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Internet et vie privée

Tour de vis sur l'Internet

Après les Etats-Unis, c'est au tour de la France de mettre en oeuvre des mesures d'urgence pour lutter contre le terrorisme. Premier suspect : Internet. Les mesures présentées par le Premier ministre Lionel Jospin font craindre aux internautes un renforcement de la surveillance du Web. Au détriment de certaines libertés individuelles et au prix d'un sacré retour en arrière, notamment dans le domaine de la cryptographie.
Le 11 septembre 2001 aura-t-il changé quelque chose dans l'histoire de l'Internet en France ? Il semble que oui. Et c'est encore une fois la fameuse Loi sur la société de l'Information (LSI), véritable serpent de mer médiatique, qui en fait les frais. Examiné au début de l'été par l'Assemblée nationale, et en cours d'examen au Sénat, ce texte serait ainsi amendé dans le sens de mesures antiterroristes présentées par le Premier ministre. Le gouvernement a en effet déposé au Sénat des amendements à la loi sur la sécurité quotidienne, en vue de lutter contre l'utilisation criminelle des réseaux informatiques. Pour l'essentiel, ces dispositions concernent la conservation préventive de toutes les données de connexion au réseau (logs) et certaines limitations à l'utilisation des techniques de cryptographie.

La première mesure importante concerne la conservation des données de connexion désormais fixée à douze mois. Un décret devrait déterminer quels types de données seraient concernés par cette conservation : sites visités, messages échangés, etc. Deuxième point important de ces mesures : le chiffrement. La libéralisation de l'usage de la cryptologie engagée depuis 1999 se retrouve «encadrée» avec ces nouvelles dispositions. La possession et l'utilisation de logiciels de cryptage resteraient ainsi soumis à une réglementation de la LSI. Le texte prévoit également de recourir, dans le cadre de procédures judiciaires, aux service de la Défense pour briser les clés de cryptage.

Des risques d'abus

Des associations et mouvements de défense des libertés individuelles, dont ATTAC, le MRAP, IRIS et RSF ont rendu un avis plutôt critique à l'encontre de ces mesures antiterroristes examinées par le Sénat mardi et mercredi prochains. «Nous craignons que, sous couvert de l'urgence et de la traque des réseaux terroristes, le gouvernement s'apprête à faire adopter, sans débat ni concertation, des dispositions lourdes de conséquences pour les libertés», a déclaré Robert Ménard, le secrétaire général de Reporters Sans Frontières (RSF). Même réaction pour l'association Imaginons un réseau Internet solidaire (IRIS) qui parle de «surenchère sécuritaire sur Internet». Au chapitre très sensible de la cryptographie, l'IRIS déclare que «cette mesure présente des risques majeurs d'atteinte à la présomption d'innocence. Les procédures envisagées de saisine des moyens de l'Etat pour le déchiffrement de données ouvrent la porte à tous les abus policiers, sans garantie d'encadrement du juge, et sans recours possible dans certains cas. La garantie minimale contre ces risques est de soumettre toute prescription de déchiffrement à une décision du juge des libertés et de la détention.»

Si les associations de protection de la vie privée sur le Net se sont mobilisées dans leur ensemble. Depuis les attentats du 11 septembre, l'opinion publique, est, de son côté, plutôt prête à accepter ces restrictions. Les sondages montrent que les mesures, qu'il s'agisse de la fouille des voitures ou de la surveillance des messages électroniques sont approuvées majoritairement (plus de 70%) et cela dans toutes les catégories de population. Même si, l'approbation de la surveillance des messages électroniques est plus faible chez les jeunes et les cadres supérieurs, internautes émérites.



par Myriam  Berber

Article publié le 15/10/2001