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Côte d''Ivoire

Front uni contre Gbagbo

Les querelles persistantes au sein du gouvernement ivoirien et dans la classe politique en général ont éclaté au plein jour, le 3 mars dernier. La dernière expression de ce malaise a été la suspension de la participation des ministres issus du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) au gouvernement de réconciliation nationale.
«Le PDCI ne se retire pas du gouvernement parce que ce gouvernement est le nôtre. Il n’appartient pas au FPI», a déclaré Maurice Guikahué le porte-parole du PDCI. Ce parti, par cette déclaration, veut bien montrer que le boycott du conseil des ministres n’est pas une démission des fonctions. En effet, les ministres continuent d’exercer leur mission en dehors de tout cadre institutionnel parce qu’ils pensent que le président Laurent Gbagbo organise lui-même «les blocages et les dysfonctionnements» au sein de l’appareil dirigeant. Les reproches repris également par la plupart des partis politiques font état «des difficultés que rencontrent les ministres des forces politiques autres que le FPI (Front populaire ivoirien, le parti du président), dans la nomination de leurs collaborateurs et des responsables des structures sous tutelle».

Le dernier acte du président Laurent Gbagbo qui a suscité la colère du PDCI est son refus de signer un décret de renouvellement du conseil d’administration du port autonome d’Abidjan. L’affaire a pris des proportions d’affaire d’Etat parce que le directeur général du port d’Abidjan est l’une des figures du FPI très proche du président. La volonté d’en découdre avec le président a conduit les frondeurs à chercher un soutien des autres formations politiques ivoiriennes. Une réunion s’est alors tenue le 7 mars et tous les partis à l’exception du Parti ivoirien du travail (PIT) ont soutenu la décision prise par le PDCI. Outre le manque de liberté de nommer leurs collaborateurs, ces partis dénoncent également le peu de moyens mis à la disposition de leurs départements. Ils dénoncent aussi l’existence d’un «gouvernement parallèle qui affecte le bon fonctionnement des ministères de la Justice, de la Défense, de l’Administration du territoire, de la Sécurité et des Affaires étrangères».

Les élections de 2005 en ligne de mire

Ces partis ont décidé la création d’un comité de réflexion qui aura pour mission de dresser un inventaire de tous les points de blocages à l’application «pleine et entière des accords de Linas-Marcoussis». Les signataires ont également confié à ce comité de réflexion la mission des réfléchir aux moyens de remédier aux différents manquements. La perspective des échéances électorales de 2005 a motivé ces choix. La question foncière, la nationalité, l’éligibilité sont autant de sujets que les autres partis, membres de la coalition gouvernementale, souhaitent voir résolus. Ils demandent pour cela au président Laurent Gbagbo de s’en tenir à l’application rigoureuse des dispositions des accords de Marcoussis et exigent de lui «la présentation et le respect d’un chronogramme».

Pour les alliés du pouvoir de Laurent Gbagbo, tout cela ressemble à un coup bien pensé. Ils s’interrogent sur le réveil subit de ces contestataires qui feignent de découvrir aujourd’hui une situation. Ils notent avec étonnement ces réactions alors que le processus de désarmement aurait dû débuter ce 8 mars. Les Forces nouvelles (ex-rebelles) ont en effet refusé de s’y soumettre en désarmant leurs troupes tant qu’ils n’obtiendraient pas certaines garanties. Par ailleurs, ces mouvements d’humeur au sein du gouvernement coïncident avec l’examen du dossier ivoirien au Conseil de sécurité de l’ONU, pour l’envoi de casques bleus en Côte d’Ivoire. Le représentant spécial de l’ONU et le Comité international de suivi des accords de Marcoussis regrettent ce rebondissement dans l’une des dernières phases du processus de retour à la paix en Côte d’Ivoire.



par Didier  Samson

Article publié le 08/03/2004