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Bioéthique

Clonage humain : la prudence gagne du terrain

La Chambre des représentants américaine vient d'approuver l'interdiction du clonage humain, y compris pour la recherche génétique. Le débat éthique sur le statut de l'embryon humain a également lieu en Europe et le Législateur, partout où la question est posée, adopte généralement une position plus prudente et restrictive que celle des milieux scientifiques.
Peux-t-on autoriser le clonage humain à but reproductif ? Sur ce point qui revient à créer un double génétique à partir d'un élément du corps humain, les opinions publiques, les politiques et les scientifiques sont d'accord : c'est non. Seuls quelques «docteurs Folamour», désavoués par leurs pairs, s'y sont montrés favorables. L'Organisation mondiale de la santé et le Parlement européen, en 1997, le Conseil de l'Europe, en 1998, le Comité national consultatif d'éthique, en 2001 en France, condamnent unanimement cette éventualité, par ailleurs encore largement hypothétique.

Le vote des représentants, aux Etats-Unis, le 31 juillet, interdisant le clonage humain reproductif, va donc dans la direction que s'apprête à suivre la Grande-Bretagne, ainsi que cela a été annoncé en avril par Londres, dans le but d'apaiser les craintes de l'opinion publique. En Russie, le gouvernement vient d'adopter un moratoire de 5 ans sur le clonage humain pour se mettre en conformité avec ces conventions et déclarations internationales sur les droits de l'homme. Enfin, dans le cadre de la révision des lois sur la bioéthique, la France devrait également interdire cette pratique, plus clairement que dans la loi de 1994 en vigueur.

En revanche, sur la notion de «clonage thérapeutique» dont l'objectif est de former des cellules à partir d'autres cellules à des fins de recherche médicale, les avis sont beaucoup plus partagés. Les partisans de ces recherches sur les cellules-souches font valoir qu'elles pourraient, à terme, apporter des remèdes à la maladie d'Alzheimer, au diabète, aux leucémiesàMais, là encore, le vote intervenu aux Etats-Unis tranche par la négative alors que le Royaume-Uni en décembre 2000 avait autorisé le clonage de tissus humains à des fins thérapeutiques.

Volte-face

En France, la volte-face du gouvernement sur cette question illustre bien la difficulté à concilier progrès de la recherche et barrières déontologiques contre les dérives scientistes. Une mission parlementaire souhaitait autoriser par la loi le clonage thérapeutique en l'encadrant strictement. Le Conseil national consultatif d'éthique, après un vif débat, s'est prononcé majoritairement en faveur de cette possibilité en février 2001, alors que, quelques jours auparavant, la Commission nationale consultative des droits de l'homme la repoussait, suivant en cela l'avis du Groupe européen d'éthique formulé en novembre 2000. Confronté à ces positions contradictoires, le Premier ministre Lionel Jospin optait pour l'autorisation des recherches sur les cellules embryonnaires et présentait au Conseil d'Etat un avant-projet de loi dans ce sens. Mais, le 14 juin, les Sages du Palais Royal, conseil juridique du gouvernement, rendaient un avis négatif. Le gouvernement a finalement décidé de renoncer au clonage thérapeutique, source de beaucoup trop de contestations.

La question n'est cependant pas définitivement réglée car les pressions, notamment économiques, demeureront fortes. Le secteur des biotechnologies (dont les biotechnologies médicales ne constituent qu'une partie, à côté des OGM et de la recherche agricole et environnementale) représentait en 1998 un chiffre d'affaires de 17 milliards de dollars qui pourrait atteindre 28 milliards de dollars en 2005 et 50 milliards en 2010. Les emplois dans ce secteur ont progressé de près de 300% entre 1994 et 1998 en Europe, soit 46 000 personnes. Aux Etats-Unis à la même époque plus de 150 000 personnes étaient employées dans ce domaine d'activités.



par Francine  Quentin

Article publié le 01/08/2001