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Suède

Euro : la mariée n’est pas assez belle

Les Suédois devraient rejeter par referendum, dimanche, l’adoption par leur pays de la monnaie unique européenne. Toutefois, l’assassinat de Anna Lindh, la ministre des Affaires étrangères favorable à l’euro a entraîné la suspension de la campagne électorale et jeté le trouble dans les esprits.
Avant l’assassinat de la ministre des Affaires étrangères, Anna Lindh, qui s’était engagée fermement pour l’entrée de la Suède dans la zone euro, une majorité des sept millions d’électeurs suédois s’apprêtaient, selon des sondages concordants, à répondre «non», dimanche, au referendum. La mort tragique de la ministre a immédiatement mis fin à la campagne électorale et jeté à l’évidence le trouble dans les esprits. Les derniers sondages publiés samedi faisaient état d’une incertitude croissante dans l’électorat.

Il n’en demeure pas moins que, globalement, les Suédois ne sont pas d’accord pour troquer leur couronne contre la monnaie unique européenne, bien que la classe politique, les médias et les milieux d’affaires aient tenté de les convaincre du contraire.
De la manière la plus simple qui soit l’électeur suédois semble considérer que la mariée n’est pas assez belle. Les perspectives de croissance de son pays sont supérieures à celles enregistrées dans les douze pays qui ont adopté l’euro. L’économie est solide, le pays est bien géré et a même dégagé un excédent budgétaire en 2002. Quel avantage tirerait-il de l’euro qui n’a pas pour l’instant de dynamique de croissance propre et reste à la remorque des Etats-Unis tandis que les deux poids lourds de la zone, France et Allemagne, s’exonèrent du respect du pacte de stabilité et de croissance en aggravant le déficit de leurs finances publiques. Les eurosceptiques suédois jugent plus facile et rapide de manœuvrer en solitaire quand le vent change plutôt que de souffrir de la lourdeur et de l’inertie du paquebot européen.

Naviguer en solitaire

A ces raisons s’ajoutent des aspects plus politiques: les Scandinaves aiment à cultiver leur particularisme et répugnent à perdre davantage encore de souveraineté qu’ils ne l’ont fait, il y a huit ans, en faisant leur entrée dans l’Union européenne. Déjà, le fonctionnement de l’Union entraine des critiques contre le manque de transparence des institutions, la complexité des prises de décisions, l’absence de lien démocratique entre dirigeants et citoyens. Ils ne souhaitent donc pas faire un pas de plus dans la direction d’un Etat fédéraliste.

Pourtant le Premier ministre suédois Goeran Persson n’a pas ménagé sa peine pour inverser la tendance. Il a plaidé que l’adhésion de la Suède à l’euro constitue un rempart contre les multinationales et le capital sans frontières. Il a fait appel à son ami le ministre grec des Affaires étrangères Georges Papandréou qui est venu mettre en lumière les chances de rendre, grâce à l’euro, la mondialisation plus humaine, de mieux soutenir la démocratie, la paix, l’ONU, le droit international et l’environnement, autant d’arguments qui vont généralement droit au cœur des Nordiques.
Bien que le non à l’euro semble devoir finalement l'emporter, un certain nombre des électeurs qui vont voter contre l’euro expliquent pourtant, lors des enquêtes réalisées, que l’entrée de leur pays dans la zone monétaire européenne est envisageable, mais plus tard. Des spécialistes fixent cette échéance à 2010.

Ce résultat électoral est attendu dans d’autres pays européens concernés, eux aussi, par l’adhésion à la monnaie unique européenne. En Grande-Bretagne, Tony Blair perdrait un argument en faveur de la disparition de la livres sterling au profit de l’euro et un refus suédois rendrait sa tâche encore plus difficile qu’elle ne l’est déjà. Au Danemark, on scrute l’attitude suédoise car ce pays a rejeté l’euro par referendum en 2000 et le gouvernement souhaite reposer la question à l’occasion d’une nouvelle consultation électorale.



par Francine  Quentin

Article publié le 13/09/2003