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Ouganda

Victoire contestée de Museveni

La police militaire, en képis rouges, était toujours très présente mercredi à Kampala lors de la proclamation des résultats du scrutin présidentiel. Alors que les partisans de Museveni célébraient sa victoire, une bombe a explosé à la tombée de la nuit dans le centre ville, puis une seconde, au sud de la capitale. Ces attentats qui ont fait au moins un mort et cinq blessés, interviennent à l'issue d'un scrutin très contesté.

De notre correspondant en Ouganda

Le président sortant pulvérise les sondages : Yoweri Museveni a été réélu avec 69% des suffrages. Son principal opposant, le Dr. Besigye, est loin derrière, avec 27 % des voix. Besigye, qui fut le médecin personnel de Museveni durant les années de guérilla, dénonce des fraudes massives. Selon lui, les registres électoraux comprenaient près de deux millions d'électeurs fantômes sur un total de 10 millions. Soit, deux personnes sur dix. Son Etat major se prépare à déposer une action en annulation de ces élections devant la cour suprême. «Si ces élections dénuées de toute légitimité ne sont pas annulées, alors nous sommes revenus au point de départ, quand nous avons décidé de prendre le maquis pour obtenir la démocratie», a commenté le Dr Besigye, lors d'une conférence de presse à Kampala, mercredi après midi. Sa femme, Winnie Byanyima, députée de Mbarara, au sud du pays, a souligné que lors des élections passées, sa circonscription n'avait pas plus de 13 000 électeurs. «Pourtant, Museveni vient d'y obtenir 17 000 voix», a-t-elle dénoncé.

«Pas de changement !»

Besigye, qui a quitté l'armée l'année dernière pour faire campagne et était un membre éminent du Mouvement National de Résistance (NRM au pouvoir), est parvenu à obtenir la sympathie d'une importante partie de l'électorat en dénonçant la corruption et le népotisme du «système Museveni».
Cependant, les partisans de Museveni n'ont pas attendu la publication des résultats définitifs pour célébrer la victoire. Ils ont envahi les rues de la capitale, rameaux à la main et le corps ceint de feuillages, en entonnant le slogan de campagne de leur candidat : «Pas de changement !».

Selon la société civile, rassemblée au sein d'un groupe d'observateur dit NEMGROUP, des illégalités ont été effectivement notées durant le scrutin dans plus d'un quart des bureaux de votes. «Dans certains bureaux de votes, les électeurs ont été forcés ou fortement encouragés de voter pour le président sortant, tandis que 6% des électeurs ont été empêchés de voter», souligne Grace Kaiso, représentant le NEMGROUP. Plusieurs témoignages font également état de bourrages d'urnes.

Mais toutes ces irrégularités ne remettent pas en cause l'issue du scrutin, selon le NEMGROUP, qui considère qu'il reflète malgré tout «la volonté des Ougandais». Une analyse partagée par les observateurs internationaux des pays voisins et de la Libye qui se sont empressés de déclarer que ces élections avaient été libres et transparentes.

Pour le président Museveni qui a pris le pouvoir en 1986, il s'agit d'un ultime mandat de cinq ans. Dans un environnement troublé û l'Ouganda est en guerre contre les régimes de Khartoum et de Kinshasa -, il entend essentiellement professionnaliser son armée et préparer sa succession. «J'aimerais partir dès aujourd'hui si j'avais un surplus de cadres. Mais je dois consolider ma base. Ma succession doit être discutée au sein du NRM», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse, la veille du scrutin.



par Gabriel  Kahn

Article publié le 15/03/2001