Irak
Les organisations humanitaires se préparent
En dépit d’un manque de fonds évident -seulement 42 millions de dollars sont disponibles sur les 123 demandés depuis des mois- et de l’évacuation de leur personnel le 18 mars en vue de l’imminence d’un conflit, les agences humanitaires de l’Onu (PAM, Unicef, HCR…etc.) se préparent activement à faire face à d’importants déplacements de la population irakienne. On parle aujourd’hui de 3 millions de personnes à l’intérieur de l’Irak et de centaines de milliers vers les pays limitrophes. Les explications de Corinne Perthuis, porte-parole en France du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR).
RFI : L’annonce d’une guerre prochaine va inévitablement interrompre le programme «pétrole contre nourriture» dont dépend 60% de la population irakienne. Comment, techniquement allez-vous leur venir en aide ?
Corinne Perthuis : Il faut savoir que le programme «pétrole contre nourriture» est déjà interrompu et ce depuis le 18 mars et qu’effectivement 60% de la population irakienne en vivaient. Tout le personnel non indispensable des Nations unies est parti d’Irak depuis hier. Il faut tout d’abord que nous puissions lever des fonds suffisants, et c’est loin d’être le cas. De plus, notre souci permanent est que comme l’aide humanitaire n’est jamais tenu au courant de l’action militaire, nous ne pouvons pas précisément organiser des actions ciblées.
RFI : La situation actuelle est-elle plus ou moins préoccupante que celle que vous avez dû gérer lors de la précédente guerre du Golfe ?
C.P. : Si on compare la situation de 1991 à celle d’aujourd’hui, il faut remarquer qu’actuellement la population est beaucoup plus vulnérable qu’auparavant. En effet, les conditions de vie sont plus difficiles qu’il il y a une douzaine d’années. En 1991, il y a avait eu très peu de fuites de population à l’extérieur du pays, dans les premières semaines du conflit: seulement 65 000 personnes étaient parties. Aujourd’hui, on ne sait pas si la situation va être identique. Le HCR est prêt pour s’occuper de 300 000 personnes dans tous les pays limitrophes, à savoir, l’Iran, la Turquie et la Jordanie. Nous avons un budget qui peut nous permettre de venir en aide à 600 000 personnes, mais ce chiffre est théorique. On note déjà des mouvements de population, notamment dans le Nord de l’Irak. Dans les zones où les minorités sont déjà opprimées et persécutées comme au Kurdistan, là, les gens ont pris leurs précautions et ont toujours en mémoire des souvenirs douloureux des offensives chimiques contre les populations civiles. La situation d’aujourd’hui est beaucoup plus préoccupante que celle de 1991 car la population irakienne a subi des restrictions alimentaires et médicales incommensurables.
RFI : Le financement de l’aide humanitaire pour faire face à une nouvelle guerre semble insuffisant. Qu’en pensez-vous ?
C.P. : Nous, le HCR, qui sommes chargés de protéger les réfugiés, avons du mal à récolter des fonds pour les aider. Pour 600 000 réfugiés, nous ne disposons aujourd’hui que de 19,5 millions de dollars soit 30% du montant dont nous avons réellement besoin pour préparer l’installation des camps, le déploiement du personnel suffisant. Actuellement, nous sommes prêts pour accueillir que 300 000 personnes dans des conditions convenables. Le financement est insuffisant mais il faut dire que nous sommes dans une situation paradoxale : le conflit a été prévu de longue date mais comme il opposait deux camps, l’un pacifique et l’autre guerrier, les fonds n’ont donc pas afflué de façon classique. Les pays qui sont contre la guerre n’ont pas encore versé de fonds car ils considèrent, pour le moment, qu’ils sont inutiles car ils font tout pour éviter qu’un conflit n’explose.
RFI : L’Iran, la Jordanie, la Turquie et le Koweït ont déjà annoncé qu’ils avaient mis en place des structures d’accueil pour les réfugiés irakiens. Ces centres seront-ils suffisants pour accueillir des centaines de milliers de personnes ?
C.P. : Le problème n’est pas d’avoir des centres en nombre suffisant mais que le droit humanitaire international soit respecté, c’est-à-dire que les frontières avec ces pays là restent ouvertes. A l’heure actuelle, notre grande préoccupation est que les promesses qui nous ont été faites aujourd’hui, à savoir l’ouverture des frontières, soient respectées quand le conflit débutera. A partir du moment où il y a une décision politique des pays d’asile et des pays donateurs, notre mission est assez facile et nous pouvons aisément nous déployer. En revanche, ce qui est difficile à combattre c’est un «non» des pays voisins qui refusent de faire passer des réfugiés aux postes frontières.
Corinne Perthuis : Il faut savoir que le programme «pétrole contre nourriture» est déjà interrompu et ce depuis le 18 mars et qu’effectivement 60% de la population irakienne en vivaient. Tout le personnel non indispensable des Nations unies est parti d’Irak depuis hier. Il faut tout d’abord que nous puissions lever des fonds suffisants, et c’est loin d’être le cas. De plus, notre souci permanent est que comme l’aide humanitaire n’est jamais tenu au courant de l’action militaire, nous ne pouvons pas précisément organiser des actions ciblées.
RFI : La situation actuelle est-elle plus ou moins préoccupante que celle que vous avez dû gérer lors de la précédente guerre du Golfe ?
C.P. : Si on compare la situation de 1991 à celle d’aujourd’hui, il faut remarquer qu’actuellement la population est beaucoup plus vulnérable qu’auparavant. En effet, les conditions de vie sont plus difficiles qu’il il y a une douzaine d’années. En 1991, il y a avait eu très peu de fuites de population à l’extérieur du pays, dans les premières semaines du conflit: seulement 65 000 personnes étaient parties. Aujourd’hui, on ne sait pas si la situation va être identique. Le HCR est prêt pour s’occuper de 300 000 personnes dans tous les pays limitrophes, à savoir, l’Iran, la Turquie et la Jordanie. Nous avons un budget qui peut nous permettre de venir en aide à 600 000 personnes, mais ce chiffre est théorique. On note déjà des mouvements de population, notamment dans le Nord de l’Irak. Dans les zones où les minorités sont déjà opprimées et persécutées comme au Kurdistan, là, les gens ont pris leurs précautions et ont toujours en mémoire des souvenirs douloureux des offensives chimiques contre les populations civiles. La situation d’aujourd’hui est beaucoup plus préoccupante que celle de 1991 car la population irakienne a subi des restrictions alimentaires et médicales incommensurables.
RFI : Le financement de l’aide humanitaire pour faire face à une nouvelle guerre semble insuffisant. Qu’en pensez-vous ?
C.P. : Nous, le HCR, qui sommes chargés de protéger les réfugiés, avons du mal à récolter des fonds pour les aider. Pour 600 000 réfugiés, nous ne disposons aujourd’hui que de 19,5 millions de dollars soit 30% du montant dont nous avons réellement besoin pour préparer l’installation des camps, le déploiement du personnel suffisant. Actuellement, nous sommes prêts pour accueillir que 300 000 personnes dans des conditions convenables. Le financement est insuffisant mais il faut dire que nous sommes dans une situation paradoxale : le conflit a été prévu de longue date mais comme il opposait deux camps, l’un pacifique et l’autre guerrier, les fonds n’ont donc pas afflué de façon classique. Les pays qui sont contre la guerre n’ont pas encore versé de fonds car ils considèrent, pour le moment, qu’ils sont inutiles car ils font tout pour éviter qu’un conflit n’explose.
RFI : L’Iran, la Jordanie, la Turquie et le Koweït ont déjà annoncé qu’ils avaient mis en place des structures d’accueil pour les réfugiés irakiens. Ces centres seront-ils suffisants pour accueillir des centaines de milliers de personnes ?
C.P. : Le problème n’est pas d’avoir des centres en nombre suffisant mais que le droit humanitaire international soit respecté, c’est-à-dire que les frontières avec ces pays là restent ouvertes. A l’heure actuelle, notre grande préoccupation est que les promesses qui nous ont été faites aujourd’hui, à savoir l’ouverture des frontières, soient respectées quand le conflit débutera. A partir du moment où il y a une décision politique des pays d’asile et des pays donateurs, notre mission est assez facile et nous pouvons aisément nous déployer. En revanche, ce qui est difficile à combattre c’est un «non» des pays voisins qui refusent de faire passer des réfugiés aux postes frontières.
par Propos recueillis par Clarisse VERNHES
Article publié le 19/03/2003