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Trafic d''enfants

La fin d'une mystérieuse odyssée

La confusion règne autour du périple du navire Etireno. Le retour, dans la nuit de lundi à mardi au port de Cotonou, au Bénin, de ce bateau suspecté de pratiquer la traite d'enfants, suscite de nombreuses interrogations notamment autour de l'éventuelle existence d'un deuxième navire. Même encore non élucidée, cette affaire aura eu le mérite d'attirer l'attention sur la traite des enfants, un phénomène qui sévit dans de nombreux pays du sud.
C'est finalement à 1 heure du matin dans la nuit de lundi à mardi que l'Etireno a fait son entrée dans le port de Cotonou avec une ponctualité saisissante. Cette arrivée avait été annoncée à la seconde près par les autorités béninoises qui avaient pris soin de prévenir la presse sur le qui-vive depuis la «disparition» du bateau, refoulé du port de Libreville au Gabon et de Douala au Cameroun, où il avait tenté en vain d'accoster.

Invités à se rendre à bord, les journalistes ont constaté que les «enfants esclaves», appelés maintenant des «immigrants clandestins», n'étaient pas au nombre de 250 - comme cela avait été affirmé à Libreville - mais d'une vingtaine seulement, visiblement en bonne santé et la plupart accompagnés de leur mère. Ces familles n'étaient pas en possession de leurs papiers d'identité et ont été accueillies à leur arrivée par l'association Terre des hommes.

Selon Jean-Luc Aplogan, le correspondant de RFI à Cotonou, l'Etireno, avec sa coque blanche et malgré un périple dans le Golfe de Guinée de plus de quinze jours, semblait en excellent état à son arrivée. Revenons sur l'épopée du navire : battant pavillon nigérian, il quitte Cotonou le 30 mars dernier à destination du Gabon. Le 11 avril, on apprend qu'un navire a été refoulé de Libreville. Le ministère gabonais des Transports avait indiqué que 250 enfants nigérians se trouvaient à bord de ce bateau indésirable.

La piste d'un deuxième navire

Le lendemain, le 12 avril, le navire est encore une fois refoulé, cette fois de Douala au Cameroun. Il ferait de nouveau route vers Cotonou, son point de départ. Dès lors, une fois le bateau en haute mer, les chiffres les plus contradictoires se succèdent : la police camerounaise parle de 28 enfants à bord, tandis que les autorités béninoises confirment le chiffre de 250.

La presse, internationale surtout, s'émeut de l'affaire et en fait ses gros titres. Elle sera prise à partie par les autorités portuaires à l'arrivée de l'Etireno lors de la très officielle «visite» du navire. On l'accuse d'avoir présenté une image «négative» du Bénin et d'avoir sali l'image du pays.
Autre détail ajoutant à la confusion : on ne parle plus de «mandat d'arrêt international» lancé contre l'affréteur béninois de l'Etireno û comme l'avait indiqué dimanche dernier le bureau d'Interpol à Cotonou û mais d' «avis de recherche».

Alors que le bateau est supposé faire marche arrière vers Cotonou et que l'inquiétude grandit, la ministre béninoise de la Protection et des affaires sociales sème lundi le trouble. Elle annonce que le bateau a été repéré au large de Malabo, en Guinée équatoriale et que tous les ports d'Afrique de l'Ouest et centrale ont été placés en état d'alerte. S'agit-il d'un autre bateau ? Et si oui, a-t-il été confondu avec l'Etireno ? Le bateau signalé à Libreville était non identifié. Les enquêteurs d'Interpol semblent ne pas exclure la piste d'un deuxième navire. De son côte, Nicolas Pron, le responsable de l'Unicef à Cotonou, a affirmé mardi qu'il n'avait aucun indice permettant de dire «si ce bateau est le bon».

Quoiqu'il en soit, selon un témoignage recueilli auprès d'un petit passager de l'Etireno, âgé d'une dizaine d'années, le bateau aurait bel et bien tenté de faire escale au Gabon. Des pirogues, selon le récit fait au correspondant de RFI, auraient illégalement tenté d'acheminer des passagers du bateau vers la baie de Libreville. Là les passagers, ayant refusé d'être rackettés par les passeurs, auraient été dénoncés à la police. Au cours de l'interpellation, certains auraient pu s'enfuir et entrer illégalement au Gabon.





par Sylvie  Berruet

Article publié le 17/04/2001