Soudan
Début des rencontres de N'Djamena sur le Darfour
(Photo: AFP)
Alors que les organisations de défense des droits de l’homme crient au scandale en tenant le gouvernement soudanais pour responsable de la situation humanitaire catastrophique dans le Darfour, une mission d’enquête de l’ONU est arrivée à Khartoum, le 22 avril, mais avec un plan de travail revu et corrigé. Pendant une dizaine de jours, la commission composée de cinq membres, avait séjourné à N’Djamena au Tchad sans obtenir l’autorisation de Khartoum de se rendre dans le Darfour. La commission n’a pu visiter que les camps de réfugiés établis au Tchad. Le gouvernement soudanais avait récusé l’objet même de l’enquête assignée à la mission onusienne. Elle devait enquêter sur les accusations de «nettoyage ethnique» dont les milices arabes soutenues par le gouvernement sont tenues responsables. En effet le conflit oppose les populations négro-africaines aux autres groupes ethniques arabisants.
De retour à Genève, la mission a rendu compte de l’échec de ses tentatives et la Commission des droits de l’homme de l’ONU a repris à son compte le dossier. L’ONU contourne la difficulté en mettant en avant son organe humanitaire qui dépêchera une mission humanitaire chargée d’évaluer les besoins des populations victimes d’exactions «de la part des milices dans cette région de l’ouest de Soudan», a-t-on précisé au siège de l’organisation, en Suisse. Le programme alimentaire mondial (Pam) a lancé un appel de 98 millions de dollars pour venir en aide à 1,2 million des personnes directement victimes du conflit qui a éclaté en 2003.
Plus de 100 000 personnes auraient trouvé refuge dans des camps situés au Tchad, alors que plus d’un million des personnes sont déplacées, fuyant les zones de combat.
L’ONU ne veut fâcher personneAu siège de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, un nouveau texte sur la situation dans le Darfour précise que le gouvernement du Soudan a accepté de «neutraliser les milices armées». Les différents communiqués sont dégagés de toute ambiguïté concernant les responsabilités de Khartoum dans les exactions commises dans cette région en proie à un conflit civil. Du coup, le Haut commissariat aux droits de l’homme de l’ONU vient d’obtenir l’autorisation d’envoyer sur place une mission. Il est aussi question d’envoyer «un expert indépendant» sur la situation des droits de l’Homme en lieu et place d’un «rapporteur spécial» comme initialement prévu.
Amnesty international et la Fédération internationale des droits de l’homme, s’inquiètent de l’attitude des organes spécialisés de l’ONU, alors que, selon ces organisations, il aurait fallu une action rapide et une désignation effective des responsabilités, parce que les témoignages des populations réfugiées suffisent à tirer la sonnette d’alarme. Les organisations de défense des droits de l’homme en veulent pour preuve le rapport de la première mission de l’ONU, qui n’a pu aller dans le Darfour, mais qui a recueilli des témoignages dans les camps de réfugiés et qui concluait à des présomptions de «crimes de guerre et/ou des crimes contre l’humanité» commis par les forces gouvernementales soudanaises et des milices pro-gouvernementales.
Depuis la signature d’un cessez-le-feu, le 8 avril dernier, la communauté internationale cherche à réunir les protagonistes du conflit pour trouver une issue politique à la crise. Dans cette logique le président des Etats-Unis, George Bush a rejeté l’idée, pour le moment, de sanctions contre le gouvernement soudanais ni aux rebelles du sud. Washington croit les interlocuteurs de «bonne foi» pour trouver une solution de paix. Mais au ministère tchadien des Affaires étrangères aucun signe annonciateur d’une réunion n’est enregistré. Le mouvement de libération du Soudan (MLS) et le Mouvement pour la justice te l’égalité (MJE) opposé aux forces gouvernementales dans le Darfour, se trouvent déjà dans la capitale tchadienne, mais certaines dissensions au sein du MJE ont compromis la tenue effective de la réunion. Les mouvements rebelles pour banaliser leur défection annoncent qu’ils sont présents à N’Djamena, non pas pour négocier la fin du conflit mais pour envisager les termes de «négociations futures». La Commission européenne à Bruxelles a jugé la situation «très préoccupante» et a annoncé «une aide additionnelle de deux millions d’euros» destinée aux populations réfugiées actuellement au Tchad.
Le chef de l’Etat tchadien, Idriss Déby, a reçu tous les protagonistes pour redéfinir avec eux et en collaboration avec les délégations des Nations unies et de l’Union africaine de nouvelles bases de travail qui ont finalement porté leurs fruits. Les résolutions et leur respect par tous les signataires diront si les rencontres de N’Djamena ont été ou non un succès.par Didier Samson
Article publié le 23/04/2004 Dernière mise à jour le 23/04/2004 à 16:10 TU