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Zone franc

Un trafic de faux francs CFA

L’enquête sur un trafic de faux francs CFA semble avancer à grands pas et plusieurs personnes ont déjà été interpellées en France et en Afrique. Alors que la BCEAO, la banque émettrice du franc CFA, se veut rassurante, de nombreuses personnes s’inquiètent des répercussions de ce trafic qui touchent déjà sept des huit pays de la zone CFA.
Depuis le 23 mars dernier, date à laquelle les premiers faux billets ont été saisis à Cotonou au Bénin, une psychose s’est installée chez les commerçants africains qui sont nombreux aujourd’hui à refuser les coupures de 10.000 francs CFA. Ce refus est d’autant plus justifié à leurs yeux que ces faux billets «ne sont pas détectables avec les appareils traditionnellement utilisés dans les banques». Tout le monde est d’ailleurs unanime à reconnaître que ces contrefaçons sont «de très bonne qualité et indécelables à l’œil nu pour quelqu’un qui n’est pas spécialiste». Le papier utilisé est d’ailleurs quasiment parfait.

L’enquête menée dans les pays africains de la zone CFA a abouti à l’interpellation de plusieurs personnes. Mais l’arrestation la plus spectaculaire s’est déroulée à Paris, dans un foyer Sonacotra, où une Ivoirienne de 53 ans a été appréhendée en flagrant délit. Cette femme proposait aux locataires de plusieurs foyers parisiens des opérations de change défiant toute concurrence. Elle a été arrêtée au moment ou elle s’apprêtait à changer 500 faux billets de 10.000 francs CFA contre de vrais euros. Un complice de cette Ivoirienne, un Français de 34 ans a été également interpellé en banlieue parisienne. Plusieurs ressortissants africains ont déjà été victimes de ce change frauduleux dont ils ne pouvaient imaginer un seul instant qu’il était basé sur de faux billets.

La BCEAO se veut rassurante

La Banque centrale pour les Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) se veut rassurante quant à l’ampleur du phénomène. Des faux billets de 10.000 francs CFA ont certes été découverts dans sept des huit pays de l’UEMOA, l’Union économique et monétaire ouest-africaine –seule la Guinée-Bissau a été jusqu’à présent préservée-, mais cela ne concerne qu’une faible quantité de billets. Selon Lansina Bakary, le directeur pour la Côte d’Ivoire de la BCEAO, «seul l’équivalent de 100 millions de CFA en fausses coupures de 10.000 a été récupéré depuis le 23 mars alors que l’ensemble de la circulation fiduciaire s’élève à 1634 milliards de CFA». Il estime également que «si le phénomène est apparu aussi spectaculaire, c’est sans doute parce que les billets ont été introduits en même temps dans presque tous les pays de l’UEMOA».

La BCEAO reconnaît toutefois que «c’est la première fois que le franc CFA est attaqué par une contrefaçon aussi avancée». Elle rappelle que «la loi prévoit que le porteur de faux billet doit prouver sa bonne foi car détenir des faux billets constitue une infraction pénale». Elle invite ainsi les usagers à vérifier systématiquement que les billets de 10.000 CFA en leur possession sont bien des vrais. Plusieurs signes permettent en effet de reconnaître un vrai billet. Le papier est notamment sonnant et comporte une impression en relief, un filigrane, un fil de sécurité et l’emblème de la Banque centrale. Tous les faux billets découverts seront saisis et non remboursés.

La BCEAO s’inquiète par ailleurs des répercussions de cette fraude sur le monde rural «plus vulnérable parce que les paysans sont rarement à même de différencier les vrais des faux billets». Une inquiétude qui contredit son apparente sérénité puisqu’elle affirme par ailleurs que le phénomène sera très vite «jugulé». La Banque de France, conceptrice des francs CFA, estime elle en revanche que «les répercussions économique de ce trafic pourraient être importantes en raison de la qualité exceptionnelle de la contrefaçon».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 07/05/2002