Union européenne
Laeken: marchandages et grands projets
Malgré la mise en place d’une Convention (présidée par Valéry Giscard d’Estaing) chargée de préparer une nouvelle réforme des institutions, le sommet de Laeken affiche un bilan mitigé. Une fois de plus, les dossiers qui divisent sont remis à plus tard.
Le syndrome niçois a encore frappé. Il y a un an, sur la promenade des Anglais, les Quinze s’étaient livrés à une foire d’empoigne qui avait péniblement accouché de l’impraticable traité de Nice, censé réformer les institutions communautaires mais toujours bloqué depuis le «non» du peuple irlandais. Ce week-end, les intérêts nationaux se sont de nouveau déchaînés à Laeken, près de Bruxelles, lors du sommet marquant la fin de la présidence belge de l’Union européenne.
Sur la politique étrangère et la défense commune, la Grèce, pour cause de rivalité avec la Turquie, a opposé son veto à un accord entre l’Union et l’Otan. Sur la force multinationale en Afghanistan, la présidence belge a dû revenir sur ses déclarations enflammées annonçant la participation de l’Union en tant que telle après que plusieurs pays, dont la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, eurent rappelé que chacun irait de son côté, en fonction de ses moyens. Sur le droit d’asile, sur le brevet communautaire, sur le projet Galileo de navigation par satellite (pourtant urgent), les Quinze ont également renvoyé à plus tard les dossiers qui fâchent.
De blocages en atermoiements, on est carrément passé à la discussion de marchand de tapis lorsqu’est venue l’heure d’attribuer les sièges d’une douzaine d’agences européennes nouvelles. La presse des pays membres a fustigé lundi «l’atmosphère de bazar» régnant dans les huis clos européens. Laeken n’a pas échappé à la règle. Au Danemark, le quotidien Politiken note «l’impressionnante dureté avec laquelle les leaders européens ont tenté de défendre leurs intérêts nationaux». Une «bataille de chiffonniers», selon le journal français Libération.
«La Suède pourrait créer une agence de mannequins»
Silvio Berlusconi s’est une nouvelle fois illustré en exigeant que l’Autorité alimentaire européenne aille non pas à Helsinki mais à Parme. D’abord, a plaidé le président du Conseil italien, celle ville du nord de la péninsule est «synonyme du bien manger». D’ailleurs, selon lui, les Finlandais «ne savent même pas ce qu’est le prosciutto» (jambon, ndlr). Réplique de la présidence belge : «L’attrait gastronomique d’une région n’est pas un argument pour attribuer une agence». Puis c’est au tour du Suédois Persson de réclamer l’Agence pour la technologie de l’information : «Il est étrange qu’elle doive aller à l’Espagne». Le ton monte. Jacques Chirac tente alors de détendre l’atmosphère : «Vu le nombre de belles filles en Suède, Stockholm pourrait créer une agence de mannequins».
Pour offrir du sommet un visage plus réjouissant, les Quinze ont notamment salué l’imminence de l’arrivée de l’euro, encouragé les pays candidats à poursuivre leurs réformes pour entrer dans l’Union, et annoncé une reprise économique «progressive dans le courant de 2002».
Quant aux quelques résultats concrets, le plus spectaculaire est sans doute la création d’une Convention chargée de préparer la réforme des institutions en vue de l’élargissement de l’Europe. Cette instance, qui regroupera plus d’une centaine de membres, s’attellera à cette tâche ambitieuse dès mars 2002, sous la houlette de Valéry Giscard d’Estaing. L’ancien président français a, de fait, été imposé à l’arraché par la France, sous l’oeil bienveillant de Londres et Berlin. Il sera néanmoins encadré par deux vice-présidents, les anciens chefs de gouvernement belge et italien Jean-Luc Dehaene et Giuliano Amato. En outre, pour respecter de subtils équilibres, un présidium de six membres à été désigné.
Sur les raisons du forcing français, les commentateurs sont unanimes: derrière la réputation de «grand Européen» de l’ex-président de la République se cache le souci de Jacques Chirac de ne pas voir Giscard perturber sa campagne électorale. Dans les couloirs de Laeken, certains ne cachaient pas leur agacement. Autant à cause de la personnalité de l’ancien chef de l’Etat, réputé pour son ego surdimensionné, que pour les motivations qui ont sous-tendu sa désignation, peu en rapport avec l’esprit communautaire. Interrogé sur le nouveau président de la Convention, le Premier ministre belge Guy Verhofstadt, notoirement hostile à Valéry Giscard d’Estaing, a eu ce commentaire ironique: «Il est bien entouré».
Sur la politique étrangère et la défense commune, la Grèce, pour cause de rivalité avec la Turquie, a opposé son veto à un accord entre l’Union et l’Otan. Sur la force multinationale en Afghanistan, la présidence belge a dû revenir sur ses déclarations enflammées annonçant la participation de l’Union en tant que telle après que plusieurs pays, dont la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne, eurent rappelé que chacun irait de son côté, en fonction de ses moyens. Sur le droit d’asile, sur le brevet communautaire, sur le projet Galileo de navigation par satellite (pourtant urgent), les Quinze ont également renvoyé à plus tard les dossiers qui fâchent.
De blocages en atermoiements, on est carrément passé à la discussion de marchand de tapis lorsqu’est venue l’heure d’attribuer les sièges d’une douzaine d’agences européennes nouvelles. La presse des pays membres a fustigé lundi «l’atmosphère de bazar» régnant dans les huis clos européens. Laeken n’a pas échappé à la règle. Au Danemark, le quotidien Politiken note «l’impressionnante dureté avec laquelle les leaders européens ont tenté de défendre leurs intérêts nationaux». Une «bataille de chiffonniers», selon le journal français Libération.
«La Suède pourrait créer une agence de mannequins»
Silvio Berlusconi s’est une nouvelle fois illustré en exigeant que l’Autorité alimentaire européenne aille non pas à Helsinki mais à Parme. D’abord, a plaidé le président du Conseil italien, celle ville du nord de la péninsule est «synonyme du bien manger». D’ailleurs, selon lui, les Finlandais «ne savent même pas ce qu’est le prosciutto» (jambon, ndlr). Réplique de la présidence belge : «L’attrait gastronomique d’une région n’est pas un argument pour attribuer une agence». Puis c’est au tour du Suédois Persson de réclamer l’Agence pour la technologie de l’information : «Il est étrange qu’elle doive aller à l’Espagne». Le ton monte. Jacques Chirac tente alors de détendre l’atmosphère : «Vu le nombre de belles filles en Suède, Stockholm pourrait créer une agence de mannequins».
Pour offrir du sommet un visage plus réjouissant, les Quinze ont notamment salué l’imminence de l’arrivée de l’euro, encouragé les pays candidats à poursuivre leurs réformes pour entrer dans l’Union, et annoncé une reprise économique «progressive dans le courant de 2002».
Quant aux quelques résultats concrets, le plus spectaculaire est sans doute la création d’une Convention chargée de préparer la réforme des institutions en vue de l’élargissement de l’Europe. Cette instance, qui regroupera plus d’une centaine de membres, s’attellera à cette tâche ambitieuse dès mars 2002, sous la houlette de Valéry Giscard d’Estaing. L’ancien président français a, de fait, été imposé à l’arraché par la France, sous l’oeil bienveillant de Londres et Berlin. Il sera néanmoins encadré par deux vice-présidents, les anciens chefs de gouvernement belge et italien Jean-Luc Dehaene et Giuliano Amato. En outre, pour respecter de subtils équilibres, un présidium de six membres à été désigné.
Sur les raisons du forcing français, les commentateurs sont unanimes: derrière la réputation de «grand Européen» de l’ex-président de la République se cache le souci de Jacques Chirac de ne pas voir Giscard perturber sa campagne électorale. Dans les couloirs de Laeken, certains ne cachaient pas leur agacement. Autant à cause de la personnalité de l’ancien chef de l’Etat, réputé pour son ego surdimensionné, que pour les motivations qui ont sous-tendu sa désignation, peu en rapport avec l’esprit communautaire. Interrogé sur le nouveau président de la Convention, le Premier ministre belge Guy Verhofstadt, notoirement hostile à Valéry Giscard d’Estaing, a eu ce commentaire ironique: «Il est bien entouré».
par Philippe Quillerier-Lesieur
Article publié le 17/12/2001