication ; les planchers et les parois arrivent tout préparés. Des tours fleurissent aux abords des grandes villes, avec tout le confort tant attendu : eau courante, salle de bains, chauffage central, vide-ordures, ascenseur, WC indépendant. La France des années 60 se couvre de quartiers satellites tracés à l'équerre. La Courneuve, dans la région parisienne, voit fleurir 4 000 logements d'un coup. Les banlieues venaient de naître. Et très vite aussi les premiers grands problèmes des cités.
Pierre DELMAS (source INA)
Au sortir de cette guerre, le paysage des grandes agglomérations de France est particulièrement sinistré. 500 000 logements ont été détruits, autant sont dégradés. Le nombre d'immeubles vétustes est estimé à trois millions et demi. Une personne sur deux est considérée comme mal logée. Surpopulation des logements et inconfort sont le lot de millions de Français. Les réfugiés qui regagnent les villes peuplent les hôtels et les abris de fortune. Rien qu'à Paris, ce sont plus de 40 % des habitants qui vivent dans des immeubles insalubres.
Dès 1945, devant l'ampleur du problème, le gouvernement entreprend la transformation de casernes, d'usines, d'entrepôts, de fortins pour aboutir à la création de 100 000 habitations provisoires. Il institue également le droit de réquisition des demeures inoccupées au bénéfice des sans-abris. Le 28 octobre 1946, est votée la loi sur le dédommagement des sinistrés. Les dommages causés aux biens immobiliers pour faits de guerre donnent droit à l'indemnisation totale et à une reconstruction à l'identique. Si l'intention est noble et généreuse, l'effet en est pervers : aucune idée nouvelle, aucun plan d'ensemble, aucune conception nouvelle de l'habitat n'en sortent. « Je n'ai pas de politique de reconstruction, je pare au plus pressé », admettait le ministre de la Reconstruction, François Billoux.
La colère de l'abbé Pierre
Des hommes ont des idées. Ainsi les « Castors », ouvriers, employés et même fonctionnaires se regroupent en coopératives pour acheter des terrains et y construire eux-mêmes leurs logements pendant les heures de loisirs et les vacances. D'autres choisissent la colère comme l'Abbé Pierre. En 1954, plusieurs mal-logés dont un enfant meurent de froid. Or, l'Assemblée nationale vient de reporter la discussion sur la mise en £uvre de cités d'urgence d'un coût d'un milliard de l'époque. La révolte à la radio de l'Abbé Pierre avec ses compagnons d'Emmaüs provoque un sursaut salutaire en faveur de centaines de mal-logés.
Des idées, Le Corbusier n'en manque pas. Son unité d'habitation prévue pour 1 600 personnes est bien conçue, les appartements en duplex sont grands et bien équipés, mais ses détracteurs lui reprochent le manque d'épanouissement de la famille, « cellule essentielle de la société ». Ses constructions feront quand même recette, notamment à Marseille, avec la fameuse Cité radieuse. Dans ce début des années 50, la construction a du mal à progresser, faute de crédits. Il faudra attendre 1956, pour atteindre 240 000 logements par an.
Mais, ce que les responsables n'avaient pas prévu, c'est l'arrivée en France de milliers de travailleurs émigrés venus, du même coup, grossir la masse des sans-abris. On assiste, parallèlement, à la désertification des campagnes ; l'exode rural faisant fortement augmenter la population urbaine. C'était sans compter aussi sur la fin de la guerre d'Algérie en 1962, et l'arrivée en métropole d'un million de réfugiés.
Bref, il était urgent de construire en quantité des logements. Le plus possible, et sans perdre de temps. On adopte donc la préfabrication ; les planchers et les parois arrivent tout préparés. Des tours fleurissent aux abords des grandes villes, avec tout le confort tant attendu : eau courante, salle de bains, chauffage central, vide-ordures, ascenseur, WC indépendant. La France des années 60 se couvre de quartiers satellites tracés à l'équerre. La Courneuve, dans la région parisienne, voit fleurir 4 000 logements d'un coup. Les banlieues venaient de naître. Et très vite aussi les premiers grands problèmes des cités.
Pierre DELMAS (source INA)
par Valérie Gas
Article publié le 30/01/2001