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Togo

L’opposition se réunit en Front contre le pouvoir

Le temps des rivalités et des rapports tendus au sein de l’opposition togolaise semble appartenir au passé. L’objectif pour quatre partis de l’opposition, qui se sont constitués en front, est aujourd’hui de réunir les énergies afin de mieux combattre l’adversaire politique que sont le président Gnassingbé Eyadéma et son parti, le Rassemblement du peuple togolais (RPT).
De notre correspondant au Togo

Un Front uni de l’opposition est né jeudi à Lomé de l’initiative de quelques partis qui estiment que la fin du régime du président Gnassingbé Eyadéma en 2003 ne peut s’obtenir qu’en harmonisant leurs ambitions. L’acte constitutif de ce Front a été signé, lors d’une conférence de presse, par les leaders de deux des principaux partis de l’Accord-cadre de Lomé de juillet 1999, Me Yaovi Agboyibo du Comité d’action pour le renouveau (CAR) et le Pr Léopold Gnininvi de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA). Cette acte de naissance du Front a également été signé par Antoine Folly de l’Union pour la démocratie et la solidarité, branche Togo (UDS-Togo) et Nagbandja Kampatibe de l’Alliance pour la démocratie et le développement intégral (ADDI).

Les signataires de l’acte, selon le texte, s’engagent entre autres à réaliser une alliance fondée sur des candidatures uniques lors des prochaines élections et une gestion commune de l’Etat en cas de victoire. Me Yaovi Agboyibo du CAR, désigné à la tête d’un bureau provisoire du Front, composé des quatre leaders, a vite fait de rappeler que cette union «n’est pas un projet de partage d’un gâteau futur, c’est une trêve domestique». «Nous pensons, a-t-il ajouté, qu’il faut assainir nos rapports internes et les attaques collatérales pour pouvoir se concentrer sur l’adversaire». Le bureau du Front est chargé, toujours selon l’acte, «de définir des positions communes» sur les sujets et de travailler à l’élaboration «d’un Accord politique global qui scellera cette union forte». C’est dire qu’il y a encore du chemin à faire. Pour l’instant, l’adhésion des quatre partis n’est acquise que sur les principes de l’unicité des candidatures et de partage des postes en cas de victoire aux élections. Les partis rappellent aussi, et surtout, qu’ils n’iront pas aux élections à n’importe quelles conditions, mais sur la base du code électoral adopté dans le cadre des accords politiques de juillet 1999. Mais, plutôt que de rassembler, l’unicité de candidatures a tendance à créer la division au sein de l’opposition traditionnelle et à justifier l’absence au Front de certaines formations.

Le parti de Gilchrist Olympio, grand absent du Front

Des cinq principaux partis de l’opposition signataires de l’Accord-cadre de Lomé avec la mouvance du président Eyadéma, seuls le CAR et la CDPA ont pour l’instant adhéré au Front qui vient d’être créé. Un problème de leadership, comme il en a toujours existé au sein de l’opposition, a entraîné le désaccord de l’Union des forces de changement (UFC) de l’opposant Gilchrist Olympio. Son parti, fort convaincu de son rôle «de rassembleur et de mobilisateur que le peuple lui a confié», soutient qu’il est le mieux indiqué pour diriger le Front contre le pouvoir. L’UFC, dans un communiqué de presse, s’est par ailleurs prononcée contre la stratégie de l’unicité des candidatures qu’elle trouve «complexe voir impossible à mettre en œuvre». Le parti estime que la mobilisation et l’unité d’actions dans les circonstances actuelles n‘impliquent pas nécessairement le choix de la stratégie de candidatures uniques lors des prochaines élections. «Nous ne voulons forcer la main à personne et nous sommes désireux d’ouvrir ce Front à ceux qui veulent nous rejoindre», réagit le Pr Gnininvi de la CDPA, porte-parole du Front. «Nous prenons l’engagement de tout faire pour que ceux qui ne sont pas aujourd’hui dans ce Front nous rejoignent pour qu’ensemble nous menions le combat», ajoute Me Agboyibo. Outre l’UFC, la Convergence patriotique panafricaine (CPP) de l’ex Secrétaire général de l’OUA, Edem Kodjo et le Parti pour la démocratie et le renouveau (PDR) de Zarifou Ayéva tardent encore à se prononcer sur une adhésion au Front. Mais il n’en demeure pas moins que l’objectif visé par tous reste les élections, raison fondamentale de la constitution du Front uni de l'opposition.

Pour le Front, il est clair que le départ d’Eyadéma et la fin du régime RPT en 2003 «constituent les conditions sine qua non pour engager le Togo sur la voie de la démocratie». «Le départ d’Eyadéma constitue pour nous la priorité des priorités», déclare Me Agboyibo, qui se dit prêt «à tous les sacrifices à cet effet». Mais, avant la présidentielle de 2003 qui met fin, constitutionnellement, au second et dernier mandat du chef de l’Etat, il y a les législatives anticipées dont la date reste encore inconnue. Elles constituent pour le Pr Gnininvi «un passage qui peut indiquer dans quelles conditions les élections présidentielles vont se faire en 2003. C’est pourquoi les législatives ne doivent pas être prises à la légère». L’importance de ce scrutin renforce les partis membres du Front de l’opposition dans leur souci d’union afin d’éviter de fragiliser toute l’opposition. «Tout parti qui chercherait à offrir seul des garanties au pouvoir en vue du changement n‘aura guère de chance de réussir; c’est ensemble que nous devrions rassurer les tenants actuels du pouvoir», conclut le coordinateur du Front, Me Yaovi Agboyibo.



par Guy  Mario

Article publié le 10/08/2002