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Audiovisuel

Les frères ennemis associés dans la chaîne info internationale

La chaîne française d’information internationale est sur les rails. Le projet sera le fruit d’une alliance des deux grands groupes public France Télévisions et privé TF1. Cette future «CNN à la française» devrait voir le jour d’ici la fin de l’année 2004.
Dans un an, la France aura sa propre chaîne d’information internationale voulue par le président Jacques Chirac. Le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a «invité» France Télévisions et TF1 à «engager un travail de préfiguration» pour lancer ensemble, d’ici la fin de l’année 2004, la chaîne d’information internationale (CII). Suite aux recommandations du député-maire de Cannes Bernard Brochand, auteur d’un rapport sur le sujet, la future CII associera les secteurs public et privé. Les deux partenaires détiendront chacun 50% des parts.

Trois candidatures avaient été officiellement déposées en avril dernier pour créer cette antenne. Les trois candidats étaient le tandem public France Télévisions/Radio France Internationale (RFI), ainsi que les groupes privés TF1 et Canal+. Très déçue d’avoir été écartée du projet, la direction du groupe Canal+ a estimé, pour sa part, que ce projet allait «renforcer la position dominante de TF1 dans le domaine de l’information».

L’ambition est de rivaliser avec les grandes chaînes internationales déjà présentes sur le marché comme l’américaine CNN, la britannique BBC World ou la chaîne arabe Al Jazira. La coopération public/privé devrait être «la meilleure garantie de l’indépendance de la chaîne par rapport à tous les pouvoirs», a précisé Marc Tessier, le PDG de France Télévisions. La rédaction spécifique constituée d’une centaine de journalistes sera «autonome» et «multilingue».

Un faible budget

Dans un premier temps, la chaîne info qui devrait émettre en français puis assez rapidement en anglais et en arabe, sera diffusée en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient mais pas en France. Les programmes ne seront pas vus dans l’Hexagone, TF1 ayant sur le territoire national sa propre chaîne d’information en continu, LCI. Par la suite, la diffusion pourrait être élargie à l’Amérique du Sud, l’Asie ou encore l’Amérique du Nord. Toutefois, la ville de New-York devrait être couverte en raison du fait qu’elle abrite le siège des Nations unies.

Une chaîne «résolument internationale» conçue pour «porter la voix de la France à l’étranger», selon les propres termes du rapporteur Bernard Brochand. «Je préfère dire une voix de la France», a modéré Marc Tessier, le patron de France Télévisions, selon qui le projet permet à son groupe de «jouer dans la cour des grands». Pour son réseau à l’étranger, la future chaîne pourra collaborer avec des prestataires extérieurs comme l’Agence France Presse et Radio France Internationale.

Reste la question épineuse du financement. Le budget de fonctionnement estimé à 70 millions d’euros pour les cinq premières années est jugé, par certains, trop faible. Ce financement qui devrait être entièrement pris en charge par des fonds publics, est deux fois moins important que celui de ces concurrentes étrangères (200 millions d’euros par an pour la BBC World et 150 millions de dollars pour Al Jazira). Bernard Brochand a confirmé par ailleurs que le ministère de tutelle serait en principe les Affaires étrangères, déjà en charge de l’audiovisuel extérieur c’est-à-dire RFI, Canal France International (CFI) et la chaîne francophone internationale TV5.

L’arrivée de la future CII risque de bouleverser l’ensemble de la radiodiffusion extérieure. En effet, le rapport Brochand suggère une restructuration de l’audiovisuel public extérieur afin de réaliser des économies d’environ 15 millions d’euros, en réorientant notamment les ressources allouées au traitement de l’information chez Arte et TV5. Pour des raisons d’économie toujours, le rapport préconise également la création d’une unique chaîne généraliste francophone, reprenant les missions dévolues à RFO et TV5.

Mais tout n’est pas encore bouclé, et la mission du député-maire de Cannes, Bernard Brochand, a été prolongée de trois mois, en partie pour mieux évaluer les besoins financiers et réfléchir à des recettes nouvelles. Le rapport Brochand suggère notamment la création d’un «club de fondateurs» réunissant les principaux annonceurs français. Ce club pourrait contribuer au financement de la chaîne à hauteur de 5 millions d’euros par an et bénéficier en contrepartie d’opérations publicitaires et de parrainage.



par Myriam  Berber

Article publié le 01/10/2003