Tunisie
Nouveau coup dur pour les droits de l'homme
Après trois mois de procédure, la justice tunisienne a invalidé, lundi 12 février, la direction de la Ligue tunisienne de défense des droits de l'homme (LTDH). Elu en octobre 2000, ce comité directeur est contesté par le régime du président Ben Ali.
Lundi, verdict sans surprise : nuls et non avenus, les résultats du 5ème congrès de la LTDH, tenu les 29 et 30 octobre 2000. Le tribunal de première instance de Tunis a déclaré invalides toutes les décisions prises par la direction élue lors de ce congrès et exige la convocation de nouvelles élections. «Ce jugement signifie l'anéantissement de la Ligue par le pouvoir», s'est insurgé Me Mokhtar Trifi, président déchu de la LTDH. L'assemblée avait porté à la tête de l'organisation une direction hostile à la politique du président Ben Ali en matière de libertés publiques.
Pour la première fois en effet, la nouvelle équipe ne comptait aucun proche du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, parti au pouvoir). Mais, dès la mi-novembre, quatre candidats battus aux élections, dont deux membres du RCD, ont poursuivi en justice Me Trifi et son équipe pour non-respect de certaines dispositions des statuts. Aussi ont-ils demandé à la justice l'annulation pure et simple du congrès. Cause entendue : le 27 novembre, la justice ordonne le «gel immédiat» de la Ligue. Et lundi 12 février, bis repetita. Kamel Ben Younès, journaliste et chef de file des contestataires se félicite de cette annulation qui a «sauvé la Ligue» et permet «aux membres de la LTDH de repartir du bon pied dans le respect des règlements». Ben Younès a toujours critiqué la composition politique de la direction, dominée, selon lui, par des éléments proches de formations politiques «minoritaires» de gauche ou de droite.
«La pression et le harcèlement continuent»
De son côté, Me Trifi, qui à plusieurs reprises a mis en garde contre «un assassinat judiciaire», estime aujourd'hui que «personne parmi l'ancienne direction n'acceptera d'exécuter un jugement rendu sous la pression et faisant fi des règles de procédure». Même son de cloche à Paris et à Genève où la Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme (FIDH) et l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) ont condamné «avec fermeté le verdict de ce procès monté de toutes pièces». «Il y a en Tunisie une tendance générale qui est celle de refuser toute autonomie à la LDTH, d'autant que ce comité directeur est indépendant. C'est cette autonomie que refuse le pouvoir», s'est indigné Driss El Yazami, Secrétaire général de la FIDH. «Cette décision montre bien que la pression et le harcèlement continuent, contrairement au discours du gouvernement tunisien qui dit protéger les droits de l'homme», a-t-il ajouté.
La LTDH peut faire appel de ce verdict dans les 20 jours suivant sa notification officielle. Cependant, d'anciens dirigeants de la LTDH ont évoqué le risque pour cette association, la plus ancienne du genre dans la monde arabe et en Afrique, de s'installer dans une longue crise juridico-politique, voire de disparaître. Créée en 1977, la Ligue est en effet l'unique association légalement reconnue pour la défense des droits de l'homme en Tunisie. Le Conseil national des Libertés en Tunisie (CNLT), actif depuis 1999 sur ce terrain, n'a jamais été légalement reconnu par les autorités.
Reste la pression diplomatique : selon la FIDH, une visite officielle à Tunis du ministre français délégué à la Coopération, Charles Josselin, est «programmée dans les prochaines semaines». Le 9 février dernier, la France, habituellement réservée sur cette question, s'est dite «préoccupée par l'usage croissant de la violence par les forces de sécurité tunisiennes à l'égard des défenseurs des droits de l'homme».
Luc Ngowet
Pour la première fois en effet, la nouvelle équipe ne comptait aucun proche du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD, parti au pouvoir). Mais, dès la mi-novembre, quatre candidats battus aux élections, dont deux membres du RCD, ont poursuivi en justice Me Trifi et son équipe pour non-respect de certaines dispositions des statuts. Aussi ont-ils demandé à la justice l'annulation pure et simple du congrès. Cause entendue : le 27 novembre, la justice ordonne le «gel immédiat» de la Ligue. Et lundi 12 février, bis repetita. Kamel Ben Younès, journaliste et chef de file des contestataires se félicite de cette annulation qui a «sauvé la Ligue» et permet «aux membres de la LTDH de repartir du bon pied dans le respect des règlements». Ben Younès a toujours critiqué la composition politique de la direction, dominée, selon lui, par des éléments proches de formations politiques «minoritaires» de gauche ou de droite.
«La pression et le harcèlement continuent»
De son côté, Me Trifi, qui à plusieurs reprises a mis en garde contre «un assassinat judiciaire», estime aujourd'hui que «personne parmi l'ancienne direction n'acceptera d'exécuter un jugement rendu sous la pression et faisant fi des règles de procédure». Même son de cloche à Paris et à Genève où la Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme (FIDH) et l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) ont condamné «avec fermeté le verdict de ce procès monté de toutes pièces». «Il y a en Tunisie une tendance générale qui est celle de refuser toute autonomie à la LDTH, d'autant que ce comité directeur est indépendant. C'est cette autonomie que refuse le pouvoir», s'est indigné Driss El Yazami, Secrétaire général de la FIDH. «Cette décision montre bien que la pression et le harcèlement continuent, contrairement au discours du gouvernement tunisien qui dit protéger les droits de l'homme», a-t-il ajouté.
La LTDH peut faire appel de ce verdict dans les 20 jours suivant sa notification officielle. Cependant, d'anciens dirigeants de la LTDH ont évoqué le risque pour cette association, la plus ancienne du genre dans la monde arabe et en Afrique, de s'installer dans une longue crise juridico-politique, voire de disparaître. Créée en 1977, la Ligue est en effet l'unique association légalement reconnue pour la défense des droits de l'homme en Tunisie. Le Conseil national des Libertés en Tunisie (CNLT), actif depuis 1999 sur ce terrain, n'a jamais été légalement reconnu par les autorités.
Reste la pression diplomatique : selon la FIDH, une visite officielle à Tunis du ministre français délégué à la Coopération, Charles Josselin, est «programmée dans les prochaines semaines». Le 9 février dernier, la France, habituellement réservée sur cette question, s'est dite «préoccupée par l'usage croissant de la violence par les forces de sécurité tunisiennes à l'égard des défenseurs des droits de l'homme».
Luc Ngowet
Article publié le 13/02/2001