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Tabac

Arrêter avant qu’il ne soit trop tard

Le tabagisme est un fléau mondial dont les ravages en terme de mortalité dépassent ceux provoqués par les pires épidémies. Malgré cette évidence, la consommation de tabac qui touche déjà plus d’un milliard d’individus continue d’augmenter dans le monde et les pays en développement suivent dorénavant la voie ouverte dans ce domaine par les pays industriels. Pour essayer de lutter contre ce phénomène, les Etats membres de l’Organisation mondiale de la Santé ont adopté, le 21 mai, une convention-cadre qui définit un ensemble de mesures destinées à réduire la mortalité liée au tabac.
Le tabac est un tueur silencieux mais efficace. Au vingtième siècle, il a provoqué la mort d’environ 100 millions de personnes dans le monde. Et il tue à l’heure actuelle plus de gens chaque année que le sida, la drogue, les accidents de la route, les meurtres et les suicides réunis. Près de quatre millions de personnes sont ainsi tous les ans victimes du tabac. Et les pays en développement ont dorénavant le triste privilège de compter plus d’hommes (1,8 million) qui meurent de maladies liées au tabac que les pays industrialisés (1,6).

Les projections pour les prochaines années ne sont donc pas encourageantes. Globalement, on estime qu’un fumeur de longue durée sur deux décèdera d’une cause liée à sa consommation de cigarettes. A l’horizon 2030, «l’épidémie de tabagisme» pourrait ainsi provoquer la mort de 10 millions de personnes par an dont 70% dans les pays en développement. Et environ le quart des fumeurs mourront prématurément entre 35 et 69 ans. Même si le pourcentage de fumeurs diminue dans les prochaines années, leur nombre augmentera tout de même en valeur absolue en fonction de la croissance démographique mondiale. De ce point de vue, c’est dans des pays comme la Chine et l’Inde que l’on attend la plus grosse augmentation des décès dus au tabac.

La lutte contre le tabagisme est d’autant plus difficile que le fait de fumer est considéré comme un plaisir, qu’il provoque un phénomène de dépendance et que les effets sur la santé peuvent passer inaperçus pendant très longtemps. C’est pour cela que les campagnes de prévention jouent énormément sur l’explication mais aussi sur la peur. La petite phrase que l’on retrouve sur les paquets de cigarette et qui est censée mettre en garde le consommateur [le tabac nuit gravement à la santé] ne réussit bien souvent pas à provoquer une prise de conscience suffisante. C’est pourquoi de plus en plus, on insiste sur les maladies provoquées par la consommation de tabac.

Cancers du poumon et maladies cardiovasculaires

Dans ce domaine, les cancers et les maladies cardiovasculaires arrivent en tête de liste. Le tabac est, en effet, la première cause évitable de cancer. Dans le seul cas du cancer du poumon qui touche chaque année 1,2 million de personnes et provoque presque 18% de l’ensemble des décès dus au cancer, un fumeur court 20 à 30 fois plus de risques d’en développer une forme qu’un non fumeur. Dans le cas des cancers du larynx ou du pharynx, le risque relatif est multiplié par six. Même le tabagisme passif est dangereux et provoque une augmentation du risque de déclarer une crise d’asthme ou des maladies respiratoires (bronchite, pneumonie). La diminution de la fréquence des cancers dans le monde passe donc essentiellement par la lutte contre le tabagisme associée à la promotion d’une meilleure alimentation. Ces deux facteurs ont été à l’origine de 43% des décès imputables au cancer en 2000 (2,7 millions) et de 40% des nouveaux cas (4 millions).

Les fumeurs sont de la même manière les principaux candidats à l’attaque cardiaque. Selon une étude réalisée au Royaume-Uni, un fumeur âgé de 30 à 40 ans aurait cinq fois plus de chances d’avoir une crise cardiaque qu’un non-fumeur du même âge. En règle général, les décès par maladies cardiovasculaires attribuables au tabac sont plus nombreux que ceux par cancer du poumon, qui est pourtant le principal cancer du fumeur (625 000 contre 514 000 en 1995 dans les pays développés). Des chercheurs de la Harvard Medical School de Boston ont d’autre part montré que fumer 20 cigarettes par jour multiplie par deux le risque de faire une attaque cardiaque.

Même si les effets de la consommation de tabac sur la santé sont indéniables, il n’est jamais trop tard pour arrêter et on en tire toujours un bénéfice. Un an après le sevrage, le risque de cardiopathie coronarienne diminue déjà de moitié et revient au niveau de n’importe quel non fumeur au bout de 15 ans. Dans le cas du cancer du poumon, il faut attendre entre 10 et 14 ans pour voir le risque de mortalité diminuer jusqu’à redevenir normal.

Dans ce contexte, l’Organisation mondiale de la Santé a finalement réussi, après quatre années de négociations, à élaborer un traité international sur la lutte antitabac. Ce texte a été adopté à l’unanimité lors de l’Assemblée générale de l’OMS, en mai, malgré les réticences de certains pays comme les Etats-Unis, notamment sur l’interdiction de la publicité. L’adoption de ce traité marque une étape importante car il s’agit de la première convention internationale en matière de santé publique. Reste à savoir quand le texte atteindra le seuil minimum de ratifications nécessaire (40 Etats) pour qu’il puisse commencer à être appliquer. On sait d’ores et déjà que cela prendra plusieurs années.


Liens utiles:
- OMS dossier tabac



par Valérie  Gas

Article publié le 29/05/2003